La plage d’Erik le rouge…

30 juin 2012
Ca y'est, Jo Zef se prend pour Erik le rouge !!!!

Ca y'est, Jo Zef se prend pour Erik le rouge !!!!

Une nuit tranquille, ici la peur du prédateur n’existe plus depuis belle lurette, les derniers ours ont été tués juste après guerre. La flore est a peu de chose prêt, identique à celle du Yukon et de vieux reflexe me reste. Hache toujours à portée de main et une nourriture toujours bien
emballée. Le protocole est moins strict qu’au Canada mais je reste prudent tout de même. 6h20 je déclenche la balise spot de ma géo localisation et prend la mer. Pas une ride, pas un souffle d’air, je file tout doux vers le sud, je profite de cette opportunité pour forcer
la cadence le vent va venir du sud et ma journée est plus qu’incertaine, alors j’avance en ne pensant qu’à maintenant. 8h20 déjà quand c’est calme c’est plus facile, 4,5km/h de moyenne, une super cadence pour le «semi-remorque » que je pousse. 9h20 un feu loin devant moi à terre m’indique que le suroît vient d’arriver, ce sera à mon tour d’ici peu. Je sens de l’air sur mon visage, je scrute l’horizon et j’y détecte une barre plus foncée, j’ai compris ce n’est plus de la brise mais du vent qui arrive. 10h20 le vent s’installe et je deviens un esclave qui
pagaie. J’arrive en fin de péninsule de Pitea, après le cap, la mer ouverte sans protection sur 5 nautiques au moins. Il faut que je prenne une décision, stopper ou prendre le risque de me trouver seul en plein milieu de la tourmente. Tout en pagayant, je détaille la carte qui est
devant moi dans sa housse étanche, je devine une échancrure. Oui, là bas à tribord une tache blanche, une plage ! Je bifurque de quelques degrés et avale les deux kilomètres comme un sprinter. Une anse de sable blanc très abritée du sud, je fais une halte café et après je prendrai ma décision. Ici tout semble calme, pas une brise, les moustiques se lèchent les babines : A table ! Je mets ma moustiquaire de tête et inspecte les lieux, du bois et du calme. Je me délecte de mes deux canistrellis avec un café et cogite. Je vais voir à pied comment est la mer au large. Je reviens rassuré de ma décision, là-bas c’est blanc et pile poil dans ma direction. Je fouille les lieux pour trouver une belle plaque de contre-plaqué qui nous servira de table et à mon retour, je surprends Jo Zef orné de cette magnifique ramure. Seulement 18 kilomètres pour aujourd’hui mais la route est longue alors prudence, prudence.
La mascotte ne serait-elle pas le descendant d’Erik le rouge, par Thor !
A pluche !

Un temps pour moi avec emoi sans toi ni toit…

29 juin 2012
un bivouac apaisant et récupérateur...

un bivouac apaisant et récupérateur...

Un grand ciel bleu me réveille ce matin, la température semble douce, je sors de mon long sommeil réparateur. Le vent de Nord est virulent mais ma petite plage est un havre de paix protégée de ce blizzard tumultueux. Les suceurs de sang sont punis, ils n’osent pas quitter leur planque pour tenter une ponction corsée. Nu comme un vers je prends enfin du soleil, celui qui régénère, celui qui rentre au fond de mon âme. La forêt entre deux rafales m’offre un opéra privé, un concert plumeux ! Je m’affaire doucement, le premier boulot est de sortir tous les sacs étanches et d’assécher Immaqa. Hier des minis murs d’eau se sont abattus sur nous et il a besoin qu’on s’en occupe. Je retrie ma nourriture chargée à la hâte à Lulea, je recale tout minutieusement pour gagner une incroyable place, les affaires doivent être facilement et rapidement accessibles. Je dois mémoriser où tout est fourré. De temps à autre je m’assois, je tends l’oreille, le golfe de Botnie ronronne, il faut que j’apprenne sa langue, je ne connais que le méditerranéen et si je veux cohabiter en toute sérénité il faut savoir échanger. Les quatre sacs étanches sont bien répartis, pendant ce temps j’ai mis la marmite à chauffer de l’eau et j’ai une bassine pliante complète de douche tiède. Je me rase, le soleil me chauffe les épaules, je me remets encore une coupelle d’eau sur la nuque, je respire à plein poumons ces moments de grâce. Je ne regrette pas les 50km d’hier, une longue journée mais quelle récompense aujourd’hui. Je ne regrette pas l’énergie que j’ai mis dans ce projet, j’y suis de plein pied, pas à pas je réalise mon rêve. La fatigue des journées précédentes envolées, je commence à connaître les effets secondaires de tel efforts, le soir je deviens négatif, tout me manque…
Comme je connais cette réaction, je me presse pour aller dormir car le lendemain, les démons se sont envolés. A midi c’est un festin, grillade de saucisses, pennes en sauce et un demi-litre de yaourt à la myrtille, ce sera toujours ça de moins à porter. J’ai encore quelques fantaisies
pour deux jours puis j’attaquerais le régime lyophilisé. Jo Zef commence déjà à protester. Affaires lavées, corps récuré, sacs organisés, je suis enfin prêt. Dans ces moments de plénitude je repense aux périodes difficiles de ma vie, où j’ai failli d’un cheveu ne pas m’en sortir, où le gouffre semblait me barrer la route, en vérité c’était une sorte de panneau indicateur pour me faire changer de route et vivre intensément le moment présent. Stockholm est là bas au sud, vous encore plus bas, ma Véro encore plus loin, pourtant malgré l’absence physique de vous tous je sens vos âmes, vos vibrations, je sais que la vraie solitude c’est
quand plus personne ne pense à vous.  Comme dirait Jo Zef une vie sans vibration c’est comme une crêpe sans confiture !!!
A pluche !

Sletness-Mehamn en kayak…

12 juin 2012
Sombre comme la mer de Barents...

Sombre comme la mer de Barents...

La pluie a bercé ma nuit mais les sens  toujours en éveil je dormais en tentant d’écouter la houle du large. La distance à faire n’est pas énorme 40km en faisant du raz cailloux où alors 20 en traversant les fjords. Dormir, il faut dormir… 5h45 je me prépare, réactive le feu, le vent est devenu une petite brise. Les jeunes dorment encore, hier soir j’ai dû leur souffler dans les ouïes pour qu’ils fassent le silence. Difficile pour l’urbain de bivouaquer ! Ils voulaient assister au départ mais ils n’auront pas eu l’oreille assez fine pour m’entendre partir ! C’est vrai le « cabochard »  n’est pas des plus tendres mais entre vous et moi je n’ai pas la vocation d’être assistant de maternel !!! Je m’élance, c’est toujours un sacré moment, n’ai-je pas mis la barre trop haute ? Suis-je à la hauteur ! L’instant présent, il n’y a que ça qui compte. Je m’applique, je sors de la baie et la houle du large me berce, j’ai la boule au ventre… Soudain j’entends souffler dans mon dos : Jo Zef tu ronfles ? Encore des bruits ! Une troupe de phoques m’accompagne à distance. Les guillemots sont curieux et ne cessent de me raser, des canards que je ne connaissais pas sont plus prudents. Je prends la cadence, je rentre dans mon histoire, comme une chape de plomb qui s’envole, je laisse à terre toutes les futilités des hommes. Je pagaye et c’est tout. Une baleine sans doute, au large envoie son grand souffle, j’aime la grandeur de ces lieux où l’homme devient ce qu’il doit être, un simple atome ! Je prends le cap plein Ouest, le courant me met sur un tapis roulant, j’avance comme un avion ! La côte s’éloigne et au milieu du fjord je serre les fesses, un simple fétu de paille qui bouchonne sur immensément grand. Des marsouins viennent à ma rencontre, j’avance toujours. Le premier promontoire est passé, par prudence je le prends large je ne voudrais pas être embarqué par une lame de fond. Un deuxième fjord à traverser et je serai à l’abri. Je bifurque, je suis en eau calme, ouf je suis heureux d’avoir coupé. Tranquillement je pagaie, les maisons multicolores de Mehamn se devinent. Sur la falaise du comptoir de pêche un véhicule tout terrain me fait des appels de phare. Tina et Ruan m’attendaient. 3h45 après mon départ je pénètre le port de Mehamn, j’avais prévu 8 heures !!! Les jeunes arrivent, ils n’auront pas vu non plus l’arrivée… Je leur souris comme si rien ne s’était passé, d’ailleurs c’est déjà du passé… Demain le départ vélo sera donné pour la partie 2. Pour l’instant il faut tout ranger, et préparer le vélo…

A pluche.

Un bout de vie aux Ecrans de l’aventure…

6 novembre 2011

Les Ecrans de l’aventure sont le rendez vous incontournable des baroudeurs ! Retrouvailles de copains et copines qui reviennent du bout du monde, je dirais plutôt du bout de leurs rêves. On s’étreint, on a les yeux qui pétillent, c’est bon de se retrouver. Du Yémen à la Polynésie, du fleuve Léna au Danube, du Pacifique à l’océan Arctique, les Ecrans deviennent le camp de base pour  nous réunir pendant quelques instants. Nous sommes là pour voir, rencontrer, argumenter et cette année pour les 20 ans du festival le président est à la hauteur de l’événement en la personne de l’illustre Québécois Bernard Voyer. Homme de défi il a atteint les trois pôles, le Nord, le Sud et le sommet de l’Everest. Sa vie l’a amené à gravir les montagnes les plus hautes des 5 continents mais ce que je retiendrais de lui c’est la profondeur de ses échanges. Il est le président des membres du jury du film et après chaque séance nous débattons. Six personnes différentes pour un palmarès qui doit être au plus près de nos convictions.

Présentation de mes collègues jurys :

Hubert de Chevigny aviateur explorateur a atteint le pôle Nord magnétique en ULM en 1982, il fut l’ancien président de la Guilde européenne du raid.

Ariane Le Couteur Directrice générale de production, elle a produit plus de 50 documentaires aventure.

Grégory Le Moigne, réalisateur spécialisé dans l’aéronautique, il suit depuis quelques années la patrouille Breitling.

Céline Moulys réalisatrice de plusieurs films sur les peuples d’Himalaya.

Le prix Peter Bird va être remis et pour cela nous sommes conviés dans un grand restaurant Dijonnais par les assurances SPB qui dotent ce prix. Grandes tables et décor vieille France, nous nous installons. Anne Quéméré navigatrice qui revient d’une traversée du pacifique en kiteboat se retrouve à mon épaule gauche et bien sur nos histoires ont un gout salé. A notre table deux « Dragon Ladies » ! Un groupe de femmes atteintes du cancer du sein, ont participé à un rassemblement de bateaux à rames  dans les canaux de Venise. Le film est en compétition et la salle fût conquise. Comme à chaque fois la question est : « Quel est votre prochain défi ? » Leur désir est de traverser la Manche avec une pirogue de 6 rameuses. Ne chercher pas dans ces femmes des sportives de haut niveau, pour certaines avant leur cancer elles n’avaient jamais fait le moindre sport. La maladie les a unis et la nouvelle vie leur a donné envie de découvrir leurs limites. Anne les parraine et tout au long du diner, le projet de traverser la Manche se dévoile. La navigatrice se confie, elle aimerait bien les accompagner avec son kiteboat mais il  demande une grosse restauration après plusieurs mois de Pacifique où il a beaucoup souffert. On parle de sponsor, de la crise… Catherine Lanson qui représente SPB assurance demande le silence, elle va dévoiler qui sera élu aventurier de l’année, l’enveloppe est doucement ouverte : « le prix Peter Bird SPB cette année est remise à la navigatrice Anne Quéméré… » Ma voisine est bluffée, l’émotion lui fauche la route, elle est abasourdie. La salle l’ovationne et de l’eau salée apparait dans ses jolis yeux bleus d’océan. Un chèque lui est remis et elle pourra accompagner les Dragon Ladies au printemps ! Un moment merveilleux de partage comme quoi les aléas de la vie sont là pour nous rendre plus fort et plus humains.

Les prix sont décernés et chacun à notre tour nous devons honorer nos élus. Notre président du jury Bernard Voyer sait mettre une grande émotion au millier de spectateurs présent, humour et philosophie ont donné le ton de la remise des trophées. La tache qui me revient est de décerner le trophée Alain Bombard. J’avais préparé un petit laïus et avec un plaisir immense je demandais à Eric Béllion skipper du voilier Jolokia de venir nous rejoindre. Un film dévoilant l’histoire d’une bande de « bras cassés » qui ont battu le record  de transat entre Lorient et l’île Maurice. Un équipage mixte valides et moins valides qui n’avait qu’un seul objectif, donner leur meilleur…

La nuit fût entrecoupée d’échanges, de confidences, de rencontres…

Un grand merci à la Guilde Européenne du raid qui m’a permis d’avoir la lourde tache d’être l’un des membre du jury. Un grand merci à tous les sourires croisés, public et intervenants et un gigantesque merci à Cléo qui est une organisatrice des Ecrans de l’aventure au cœur immense…

L’aventure à cloche pied: Le film

16 octobre 2011

L’aventure à cloche pied.

Rien d’impossible au Cabochard, nom de son bateau !
Malgré son « unijambité » Frank est plongeur-sauveteur en mer, sportif de l’exploit et aventurier dans l’âme rien dans sa vie n’est banal. Fondateur de l’association « Bout de vie », il partage ses élans de générosité avec ceux qui, comme lui-même un jour, crurent être brisés par la cruauté du destin : accidentés de la vie, certes, mais jamais abattus. Ce film est un témoignage simple mais fort que les malheurs sont les plus grand défis à relever. En quelques minutes on va le suivre sur une traversée de l’Atlantique à la rame retentissante, dernier degré du pôle Nord cialis ufficiale, la traversée d’Ouest en Est du Groenland, puis à l’ascension du plus haut volcan du monde (Argentine) et une odyssée en solitaire sur le fleuve Yukon, des milliers de kilomètres en kayak de Whitehorse à Grayling… un prétexte à se retrouver, à se regarder en face et à renouer avec l’harmonie fondamentale qui lie l’homme à la Nature. Un film sensible, grand public, réalisé pour ceux qui doivent chaque jour conjurer le mauvais sort… les blessés de la vie certes mais aussi, certainement, le commun des mortels…


Frank BRUNO: L'aventure à cloche pied par cabochard20

Un homme, un kayak et du rêve…

5 octobre 2011

C’est qu’il est fier mon kayak… A l’étroit dans ses sacs de rangement pendant ces mois d’éloignement, je l’ai minutieusement remonté. J’ai l’impression qu’il s’étire de trop d’oisiveté. Pas une ride, le soleil n’est pas encore levé, à cette heure si, il doit encore réchauffer l’orient. Je sais que mes épaules vont ne pas trop apprécier la cadence mais il est temps de reprendre une longue et minutieuse préparation. Dans  8 mois je vais partir pour une belle et longue aventure, mais chut c’est un secret…

Immaqa (prononcé imara, peut-être en langue inuit), c’est son nom, a encore les stigmates de notre descente du fleuve Yukon. Une confiance mutuelle nous unit, nous ne sommes qu’un. Le golfe est silencieux et pas un bateau ne brise cette paix. Au loin les dauphins semblent nous ignorer, ils doivent bouder notre si longue absence. Nous avançons mais l’esprit est en vagabondage, le dernier stage m’envoie encore ses images, je reconnais les voix, j’entends encore les confidences. Mais il faut ne penser qu’au présent, alors j’avance. L’archipel des Bruzzi reçoit en premier son  rayon de soleil et nous fonçons, comme l’insecte insouciant, vers la lumière. Il y a de grande chance que les îlots interdits aux hommes par le parc marin, ne soient pas vides de « copains ». Le patron est là, l’aigle pêcheur semble endormi mais c’est mal le connaître, il surveille la moindre écaille qui s’approcherait de la surface. Un peu plus loin une bande de canards essaient de se faire oublier, mais le pagayeur inquiète les gars du coin, coin !  Dans une faille je surprends des inconscients en train de rêvasser à un banc de sardines. Des barracudas qui doivent se faire dorer la pilule, avant de se faire dorer dans une poêle, aurait pu rajouter la mascotte ! Les cormorans au garde à vous, sont attentifs à ma cadence. Dans un ordre impeccable ils se jettent à l’eau pour fuir l’unijambiste rêveur, au corps marrant. Pagayer est une excuse pour partir dans ses pensées, pagaie et rêve serait la devise du moment. J’aurais plein de raison de penser à des idées noires et seulement quelques unes, belles et lumineuses. A votre avis qu’ai-je choisi ? Oui ! La lumière, celle qui cicatrise les plaies béantes, celle qui fait un peu oublier le passé. Le droit de se plaindre à été aboli  à bord de cet équipage, Jo Zef acquiesce. Le moment est simple mais pourtant il est intense. Rien derrière, ni devant, juste maintenant, un coup de pagaie après l’autre.  Arrêt sur ma plage « privée » et dégustation du moment. L’eau cristalline me dévoile ses secrets, un mâle girelle doit surveiller son harem de 40 femelles, s’il viendrait à disparaitre la plus ancienne femelle se transformerait en mâle pour endosser le rôle de chef de clan ! Vous avez dit exceptionnelle, moi je dirais fantastique. Et dire que certains comptent quand il ne faut que regarder, que d’autres règnent alors qu’il suffit de s’agenouiller pour voir le monde… La brise d’Ouest vient me frôler le visage, il est temps de rentrer…

kayak en mer de Barents…

26 juillet 2011

Être sur les bords de l’océan Arctique sans pouvoir y tremper la pagaie cela devenait une déchirure !

Mehamn ne compte que 800 habitants quasiment tous pêcheurs. Le touriste est celui qui s’est égaré ! En cherchant sur le port, je tombe sur Ruan, Sud-Africain tombé amoureux du coin en effectuant avec sa compagne suisse, Tina, cap Nordkin-sud Grèce à pied en 3 ans, soit 6000km. Ouf je me sens moins seul, enfin un gars un  peu fêlé comme moi. Il est employé dans l’usine à morue, un métier rude, mais qui lui permet de résider en péninsule de Nordkin. Depuis cette année ils ont ouvert un bed and breakfast et tentent de créer une activité nature. Rando, chiens de traineau en hiver, kite sur glace et location de 4 kayaks. Je suis son premier client ! Je trépigne de pouvoir m’aventurer dans une mer si sauvage et isolée, mais ce n’est pas « Immaqa » dans lequel je prends place mais un p’tit kayak un poil instable à mon gout ! Combinaison étanche neuve, gilet neuf, je prépare un sac étanche avec un minimum au cas où et vogue la galère. A midi je donne rendez-vous à Véro sur une plage qu’elle rejoindra à pied et dès le casse-croute englouti je pars cap au nord. Des marsouins me précédent sans se laisser approcher, les sternes arctiques dorment sur du bois flottant, la mer est un mélange de bleu nuit et de gris d’encre. Un poil tendu le « Cabochard » ! J’avance rapidement et commence à m’habituer à naviguer avec ce type d’embarcation. J’essaie de ne pas penser à l’endroit où je me trouve car sinon c’est la boule au ventre. La mer de Barents a une sale réputation, mais c’est plus fort que moi, je veux aller jusqu’au promontoire sombre vers l’Est ; de là je devrais voir le fameux phare de Seltnes, le plus nord de l’Europe, juste 10 petits kilomètres. Des oiseaux en pagaille et de la grosse solitude, celle qui fait déglutir avec difficulté, celle qui ne donne plus envie de se nourrir… Je persiste et évite de penser au cas où je dessalerai. Encore un petit mille et je pourrais enfin le voir, la mer est d’un calme anormal, je suis sur mes gardes. Le courant violent du cap que j’avais pressenti est bien présent. L’autoroute se transforme en piste en terre et je suis en kayak de promenade et pas de guerre comme mon « Nautiraid 540 ». Ca bouge dans tous les sens. Je tente la photo mais promis juste un coup c’est tout, avec beaucoup de concentration je vire de bord pour reprendre la route de Mehamn. Bien-sûr ici tout est éphémère et le grand bleu laisse la place à la tourmente. Je ne traîne plus, je ne cause plus aux oiseaux, j’appuie sur les pagaies de toutes mes forces et essaie d’anticiper d’où viendra le combat ! Là-bas au port les éclairs claquent et le vent fraîchit, pour l’instant je suis dans du calme, pourvu que ça dur. Je prends l’option de rejoindre la côte, cela allongera la route mais en cas d’embrouille je pourrais avoir un plan B ! Une faille se découvre et j’en prends la direction. Finalement dans cette espèce de brèche, je m’enfile… Pause relaxation, je mange un bout, effectue quelques étirements sans trop attendre, je sais que là-bas on doit s’inquiéter pour moi, l’orage claque à en perdre haleine. Je reprends la mer, ça y est, c’est pour moi, des grosses gouttes me nettoient le visage, les éclairs donnent de la voix et le pagayeur pagaie, quoi que de plus normal me diriez-vous ! Finalement je double le premier phare du port pour me retrouver face à face avec des rennes. Je leur explique ma journée mais je crois que cela ne les intéresse pas trop ! Plus de respect pour les aventuriers à cloche pied ! Véro me rejoint et voit dans mes yeux le déroulement de ma « kayakerie ».  Dans leur magnifique appartement, vu sur le port, nous écoutons nos nouveaux  copains nous narrer leur périple à pied. 8 paires de chaussures usées jusqu’au bout et une taille et demi de plus en pointure pour 6000 km de « marche et rêve ». Ruan me surprend en train de décortiquer la carte de la mer de Barents, lui aussi passe des heures devant la planisphère à imaginer des voyages insolites… je lui présente mon idée de projet, mélange d’aventure en solitaire et de partage avec des louveteaux de Bout de vie. Il m’épaulera avec les jeunes et j’en suis très heureux, c’est un gars fait d’acier en qui j’ai confiance, bizarre en quelques heures ? Non, quand on vit des expériences aussi fortes que les nôtres et que l’on se croise, quelque chose d’inexplicable se produit, comme si l’on se connaissait depuis toujours. Si vous voulez découvrir la péninsule de Nordkin c’est par Red Tree qu’il faut passer, Tina, Ruan et leur mascotte Harry vous accueilleront chaleureusement.

Juste entre vous et moi en toute intimité, je vous dévoile déjà le titre de ma future « folie »

Arcticorsica 2012…Chut c’est un secret…

Mehamn, port de pêche du bout du monde.

Mehamn, port de pêche du bout du monde.

A peine sorti du port la solitude envahi le kayakiste qui kayakait!

A peine sorti du port la solitude envahi le kayakiste qui kayakait!

Cap 17°, au bout du promontoire je devrais apercevoir au loin le phare le plus nord d'Europe, Slettnes.

Cap 17°, au bout du promontoire je devrais apercevoir au loin le phare le plus nord d'Europe, Slettnes.

Une faille, une bréche, je vais tenter un debarquement acrobatique!

Une faille, une brèche, je vais tenter un débarquement acrobatique!

Des rennes pour m'accueillir aprés une journée de mer placée sous le signe de l'émotion.

Des rennes pour m'accueillir après une journée de mer placée sous le signe de l'émotion.

Tina et Ruan devant leur maison, Jo Zef rencontre Harry leur mascotte!!!

Tina et Ruan devant leur maison, Jo Zef rencontre Harry leur mascotte!!!

Immaqa ricane !!!

10 janvier 2011

Immaq fidéle compagnon dans le gros temps ...

Immaqa fidéle compagnon dans le gros temps ...

Pour la semaine du nouvel an, j’avais comme une sensation de dernier voyage avec Immaqa (kayak d’expédition du Yukon), je naviguais en confidence avec un copain qui avait su m’accompagner dans une longue odyssée du Grand Nord.

Juste avant de partir on me livrait un kayak blanc en fibre de verre. J’étais très attelé à mon départ pour notre robinsonade de fin d’année, mais j’avais senti Immaqa un peu surpris de devoir partager le ponton avec un blanc bec.

Un nouveau beau projet en tête je me dois de former la nouvelle équipe. Immaqa est puissant et surtout très marin, je l’ai testé dans les bouches de Bonifacio par force 7 avec 2,5 mètres de creux et je me suis toujours senti en sécurité. Dans la descente du Yukon, vers la fin quand le fleuve était gigantesque les gros coups de vent ne lui ont jamais posé problème. Un seul petit reproche, il est lourd donc il faut beaucoup d’énergie pour le faire avancer.

Depuis longtemps j’avais entendu parler du kayak blanc dont je tairais le fabriquant et le voyais bien comme compagnon de route de ma prochaine aventure été 2012.  Une balade en mer polaire lointaine. Une embarcation plus légère donc plus rapide…

Ce matin une houle de 1 mètre ondule ma belle Méditerranée, le vent est quasi faible et le soleil donne un air estival à un hiver qui ne veut absolument pas venir dans l’île de beauté.

Je charge le « jeunot » blanc et prend la route, c’est vrai que ça file !

Mais la sensation que j’ai de mon embarcation ne me rassure pas, je suis très serré dans son hiloire et de plus il y a vraiment peu de place pour charger du matériel. La sortie du golfe me confirme que la houle est bien présente, je pagaie quasiment à 8km/h, je file comme un missile. 4 dauphins communs chassent autour de moi et le soleil envoie les gaz. Le vent passe au Nord-ouest et l’onde de fond prend du volume, je fais un arrêt café, reçois un coup de téléphone d’un p’tit basque qui me confirme que chez lui aussi l’océan ondule.

Je me mets en chemisette tellement il fait bon. Je louvoie de crique en passe et tente le diable ! Un amas d’îlots rend le passage toujours très agité en cas de flux de Nord-ouest, je vais y mouiller la pagaie.

Avec Immaqa nous avions affronté pire donc je veux me rendre compte. Je batifole vers la mer de Barents, je rêvasse de golfe de Botnie, je fredonne des airs de Trolls… Mais devant moi ça déferle !

J’y vais, c’est mon boulot non ? Première vague je prends de l’altitude, deuxième je tombe dans un gouffre, troisième, je chavire !

Le cockpit est très serré et ma prothèse est coincée au fond du palonnier. Je suis sous l’eau tête en bas et je sens les écueils très proches. J’essai de retrouver un semblant de calme et m’extirpe avec beaucoup de chance. Je ne suis pas dans l’eau mais dans une marmite en plein bouillon. Je suis surpris car j’ai une sensation d’eau tiède, je retourne mon esquif et tente de remonter à bord.

Dans ma baignoire je reprends mes esprits et double le cap pour aller me refugier sur une plage de sable… Je vous confirme qu’on est bel et bien en hiver !

Immaqa est dans mon hangar et je le sens fier d’avoir compris qu’il sera du prochain raid.

Le jeune blanc bec m’aidera aux entraînements, mais surement pas pour mon voyage en eau du grand Nord chargée de pièges…

Chaque jour est une leçon de vie. Aujourd’hui il m’en a fallu un cheveu pour y laisser ma peau, un endroit que je connais par cœur. Comme quoi !

« Si vous ne risquez rien, vous risquez encore plus. »

Erica Jong

Mouette kayak

L’équipement

27 mars 2010

kayak

Le Kayak :

Marque Nautiraid grand raid II 540. Cette embarcation est démontable, l’ossature est en bois et la peau en hypalon (néoprène). Il a été conçu à la base pour les troupes militaires d’assaut, en effet c’est sur ces kayaks que les « Seals » britanniques ont repris aux mains des Argentins la ville de Port Stanleys aux Falkland. Je peux le charger avec 150 kilos de matériel et vivre pour une autonomie suffisante sans aucun point relais jusqu’à la Mer de Béring.

Comme tout bateau il porte un nom : Immaqa prononcé  » imara » (Peut être en Inuit)

Matériel :

Camps : La tente est une The North Face EV 25. Depuis de nombreuses années, je l’utilise dans toutes mes expéditions, son double toit, sa résistance au fort vent et sa moustiquaire sont ses atouts majeurs. J’allumerai un feu le plus souvent possible pour essayer de tenir à distance les ours en quête de nourriture.

La nourriture : Elle sera surtout à base d’aliments lyophilisés. J’embarquerai environs 60 jours d’autonomie en espérant pouvoir au fil du fleuve pêcher et cueillir baies sauvages et autres plantes comestibles.
Faune : Ce fleuve a la particularité d’être très sauvage, grizzli, baribal, castor, orignal, loutre, spermophile, lynx, loup,coyote, sont les mammifères les plus fréquents sur ses berges. Saumons roses, brochets,truites et white-fish sont les poissons de la « Grande Rivière » Mais aussi les insectes pullulent à cette saison (moustiques, maringoins et mouches noires).

Sécurité : Je serai en possession de sprays au poivre anti-ours et  j’aurai aussi un chapeau dit d’apiculteur pour éviter trop de piqûres d’insectes. J’embarquerai une balise satellitaire Kannad XS-3-GPS de sécurité ainsi que 3 fusées de détresse. Un GPS ainsi que des cartes du fleuve au 250 000éme.

Communication : Quotidiennement j’enverrai un journal de bord ainsi qu’une photo par Internet via le satellite pour que les internautes puissent suivre pas à pas cette aventure humaine hors du commun. Grâce à un partenariat qui existe depuis 3 ans, je serai régulièrement en direct sur les ondes du groupe Radio France (France Inter, Radio Bleu, France Info et RFI). Mon téléphone iridium me permettra régulièrement d’être en connexion avec mon équipe en France ainsi que mes proches.