Baignade à Tartunaq

11 août 2019
 

 

Pas un bruit, pas une ride sur l’eau, l’océan Arctique est vraiment généreux avec nous. A une encablure de notre mouillage, une immense plage de sable gris. En toute confiance deux renardeaux polaires tentent de dépouiller une carcasse de phoque. Un simple rappel pour nous, les passagers de la Louise, qu’ici l’existence n’est que survie. Devant nos bols de céréales, nous débattons sur le programme de la journée. Le plan est conclu,nous descendrons à terre pour aller explorer ce bout du monde. Mais l’équipe est prête à bien plus qu’une simple randonnée, ils ont la volonté de tenter une nage polaire en simple maillot de bain. Les premières à avoir décidé de cette expérience , sont Lara et Elia, les autres par dépit ou provocation suivront le mouvement. Ils doivent tout prévoir, je serai juste là pour leur sécurité. Christian, que j’aime appeler le capitaine du drakkar est le mécène de cette aventure et bien sûr il fait partie de l’équipage.
Je vois souvent dans ses yeux beaucoup d’admiration pour ses jeunes prêts à en découdre avec leur nouvelle vie. Souvent les « autres » les définissent de
courageux, vous ne pouvez pas savoir comme cela les agacent, les irritent. Ils ne sentent pas courageux mais juste vivants. Avant d’embarquer sur l’annexe pour rejoindre la terre ferme,  j’emporte un seau et une écope, cela sera le petit plus pour la sortie du bain. Là-bas au bout de la plage un cours d’eau se jette dans 9l’océan, de l’eau douce pour se dessaler. Dédé le second retourne à bord, le silence nous saisi, l’immensité nous donne le frisson, nous ne sommes rien. En silence,nous suivons les striures causées par la marée. En abondance des traces de renards et de rennes pas un seul pas d’homme. Nous y voilà, le cours d’eau délimite la zone de baignade. Lara la première se déshabille, elle sourit mais nous la sentons concentrée. Sans ciller, sans trembler, elle marche au ralenti dans l’eau, soudain elle stoppe sa marche et s’immerge dans une eau à 4 petits degrés.
Pas un rictus, elle sourit, ca y est elle réalise son rêve. Elle nage, elle ne
veut plus sortir de l’eau, elle comprend des choses. La douleur, le froid ne sont que des informations à nous de ne pas leur donner trop d’importance. Le corps en fusion elle sort de l’eau, le seau est rempli d’eau douce un peu plus chaude que l’océan, elle se dessale pour laisser la place aux autres. Puis ce sera à Elia,qui toute seule découvrira la baignade en eau froide puis Bastien, Jean-Luc et Maxence. Christian et Louane ne sont pas prêts, ce sera peut-être pour une prochaine fois. Tous les nageurs sont ravis, émus de ce moment de grâce. Mais un défi en appelle un autre, un sommet semble narguer le groupe, ils partent à son assaut. De la plage je regarde le groupe, la pente est raide, compliquée d’accès,que le Diable se tienne tranquille mes vaillants chevaliers lui couperont la queue en atteignant fièrement le sommet. En attendant leur retour, Elia et Louane m’aident à bâtir un foyer de fortune et récolter des branches mortes de camarines, nous allons faire cuire des moules sur une pierre plate…
Nous reprenons la mer pour nous rapprocher de la calotte polaire, la mer se
charge de glace, la température chute, l’aventure continue.
Takuss

Village abandonné de Qulissat

10 août 2019

Pas une ride, la mer est d’une tranquillité que seul le Grand Nord sait offrir.
Le petit-déjeuner sera pris en mer, la journée va être une longue navigation. Les icebergs nous observent, savent-ils qu’à bord certains sont en sursis ? Ce qui est certain, c’est qu’ils se moquent de nos bout en moins. A travers le hublot du cockpit, bien au chaud, un bol de céréales nous réchauffe un peu. Soudain sur notre bâbord, un troupeau de phoques capuchons nous observent, espiègles, mystère de la nature leur museau possède une poche qu’ils gonflent en cas de danger ou d’excitation. Un peu plus loin un bébé phoque annelé se prélasse sur un bout d’iceberg à la dérive, aura-t-il déjà vu des hommes ! Le ciel est d’un bleu azur pur et cinglant, le pont de La Louise devient l’espace d’une matinée une aire de bronzage. Seul le ronron du diesel casse l’immensité de ce lieu. Chaque iceberg a sa forme, son histoire. Nous imaginons son destin, sa route.
Certainement c’est un de ses aïeuls qui a rencontré le Titanic. Le GPS nous
indique que la latitude 70° nord vient d’être franchi, le Pole Nord n’est pas si loin que ça.

Nous déjeunerons en mer, l’océan arctique est toujours clément. Vers
14h, l’ancre est mouillée devant le lieu dit Qillulisat. Devant nous, une centaine de maisons multicolores se dressent, comme beaucoup d’endroits au Groenland ce village est abandonné. Dédé le second nous débarque, mais il y a du monde.Quelques maisons sont en ruines, mais d’autres arborent encore une belle prestance. En haut de la piste en terre un homme s’approche de nous.En anglais nous communiquons, c’est une équipe de géologues qui prélèvent quelques pièces uniques. Ils nous invitent dans la maison communale qu’ils utilisent comme camp de base. Sur une vieille table une pile de vieilles photos tentent de nous raconter le temps jadis…
Nous continuons notre visite vers l’ancien hôpital, tous les carreaux ont été
brisés, la vision est étrange. Le plancher est en ruine, les pièces dévastées.
Dans une salle, nous trouvons une ancienne salle de radio, les jeunes joueront les apprentis médecins, les fous rires inondent le village fantomatique. A vu de nez,nous sommes d’accord pour estimer à 300 individus ce lieu qui était une mine de charbon minéral. En 1970, l’exploitation a du être fermée pour manque de rendement, le village fut abandonné. A notre retour, nous croisons une autre personne qui s’empresse de nous causer. Ce vieil homme est arrivé ici en 1947,son père était médecin du village. Il nous raconte sa vie ici, un vrai film des temps anciens… Depuis 15 ans,il vient seul chaque été,passer 3 mois dans son village, mystérieux destin!Il est temps de retourner à la plage, nous devons reprendre la mer pour trouver un mouillage sécurisé…. Devant un thé fumant et quelques biscuits, nous échangeons sur cette visite, plus qu’étrange… Entre les icebergs nous louvoyons, la vie est vraiment belle au pays des Niviarsiaq…
Takuss

Premier jour de mer vers Qeqertassuaq

9 août 2019

 Le brouillard est encore présent ce matin dans la baie face au village qui semble fantôme. La fine équipe Bout de vie est en pleine forme, le petit-déjeuner est le bienvenu pour la longue journée de mer qui nous attend.       

La passe est en mode marée haute, avec prudence la Louise se faufile entre courant et cailloux. Sur notre bâbord au large, un immense iceberg nous salue, lui aussi fait route doucement vers le nord. La température est fraiche, la présence de beaucoup d’icebergs accentue le froid matinal. Pas un bateau, pas un mouvement sur l’eau ; seule la brise du nord nous accompagne. En eau profonde, la grande voile de 100m2 est envoyée, cela
appuiera la route sous moteur. Le brouillard va et vient, le slalom entre les cailloux demande beaucoup d’attention au second,Dédé ,qui est à la barre. Tout le monde est sur le pont mais le froid fera rentrer toute la belle bande dans le cockpit. Et dire que dans le sud c’est la canicule avec des milliers de bateaux sur l’eau. Au bout de 4 heures , nous voilà au mouillage à quelques encablures de l’ile de Qeqertassuaq au nord ouest d’Oqaatsut. L’annexe est mise à l’eau , 4 à la fois nous débarquons. Une immense plage sert de refuge à une bande d’oies qui du coup prennent le large. Il nous semble incroyable que sur des dizaines de kilomètres aucune maison, aucun village ne puissent exister. La brise est moins présente à terre du coup les brulots en profitent pour nous harceler. La
toundra est spongieuse mais tout le monde marche joyeusement en silence. Une tombe abandonnée nous rappelle la difficulté de survivre en ces zones.
Ici tout est éphémère. Sur la plage des milliers de traces d’oies nous font comprendre que nous sommes en trop ici. Les vents du sud érodent le rivage et de ci de là des pierres rondes semblent des énigmes géologiques. Avec Bastien, nous nous amusons avec une partie de pétanque polaire en utilisant
ces cailloux absolument sphériques… Pour conclure notre rando nous allumerons un petit feu histoire de se réchauffer… Louane et Lara m’ont fait une confidence ! Elles n’avaient jamais osé pratiquer la randonnée, je crois qu’en rentrant elles vont s’y mettre…
Takuss

Premiers pas à Oqaatsut…

8 août 2019

Le journal de bord reprend du service, les 6 équipiers bout de vie sont biens installés depuis avant-hier dans le petit village d’Oqaatsut situé à plus de 300km au nord du cercle polaire sur la côte nord-ouest du Groenland. Bien qu’en été la température est bien différente d’une saison de canicule dans la lointaine Europe. Ici pas de nuit en ce moment et un silence à couper le souffle. Le village de 23 habitants semble vivre au ralenti, seul les chiens de temps à autre donnent de l’ambiance pour réclamer leur part de morue ou de phoque. Le tipi est installé sur la zone réservée au « camping ». Pas de commodité mais une vie absolument surréaliste pour un habitant des villes. La vie de baroude peut commencer. Les baleines et les phoques sont au rendez-vous, comme cette année je n’en ai jamais vu autant, incroyable. La première journée fut ensoleillée, ce qui leur a permis de prendre pied avec un environnement très différent de leur quotidien. Rando sur les hauteurs du village et récolte de myrtilles pour la première tarte de la petite maison bleue. Les règles sont stricts, personne ne doit partir seul, personne n’a le droit d’improvisé, ici en un claquement de doigt tout peut basculer dans l’extrême. Les repas se font dans la maison mais il est hors de question de la squatter, tous doivent rester dehors à comprendre et humer ce pays fascinant. Mon pote Steen est venu me prêter main forte pour ramener tout le monde d’Ilulissat au village, son sourire nous a beaucoup touchés. Ici la rigueur du pays rend les gens silencieux et avare en sourire, un bon mot, un regard pétillant cela est un cadeau inestimable, il nous a comblés.                                                                                                   Aujourd’hui le crachin à rendu la journée comme je les aime, mystérieuse à souhait. Entre deux icebergs nous avons caboté jusqu’à une grande dalle minérale pour attaquer notre exploration du jour. Toundra, myrtilles, camarines à n’en plus finir et des espaces vide de toute âme, de toute connotation humaine nous et le vide. Là-bas au large un souffle, dame baleine nous offre une aubade, serait-elle l’ange gardien du groupe… Ce soir le poêle à pétrole est allumé, les têtes en l’air font sécher leurs chaussettes, mon rôle de grand frère me demande de les rassurés mais aussi de leur exprimer ma manière de voire les choses. Ici, dans le grand nord des affaires mouillées peuvent vite engendrer des situations compliquées. Les jeunes ont compris la première leçon. Devant leur visage rougit par le froid et l’océan arctique je suis ému en douce, de les voir sous mon toit. Et dire que pour un cheveu on aurait pu ne pas être là… Demain le voilier polaire la Louise devrait arriver au mouillage, là commencera encore une autre aventure. Vive la vie…

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Rencontres du bout du Monde…

18 juillet 2019

Collé, le nez au carreau, je suis contemplatif. Ma journée de restauration s’est déroulée à merveille, Je cumule quand même 12h de travaux consécutifs ! La prothèse qui me faisait souffrir a été retouchée, mes petites plaies sont sur les voies de la guérison, la vie à la petite maison bleue du Grand Nord est douce. Dehors le ciel est gris cendré, depuis ce matin le crachin et une bonne brise d’Est rendent le coin exactement comme je les aime, puissant, mystérieux et silencieux. Dans toutes mes expéditions polaires j’ai eu le bonheur de squatter des cabanes surgissant de nulle part. Sur les rives du fleuve Yukon, la cabane d’un certain Mr Brown (son nom était écrit sur son journal de bord posé sur la table) devait m’accueillir pour une douce nuit chauffée par un bon poêle à bois. Dehors les grizzlis voulaient jouer, mais j’étais trop fatigué, et un peu apeuré pour partager leurs joutes. En quittant les lieux je laissais un œil de St Lucie sur la table, la famille, qui sans le savoir m’avait accueilli, allait découvrir un jour ou l’autre qu’un solitaire au long cours avait trouvé refuge chez eux. En Finlande, il en est de même, au Canada, en Suède… Ces cabanes m’ont toujours reçues au bon moment et avec beaucoup de bonheur. Mon beau kayak, « Immaqa » bien calé sur la berge, je savourais la paix et le silence que m’offraient ces havres de sérénité. A chaque fois, je devais reprendre la route pour aller jusqu’au bout de mes rêves, de mes folies, de ma quête de liberté débordante et à chaque départ j’en avais le cœur déchiré. J’ai toujours rêvé de posséder ma bicoque dans le Grand Nord. Dans les parages de Whitehorse, capital de l’état du Yukon, mon pote Robert qui vivait dans cette forêt depuis plus de 20 ans avec sa famille, essayait de me convaincre d’y construire une cabane. Pendant 10 jours j’arpentais les sommets, je découvrais ses lacs, ses torrents poissonneux, même les ours me semblaient plus dociles ! Mais je devais rentrer en Corse. Puis ce fût là haut en Norvège, à quelques kilomètres de la frontière Russe face à l’océan Arctique. Ruan, un pote installé là haut,  me proposait une vieille cabane parfaite pour le poète-nomade que je suis. J’évaluais  le pour et le contre pour finalement renoncer. Mais l’envie d’un pied à terre polaire, n’y voyez pas un mauvais jeu de mot d’unijambiste, a été assouvie. Un jour de ma vie de baroude j’ai finalement trouvé « ma » cabane, ma tanière, mon refuge. Né à 300mts à vol d’oiseau de la Méditerranée, je vous aurais pris pour un hérétique si vous me disiez qu’un jour je serai assis dans ma maison au Groenland à écrire mon journal de bord tout en scrutant les Icebergs glissants vers leur fin lointaine. La vie réserve des situations incroyables, improbables. Mais pour cela, il suffit de les provoquer, de les désirer plus que tout au monde. En voyageant dans ces régions isolées, chaque rencontre avec un autre étranger, est le début de récits incroyables. Pendant cette première semaine, j’ai rencontré les armateurs du voilier canadien Lifesong. Lui, Christophe, français d’origine naviguait dans les mers australes comme charter. Elle, Emmanuelle, québécoise, une baroudeuse défiant les océans en kayak et escaladait les montagnes les plus dangereuses au monde. En Antarctique la vie les a unis et depuis ils naviguent autour du globe. L’hiver dernier ils ont vendu leur bateau pour en racheter un plus grand. L’ouragan Irma avait mis au tapis pas mal de voiliers aux Antilles. Un plan Garcia de 22mts avait été ravagé par la tempête. Mais la vie, quand on s’en donne les moyens, vous aide. En 8 mois de travaux forcés, ils réussissaient à prendre la mer pour un tour du monde. A bord, un moussaillon avait vu le jour. Comme quoi tout est possible. Puis toujours dans cette première semaine, ce fut la rencontre d’Hervé. Il est guide de kayak et de temps à autre l’été, il fait relâche à Oqaatsut. Ayant passé sa jeunesse en Union Soviétique, son père était ingénieur pour une société française implantée en URSS, il causait couramment le russe. De retour chez lui dans le var un matin de juin pour ses 35 ans il se lançait pour un tour du monde. Partie en kayak vers l’est il traversait le monde comme il pouvait. Dans la Caucase,  il optait pour une charrette tirée par un cheval mais au premier frimât de l’hiver le canasson se faisait la malle ! A Vladivostok face à l’océan pacifique, un cargo l’amenait au Japon puis au nord des USA qu’il traversait en vélo. A Terre Neuve, il embarquait sur un voilier français. Le voila en route pour Ilulissat avec son vélo qu’il n’a pas abandonné ! Puis en avion un transfert vers Copenhague et un retour à Hyères chez lui…

Comme il est bon de trouver d’autres rêveurs, d’autres poètes des temps modernes. Au bout du monde, les nomades se rencontrent enfin, ils échangent, connaissent les mêmes personnes, vivent les mêmes galères, les mêmes joies. Dans les fourmilières des villes, le confort a anesthésié beaucoup de monde, les mêmes craintes bloquent ceux qui auraient encore le courage de tout plaquer pour vivre leur rêve. Alors vous qui êtes derrière votre écran, pensez que ce n’est pas impossible. Sachez que la Liberté est le plus beau cadeau que la vie nous offre et ça, tout les jours. La chance n’existe pas, elle se provoque, osez et vous aussi un jour on se rencontrera au bout du monde.

Voyager ce n’est pas changer de pays, voyager c’est changer de monde…

Gogogo !

Paix et zenitude…

16 juillet 2019

Décalage horaire de 4 heures, changement de température et surtout vie du village au ralenti. Pour un gars hyper actif comme moi, il me faut m’adapter. Ici c’est la haute saison touristique, il peut y avoir un passage éclair de 20 touristes, qui en 2 heures de temps dégainent leur reflexe et smartphone pour cocher la case Groenland. Mais je vous rassure ce n’est pas tous les jours et d’un certain côté cela m’amuse beaucoup de les voir s’embourber dans les marécages où poussent les magnifiques fleurs de linaigrette. Elles ressemblent à des bouts de cotons perchés sur une tige verte et haute. Dans certaine partie du monde boréal, cette fleur aurait des pouvoirs chamaniques …

Dès mon arrivée à Ilulissat, j’ai croisé des copains pêcheurs et cela m’a fait chaud au cœur de les voir descendre de leur embarcation pour me saluer. Le Groenlandais n’est pas un grand expressif et cela démontre leur affection à me voir chez eux. Au village quel calme, 23 habitants et du silence à n’en plus finir. Les dénotations se succèdent, mais n’y voyez aucun acte terroriste, ce sont les icebergs qui sous l’effet du soleil, explosent en mille morceaux. J’ai retrouvé la cabane avec une joie immense, seule une fenêtre a souffert des coups de vent hivernaux. Mais j’ai de la réserve de carreaux et en deux coups de cuillère à pot je les ai changé. Je me suis installé, cela fera le troisième été que je la restaure et tout doucement elle prend de la gueule. Mon bon copain Steen, passe me voir. Il est chaleureux, souriant et avec lui je me sens vraiment bien. Il insiste pour un « kaffimiq », alors avec joie je me rends chez lui et sa femme Sara-Mina. Le café est servi brûlant, il est 18h je sens déjà une nuit blanche. Pas grave ! Nous papotons de nos hivers respectifs, quand je pense aux allers-retours que j’ai parcouru cet hiver avec mes conférences, eux sont restés gentiment chez eux à écouter le temps qui passe. Je leur annonce la venue toute proche de ma fiancée, ni une ni deux nous sommes invités pour un diner. A base de viande de phoque, bien entendu !!!

Mais si je suis là, c’est aussi pour continuer la restauration de ma maison, ponçage, masticage, peinture, la tache est ingrate mais nécessaire, je me réjouis d’être ce bricoleur polaire. Cette année je suis un peu mieux organisé, du coup je me sens encore plus à l’aise. Ici pas d’eau courante, ni d’électricité. Au centre du village il y a un distributeur d’eau de mer qui est désalinisée, alors avec ma brouette et mes jerricans , je fais ma balade quotidienne. A la maison communale où je prends mes douches, il y a des prises de courant, c’est là où je recharge mes « gadgets ». La douche est ouverte qu’en semaine de 9h à 16h, il ne faut pas arriver en retard, surtout après être saupoudré de plâtre poncé…

La paix de ce village est rafraichissante, c’est un havre de paix où il fait bon vivre. Bientôt mes jeunes stagiaires vont arriver, j’espère qu’ils apprécieront ce moment de partage…

Je vous envoie plein de fraicheur et de zénitude polaire.

A pluche…

Angalatooq : (le voyageur)

10 juillet 2019

Angalatooq : (le voyageur)

Tel l’oiseau migrateur je suis déjà loin de la Méditerranée, loin du bruit, loin de la chaleur, loin du surpeuplement. Là-haut au pays de Nanoq, tout est différent, tout est plus grand, plus silencieux, plus respectueux mais plus compliqué aussi !

En 2005-2006 avec mon Grand Dume, nous traversions un océan en ramant. 54 jours à écouter le bruit de la houle, à gérer les eaux salées qui nous burinaient le visage, à savoir des larmes ou des lames, qui nous auraient marqué le plus ! A bord de notre yole de mer un seul livre, celui de Gilles Elkaïm « Arktika ». Ce livre me passionnait, les mots de cet incroyable explorateur polaire, développaient ma curiosité. Je n’aurais jamais pu imaginer que moins de 90 jours après avoir parcouru 5500km à la force des poignets, j’aurais rejoint un groupe d’ancien militaires Russes pour atteindre à pied et en totale autonomie la latitude 90°Nord à pied, le mythique Pôle Nord. De ce jour rien ne fut plus pareil, Gilles Elkaïm devenait un copain et d’autres fous rêveurs me faisaient confiance pour des odyssées de dingue. Déjà 13 ans.                                                                                                                                      La traversée du Groenland d’Ouest en Est fut pour moi, une des expériences les plus compliquées de ma vie civile. Les 34 jours de marche forcée en tirant un traineau de 120kilos, m’ont demandé une énergie hors du commun. Mais le Kalaallit Nunaat m’a happé, m’a charmé et depuis 3 ans j’y possède une belle maison bleue. Oqaatsut (Cormoran) est un village de 23 habitants silencieux et souriants. Pas de voiture, pas de burn-out, les seuls bouchons sont ces gros « glaçons » qui partent pour un long voyage de 6 ans en mourant au large de Terre-Neuve. Les chiens sont les plus nombreux que les habitants. De temps à autre, une meute hurle en retrouvant très vite le silence pour laisser place à une détonation qui vous fera sursauter. N’y cherchez pas quelques raisons guerrières ou clandestines, ce n’est qu’un gros iceberg qui s’est désintégré. Je vais avoir quelques jours pour bricoler dans ma maison ; elle est âgée de 70 ans et en mode « restauration » mais une bonne partie des travaux est bien avancée. Puis ce sera la visite de ma « belle Vahiné » qui viendra découvrir ce monde si particulier, puis ce sera au tour du Grand capitaine du Drakkar à nous rejoindre. Le Grand Nord et nos blessures nous ont unis, rapprochés, en abattant le mur de nos différences. En grand seigneur, à titre personnel il a loué le voilier Polaire La Louise qui permettra à 6 « guerriers » Bout de vie de poser leurs sacs à bord pour une exploration hors norme.

Pour ceux qui me suivent depuis longtemps, je tiens absolument à vous rassurer. Jo Zef la mascotte est à mes côtés, comment pourrait-il en être autrement…

Proverbe Groenlandais : seuls la glace et le temps sont maîtres

La preuve ce soir au lieu d’être à Ilulissat, nous sommes bloqués à Kangerlussuaq. Malgré trois tentatives, le brouillard n’a pas permis au Dash8 de se poser…

Inuulluarit

PS : photos sur ma page Facebook Frank Bruno officiel

Été à Oqaatsut 2019…

7 juillet 2019

 

Bonjour à tous,

Ce petit mot va vous rafraichir puisqu’il est posté directement du Groenland où j’ai posé mes sacs.  Début août, 6 adhérents de l’association Bout de vie vont embarquer à mes côtés, à bord du voilier polaire la Louise. Une croisière australe en baie de Disko, va leur dévoiler des moments qui resteront gravés à tout jamais dans leurs âmes. Les mouillages seront sauvages et silencieux, les activités seront simples : Ouvrir ses yeux et tout prendre. Balades à terre et sous-marine, agrémenteront les escales. Un journal de bord vous dévoilera tous les petits moments magiques de cette exploration digne d’une aventure à la Shackleton.  En attendant depuis ma petite maison d’Oqaatsut je vous offre un peu de fraicheur et de liberté.

 En m’inspirant de la phrase de Rasmussen :

Donnez-moi un océan polaire et du silence, je vous donnerai tout le reste

Un crowndfunding est en ligne, vous pouvez vous aussi apporter votre flocon de neige à la création de cet iceberg de Liberté. Cliquez ici

 

Offrez vous une part de rêve et de fraîcheur polaire sur ce site en ligne. (Films, tasses, t-shirts, sacs de plage…) Cliquez-ici

 

La différence…

22 février 2019

 

Différence…
Un sujet qui me tient à cœur, une croisade dans laquelle je me suis offert corps et âme et bien plus encore… La différence est un chemin long et sinueux, telle une route de montagnes corses. Nous sommes tous différents, et tous semblables aussi ! Pourtant la différence prend toujours le dessus. Dans notre quotidien la différence nous accompagne en boucle, on l’entend à longueur de journée. Elle nous flagelle, elle nous harcèle, elle peut même devenir notre maître d’école. Un homme, une femme… Et commence l’odyssée de la différence. Le blanc, le noir et elle reprend de plus belle. Le Ying, le Yang qui choisir ? Une jeune, un vieux, houlala quel scandale…La différence est le pilier de nos maux, la quintessence des guerres, des ruptures, des incompréhensions. Depuis longtemps je hurle qu’elle peut-être une force, mais au fil des années par moments on tente de m’en dissuader. Il me semble perdre de l’énergie. Vous qui me lisez, vous êtes différents du pauvre gribouilleur qui ose raisonner ici sur ce blog, pourtant si mes réflexions vous attirent, c’est que quelque chose nous rassemble, nous unit. Le seul lien : notre ressemblance ! C’est vrai que réfléchir fait peur, le temps nous est compté, les informations nous happent. Les flux de réfugiés aux aspects si différents nous effraient, les homosexuels de plus en plus fréquents sur la scène de nos quotidiens deviennent dérangeants, quant aux handicapés qui réclament de vivre comme tous le monde, cela est une utopie déstabilisante. Utopie, tiens donc, que vient-elle faire dans ce texte ?  Elle n’aime pas les règles rigoureuses où rien n’est laissé au hasard. Comment éduquer les citoyens pour les rendre meilleurs si les lois inébranlables ne laissent aucune place à la folie du rêve ? Un pauvre fou avait hurlé : I have a dream. On l’a vite assassiné de peur que sa différence gagne une bataille. Trop de différences fatiguent, trop de différences usent, mais qui définit les règles, qui a créé ce serpent à deux têtes ? Nous et personne d’autre ! Nous sommes responsables de ce gouffre qui peut-être infranchissable, nos barrières doivent tomber pour faire des ponts. Ca aussi je le rabâche, mais moi-même suis-je sûr de ne pas avoir peur de la différence?  Je m’effraie tadalafilparis.com quand l’intolérance m’emporte, quand je ne supporte plus les « autres » ne vivant pas à mon rythme. Imaginez un monde avec des gens qui vivent sans télé, passant une partie de leur vie dehors à contempler les étoiles. Ouah cela serait désastreux ! La vie est Alchimie, la vie est trop précieuse pour ne pas s’ouvrir, pour ne pas aimer sans retenue. Alors comment faire, où est l’issue de cette question, où est sa réponse ? L’homme a toujours rêvé de transformer le plomb en or, la pierre philosophale, s’appelle l’amour. Et si nous devenions tous alchimistes, chiche !!!

PS: On peut aussi se retrouver tous les jours sur ma page FaceBook et sur Instagram

L’eveil

18 janvier 2019

Un thème m’a été proposé pour une future conférence, voici la synthèse que je développerai.

L’éveil:

Rien de mieux qu’une cabane, des journées courtes et un hiver qui semble enfin s’éveiller. Envie d’écrire, de me confier, de reprendre mes carnets de notes, de mettre en couleur mes rêves au travers de poésies boiteuses, de rimes brinquebalantes.

 Eveil de la nature qui balbutie au gré des frimas et des pluies hivernales. Eveil de l’enfant qui découvre le sein de sa mère bien avant l’éveil de la prière des saints une fois en mer. Eveil de l’homo erectus promu sapiens, sans se douter qu’il déforesterait ses fondations pour vivre sur des décombres. Eveil des sans-culottes élevant des barrières de sang impur abreuvant les sillons. Eveil de l’adolescent prenant son sac et qui d’un pas révolutionnaire referme sans regret pour une dernière fois sa geôle familiale sans jamais se retourner. L’éveil, cette petite voix, cette flamme qui brule en nous et qui d’un seul coup, en une fraction de seconde nous fait lâcher prise. Mais pourquoi ne plus être Ulysse préférant les nymphes du large aux bras de Penelope, de la douceur d’un foyer à l’appel de l’horizon incertain. Une poitrine ferme et inconnue, aurait-elle plus d’attrait que des bras réconfortants et bienveillants ? L’éveil, le phare de nos vies. L’éveil celui qui nous portera loin des écueils de la routine. Pourquoi refuser le confort d’une couche bien ordonnée pour un bivouac boueux parsemé de doute ? L’éveil courant boréal qui bouscule les questions fades et sans intérêt. L’éveil qui se moque de la sécurité, de l’emploi et d’un mari bienfaisant. L’éveil compagnon de route de Dame Liberté, elle sans lui, lui sans elle et se brisent les ailes du Grand Voyage. Eveil, tel l’oisillon découvrant la forêt sans connaitre la légende du loup et du chasseur. Eveil, naïveté de la blancheur de la vierge Marie avant qu’elle ne soit enfantée par un soi disant charpentier ou un miracle, désolé je ne les ai pas connus !  L’éveil qui manque terriblement à mes frères, à mes semblables, un bonnet rouge, un gilet jaune, un black Friday, un badge arc en ciel. Mais où est la couleur de l’éveil de la Liberté, je n’ai pas de réponse, à moins que je sois trop pudique, trop orgueilleux pour vous la confier. L’éveil est la seule route vers Nous, l’éveil se passe d’une application ou d’un « like », l’éveil ébranle celui qui lâche-prise, qui se coupe de la virtualité. Pas de chef ou de subalterne, l’éveil est un freelance sur un chemin poussiéreux. Retournez-vous de temps à autres, vos traces de pas vous sembleront légères et libertines. Certains traiteront l’éveil d’utopie non conservatrice. D’autres la fuiront pour leur bien être, alors que l’éveil nous offre un mieux-être ! L’éveil ne connait pas les heures sup, les CDI, les ITT, l’impôt sur la fortune, les week-ends avec pont. L’éveil est une tortionnaire qui te demande de bosser à temps plein 24h/24. Pas de congé payé, pas de camping des Flots bleus ou de neige câblée et artificielle…

L’éveil serait un sale gosse qui te prend la main pour t’amener devant un miroir en te disant : tu vois là, devant la glace ; eh bien ce n’est pas toi, alors bouge tes fesses et devient Toi…