La semaine de l’emploi chez les « différents »…

7 novembre 2012
La reléve...

La relève...

Dés lundi commencera la semaine pour l’emploi des personnes  handicapées, un vaste sujet…

Fait du hasard c’est aussi le début de la promotion de mon nouveau livre. Je vais commencer par la Corse pour poursuivre sur le continent. Quelques rendez-vous : vendredi 16 novembre, l’émission de Via Stella FR3 Corse (aussi sur le câble) Inseme de 12h à 13h30, me sera consacrée, puis une signature du livre à la librairie la Marge d’Ajaccio de 17h30 à 19H30, samedi 17 novembre signature au centre commerciale Leclerc de Porto-Vecchio de 17h30 à 19h30. Sur France Bleu Frequenza Mora des ITW avec des jeux pour gagner le livre et quelques témoignages dans la presse écrite insulaire… Ouf ! Après ? Signature à Monaco, Bastia, Corte et Paris mais laissez moi respirer ce n’est pas la priorité de ce billet.

Donc lundi 12 novembre démarre la semaine pour l’emploi des personnes  handicapées. Je ne vous apprends rien en vous disant que la France est en retard de plusieurs années par rapport aux pays Scandinaves et Anglo saxons. C’est à nous les « différents » de nous imposer en douceur mais avec tact. Personne ne peut et ne doit se mettre à la place de l’autre mais chacun doit donner et recevoir. Ouverture sans vulnérabilité, proximité sans fusion et sensibilité sans affectivité. L’échange tout vient de là. Un employeur recherche d’abord un collaborateur, l’handicapé doit absolument fournir un résultat à part entière. On ne doit plus avoir un handicapé qu’on emploie mais plutôt un employé avec un handicap. Il m’aura fallu presque 10 ans pour devenir un aventurier « différent ». Ce ne sont pas mes coups de gueules ou mes droits qui m’ont permis d’en arriver là mais bel et bien mon travail de fond. Notre handicap n’est qu’une spécificité, pas plus qu’une taille, une couleur de cheveux, ou une religion. Vu que notre société fonctionne par case autant se trouver dans la bonne. Se faire embaucher par la case handicap aura peu de chance, la case performance sera la bonne. A nous de bosser et cessons de se plaindre. Les droits, quels droits. Les lois sont votées mais pas appliquées, nous le savons tous, alors à nous de nous adapter.  Nous devons être un cadeau, une chance pour l’autre et ce sera inversement proportionnel…  Rentrer dans le bureau d’un recruteur avec l’habit de « l’éclopé » n’aboutira jamais, proposer vos compétences c’est la seule chose que l’on doit retenir. Le français a ce malin plaisir de toujours tout contester, point noir  valable pour tout le monde : quand on donne une règle, il  dira « pourquoi ? », l’allemand lui dira « d’accord ! ». Et après on s’étonne qu’ils soient plus forts que nous ! Attention accepter ne veut pas dire être un mouton mais il y a des conventions dans chaque entreprise, les respecter c’est le premier pas de la réussite. Une des raisons pour lequel je boycotte la FFH, est la mise à part systématique. La mixité est une richesse, une équipe de valides et moins valides peut être détonante, l’un amènera l’autre au bout de ses peines. Hier j’ai testé une photo que j’ai « piquée » sur le net. Des gosses amputés sur la ligne de départ d’une course à pied. Les facebookeur ont repris par milliers cette photo avec pleins de chaleureux témoignages. J’y ai souvent lu : En voyant ça nous n’avons plus le droit de nous plaindre… Je le sais par mes expériences de coaching avec des sportifs valides, la mixité est une sacrée aubaine pour l’entreprise de la réussite. Râler ne sert à rien, dialoguer, bosser, démontrer à soi-même puis aux autres c’est l’une des solutions d’intégration. Nous y venons tout doucement. Dans le billet précédent je présentais le projet « Jolokia » un équipage mixte pour s’aligner sur les plus grandes régates de la planète. C’est un début. Une comparaison frappante, le milieu maritime. Il y a des siècles seuls les pêcheurs et quelques découvreurs  s’aventuraient sur les océans, puis vint le transport, une sorte de secte se créait : les marins. Il était absolument inconcevable que l’on puisse en faire un loisir, puis Joshua Soclum fut le premier plaisancier solitaire à effectuer un tour du monde, les autres (pécheurs, commerçants) ne voulaient même pas en entendre parler. Des régates s’organisaient aux quatre coins des pays du Commonwealth, les français voulaient aussi les leurs . Un truc de mec bien-sur, les femmes c’est juste bon à torcher les gosses ! Et puis de couettes ont battu les tatoués, encore un pas dans l’intégration. Les handis débarquent sur la pointe des prothèses, que les borgnes fesses et les tordus démontrent que notre différence peut-être une force… A votre tour adaptez vous, bossez, ce n’est pas un droit c’est un devoir…

A pluche !

Team Jolokia…

24 octobre 2012

photo_T-Shirt

A l’occasion d’une émission de Sandrine Mercier sur France Inter je partageais le micro avec Laurent Marzec. Nous avions une tribune de 60’ pour dévoiler nos bouts de vie, de mecs un peu esquintés. Nos livres en promotion nous tentions de convaincre les auditeurs que nos parcours étaient formidables, malgré un classement radical en personnes dites « handicapées ». Ce garçon tétraplégique relevait le défi de former une équipe pour être le premier voilier mixte à s’aligner sur des records établis par des valides …  Les Écrans de l’aventure 2010 ont commis l’erreur de me projeter membre du jury, la Guilde Européenne du Raid est le summum du microcosme de l’aventure, en faire partie me donnera le droit de m’exprimer. Nous visionnions des films variés mais tous fascinants, l’un d’eux me toucha ; Jolokia. Laurent avait réussi son pari, un équipage mixte battait le record entre Lorient et l’Ile Maurice. Eric Bellion en était le skipper mais surtout le boss. Jolokia est un piment fort de l’océan Indien et le nom de ce bateau du Défi Intégration, il venait de rentrer dans la cour des grands en battant le record de la route des piments. Mes compagnons de jury ciblaient d’autres films, mon intransigeance payait, je remettais le prix Alain Bombard à Eric et son équipage…

Val d’Isère, les festivals d’aventures m’ont dans le nez, je suis encore promu jury ! Nous ne sommes que quatre, nous visionnons, nous échangeons mais comme les mousquetaires seul un trio existe, la quatrième me fatigue, m’irrite, sa « blonditude » me met en mode avalanche ! Cette semaine est animée par le fantastique Sylvain Tesson, je suis comme un enfant devant le Père Noël, chaque fois que je le croise, je le prends comme une offrande ! Il me connaît et essaie d’arrondir les angles. Non un cabochard ne change pas. Les réflexions de miss Barbie m’ont remonté à bloc. Il est minuit nous sommes dans une salle d’un restaurant étoilé de la station, il faut débattre, attribuer les prix.  Sylvain nous écoute, il prend des notes, ses aphorismes en poche, il attend ma bombe à retardement. Jolokia n’aura pas de prix ! Je me lève sans finesse, quitte la salle, blondinette reçoit un tacle, le carton rouge ? M’en fous, je me casse ! L’organisatrice me rattrape, elle sait y faire, Sylvain un verre à la main, accepte mes proses sans verre, le film recevra un prix spécial… Eric Bellion est sur scène, mes tripes lui ont préparé un discours, le public est silencieux, le skipper a les yeux couleurs salés, standing ovation, vive la différence. Contre toute attente, je suis sollicité pour soutenir le projet : « Eric tu te fous de moi, Isabelle Autissier, Nonce Paolini, le chef d’état major de la Marine Nationale et bien d’autres sont de vrais parrains ? » Ok j’accepte en ronchonnant. Depuis Défi Intégration avance à grands pas même si certains tirent la patte. Au mois de juin 130 candidats ont postulé à cette annonce, je râle, j’aurais voulu l’écrire moi :

« Recherche hommes et femmes pour voyage hasardeux. Pas de salaire. Vie spartiate, tâches d’équipage rudes ou impitoyables, implication et courtoisie exigées. Recrutement sévère non-ouvert à tous et à toutes, priorité aux borgne-fesse sociaux ou physiques. Pas de cour des miracles mais trop normal s’abstenir. Honneur et reconnaissance garantis en cas de succès. Premières informations sur www.teamjolokia.com »

43 ont été retenus, ce week-end sur la base nautique de l’île Monsieur en région parisienne, il y aura un test grandeur nature. Seule une petite vingtaine de candidats décrocheront le sésame pour la troisième et dernière phase du recrutement, à savoir 4 jours de navigation sur le VOR 60 Team Jolokia à Lorient en novembre. Les conditions météorologiques automnales probablement musclées sont un test ultime et implacable pour éprouver l’envie et les capacités du futur équipage.

TEAM JOLOKIA est un projet sportif. C’est aussi un laboratoire dédié à l’humain. La diversité est une véritable valeur ajoutée pour une équipe performante. Les équipiers sont recrutés en fonction de leurs compétences mais aussi en tenant compte de leurs facultés originales qui enrichissent l’équipe. Le TEAM JOLOKIA est composé de marins jeunes et séniors, hommes et femmes, handicapés et valides, et de personnes de cultures différentes. La mer possède le pouvoir sans appel de renforcer ou désagréger la cohésion d’un groupe. Cette aventure humaine, sera une découverte, avec des professionnels, des psychologues et des chercheurs, de nouvelles clés pour une meilleure intégration de la différence. Pendant quatre ans, ils prendront le départ des courses les plus prestigieuses en France et dans le monde entier à bord d’un VOR 60 (Bateau de la Volvo Ocean Race 2001-2002). Fastnet, Sydney-Hobart, Transpac et Québec-Saint Malo sont notamment sur la liste.
TEAM JOLOKIA revisite le mythe de la tour de Babel. La diversité n’est plus vue comme une malédiction mais une opportunité pour l’Homme de se dépasser.

tj

Nous sommes tous différents…

30 août 2012
Le gout de l'effort retrouvé par Cathy... Bravo

Le gout de l'effort retrouvé par Cathy... Bravo

Vous en prenez l’habitude quand je fais un break je deviens « philosophe », à cloche pied cela va de soi. Bien que coupé, « jeu de mot d’amputé », des télés, infos, net je sais que les paralympiques ont commencé. Je suis un peu la bête noire des instances de la Fédération Française Handisport, malgré que je fasse parti moi aussi de la famille des différents. Mon refus d’adhérer est simple je trouve absolument scandaleux que les JO et les paralympiques soient séparés de plusieurs semaines. Il est inadmissible que les athlètes soient divisés de la sorte. Les JO font parti des événements sportifs les plus suivi au monde. En terme de retombé pour le handicap cela serait un pas de géant en avant. Ok, ceci n’est que la part public mais je crois que le plus important serait la richesse de la mixité des athlètes. Ne pensez vous pas que jusqu’à la fin de leurs jours ceux qui ont concouru avec Oscar Pistorius ne pourront l’oublier. Quand leur carrière sera finie et qu’ils auront dans les moments de leur vie des doutes, une pensée les ramènera au jour où un homme avec deux jambes en moins les avait défiés. Bien-sur la mixité pure n’est pas possible un gars en fauteuil va plus vite qu’un bipède mais mélanger les épreuves serait un bienfait pour tout le monde. Le jour des finales du 100mts je verrais bien les non-voyants puis les valides suivi des amputés ou autres. Sportifs, public découvriraient que ces gens sont plus qu’ordinaires, ils ont la passion du sport et s’en donnent les moyens pour arriver au haut niveau. J’aime cette définition qui résume notre existence : une batterie qui donne de l’énergie n’est que l’union d’un plus et d’un moins. Pour ceux qui me suivent en 2009 j’ai coaché les hockeyeurs du GSHC, encore à l’heure actuelle des joueurs m’appellent et notre relation les a boostés dans leur métier de sportif de haut niveau. Mais la croisade est compliquée ; un exemple parmi tant d’autres : Je connais beaucoup de monde dans le milieu du football, Lizarazu n’est pas le parrain de l’association par hasard, en discutant à bâton rompu avec les instances de la FFF, je sais qu’elles aimeraient faire intervenir des gars comme moi pendant les mises au vert des footballeurs, mais la peur du quand dira-t-on les empêche ce type d’expérience. Quel dommage ! Un gamin qui se retrouve milliardaire en faisant un sport ne peut être que chambouler par ce type de nouvelle vie et la remise en question par une personne « différente » serait bienfaitrice, pour son présent et futur. Donc les paralympique vont débuter, des titres, des déceptions, espoirs, désespoirs, une vie de sportif à part entière.

En créant bout de vie en marge de la FFH, il y a presque dix ans je ne pensais pas trop à la réussite de ces stages, mais pourtant à l’issue de chaque semaine effectuée, quelques individus en sortent changés, sur ce blog je vois régulièrement passer les commentaires. Hier j’ai pu enfin avoir accès à mes mails et découvert une super photo de Cathy qui après 22 ans de doute a pris le taureau par les cornes, amputée tibiale double elle est remontée sur un vélo pour repartir de plus belle. L’esprit de groupe peut efficacement remonter le morale des troupes. Je ne peux oublier ma détresse il y a trente ans quand je me suis retrouvé sur la touche pour un bout perdu, la première personne qui m’a remué les fesses était René mon prothésiste qui après plusieurs semaines à ses côtés m’a démontré que c’était possible puisque lui aussi était « différent ».

Oui, nous sommes tous différents…

Le croissant du Dimanche…

27 août 2012
Les gouttes de pluie tapotent au carreau, elles n’ont pas l’habitude de me voir en « vitrine ». Au fond le fleuve Elbe.

Les gouttes de pluie tapotent au carreau, elles n’ont pas l’habitude de me voir en « vitrine ». Au fond le fleuve Elbe.

La roue arrière réparée je peux enfin reprendre mon chemin mais ce brave mécano a dû bricoler mon dérailleur qui « déraille » plein pot ! Les molettes de guidon règlent les problèmes en partie mais je vais devoir passer chez un technicien pour qu’il fasse un  sérieux contrôle. Je ne vous parlerai pas de la nuit cauchemar que le camping a vécu. Des
voyous en devenir sont venus en bande y mettre la zizanie, décidément j’attire les rigolos. Des piles de bières entassées, ils décident que le terrain est en leur possession, nous sommes 4 tentes pas plus et je sens la moutarde me monter au nez. 22h je leur rends visite avec ma frontale, je me jure, me promets que je ne m’emporterai pas. Pas mal imbibés de bière, ils tentent la provocation, l’un d’eux essaie de me jeter une canette au visage, j’esquive. Désolé c’est de l’autodéfense, il s’en prend une ! Le calme revient, je me sens merdeux, sale, je ne dois pas agir comme ça, mais je l’ai fait quand même. Je leur ai promis une raclée s’ils osaient continuer. 23h cela devient insupportable, ils deviennent dingues, jettent tout par terre et font un raffut intolérable. J’interviens, ils me reçoivent en me jetant chaises et table. Un détail qui a son importance, quand je suis dans ce contexte, je deviens un bout de caoutchouc difficile à attraper. Un quart d’heure qu’ils n’oublieront jamais. Mais quelle désolation ! J’ai du mal à me rendormir, les questions affluent, aurai-je du laisser faire ? Est-ce que plus de dialogue de ma part aurait fait changer les choses ? Je ne sais pas, je ne suis pas un saint non plus, mais je refuse de plus en plus de perdre contrôle et mon énergie pour des gens en pleine déchéance. Mea culpa, j’ai encore donné des « gnons » ! 6h30 j’en croise sur la route, ils titubent. La ville de Travemunde et Lubeck se touchent et les quais de commerces brouillent ma carte. Je me retrouve dans une voie d’autoroute. Ca y est, ça commence. Je tourne en rond comme une mouche. Un bus comprend, le chauffeur me demande si je veux de l’aide ! Oh oui mon bon monsieur. Ici les transports en commun ont une remorque pour embarquer vélos et mobylettes, je charge mon barda et il m’amènera hors de Travemunde. Pour prendre la route sud, son explication est trop compliquée pour ma pauvre compréhension basique d’allemand et je me repaume une deuxième fois. Un homme en vélo est à ma portée, il comprend et sent mon désarroi, il me demande de le suivre. Nous empruntons un chemin de forêt pour retrouver la bonne direction. Au moment de partir je lui serre chaleureusement la main, il me demande d’attendre. Il sort d’un sac en papier un croissant et me le donne. Das ist ein franzüzich (à voir sa vraie écriture) « croissant ». Il s’éloigne, la grosse brute que je me sens ce matin a les yeux qui s’embuent. Je me remets en question, suis-je un mec bien ? Hier soir j’ai mis une correction à des merdeux en manque d’adrénaline, ce matin coup sur coup, sans jeux mots ringards, on m’aide spontanément. Mon périple ne me laisse pas trop le temps de réfléchir. Ca y est je roule plein sud, on m’avait promis de belles routes avec plein de voies cyclables et bien c’est vrai. Mais voilà, devant moi sans aucune indication au préalable, une déviation, la départementale n’existe plus ! Je suis méthodiquement le panneau qui m’amène doucement mais surement sur l’autoroute, encore !!! Mais je le réalise que quand je suis dessus, je n’ai plus le choix, la carte m’indique que j’ai 5km pour reprendre une sortie et contourner les travaux. Je me fais klaxonner comme jamais je ne l’ai été, je pédale sur la voie d’urgence comme un dératé pour sortir de ce cauchemar. Finalement je suis sain et sauf, je peux reprendre ma « pédalerie » en toute tranquillité sur de belles pistes cyclables. Je suis secoué par ces dernières heures, cela en est de trop pour le pauvre nomade errant. La route est plate, j’arrive à tenir une super moyenne de 19km/h avec mon « semi-remorque à deux roues ». Le vent devient violent de Sud-ouest, mais les pistes cyclables sont bordées de haies qui m’abritent et me permettent d’avancer sans trop en pâtir. Le ciel se charge de plus en plus, la pluie nous rejoint mais elle est encore timide. Sa sœur suédoise lui avait parlé de cet équipage atypique et elle voulait nous effleurer de ses propres gouttes ! Là-bas c’est un déluge, pour nous ça va. Au 93éme kilomètres une auberge « vélo » nous fait un petit clin d’oeil. J’en avais entendu parler et cela me tente. Juste à temps pour mettre mon deux roues au garage que l’orage se déchaine. D’une chambrette qui domine le fleuve Elbe, je peux enfin cogiter aux derniers événements que j’ai vécus. La pluie tape au carreau, ok on se verra une prochaine fois, laisse moi en paix, j’essaie de comprendre des trucs tordus d’humains. La violence et les mauvais gestes ne font pas grandir ; je vais devoir m’appliquer encore plus pour choisir mes arrêts et éviter ces situations intolérables de ma part. Puisque devant moi coule l’Elbe, je ne peux m’empêcher de saluer Thierry Corbalan et son équipe qui va tenter le 1 sept la traversée entre l’île d’Elbe et la Corse en mono palme. Technique de nage où l’utilisation des mains est interdite. Ouais Jo Zef on surveillera s’il ne s’en sert pas !!! Allez à son arrivée, vous n’aurez plus envie de prendre la voiture pour faire 500mts ou de vous plaindre pour un p’tit bobo. Allez Thierry, tu ne le fais pas pour une cause, nous sommes la cause !!!
A pluche !

J’aime pas les autoroutes !!!

23 août 2012
Le sud c'est par là...

Le sud c'est par là...

Le vent qui avait faibli hier soir est revenu en forme tôt ce matin. Comme je m’en doutais il est violent et dans le nez. Vu sa taille, du nez pas du vent il a de quoi avoir de la prise ! Je reprends mon chemin, une horreur, des camions les uns derrières les autres qui se dirigent vers Malmö pour emprunter le pont-autoroute qui enjambe la mer Baltique. Le cycliste unijambiste, râle, peste, rumine sa colère d’être au milieu de ces Mad max des routes, il est temps que je change de coin ! Un autre détail, le dénivelé revient, un truc de « ouf » ça ne fait que monter, plus le vent, il me semble  reculer ! Un autre paramètre important, c’est que j’ai faim et mes rations sont dans le rouge. Va falloir trouver une épicerie ouverte, sinon je bouffe du koala !!! Mais non la mascotte, c’est une de mes expressions un peu rocambolesque ! Un immense hypermarché sur tribord, on jette l’ancre et je pars en reconnaissance. Je ne prends pas de panier exprès pour ne pas trop me charger, mais j’ai
la dalle !!! Je squatte le premier banc extérieur du magasin, enlève ma prothèse et me fait un casse croute pantagruélique ! Les passants font semblant de ne pas me voir, je dois être transparent mais ce qui est sur ce que je me rassasie. Repus, je reprends la route mais le vent lui ne fait  pas de pause pendant 4h je me traine, je ne desserre pas les dents je veux et je dois avancer. Il me reste 10 km de voie rapide puis je reprendrai les chemins de traverse. Mais, les suédois si sympa, si accueillant, si éduqués négligent leurs infos route. La nationale que je dois emprunter est devenue autoroute, aucune indication, je suis au pied du mur. J’en ai les bras qui tombent, désolé Thierry, c’est encore une expression ! Bon va falloir réagir, à tous problème une solution. J’allume mon GPS, randonné et pas voiture, je suis sur qu’il doit bien y avoir un chemin de campagne pour rejoindre « ma » route ! Oui il y en a une, je me retrouve enfin dans la paix et la tranquillité, mais le goudron laisse place au bon gravier et ma moyenne en prend pour son grade. Je m’en fous j’avance dans le bon sens. Des pommiers, des poiriers et des pruniers avec les fruits à maturités et personne qui ne les ramassent, je ne me gène pas pour tout gouter ! 6h que ça dur les hostilités, je commence à sentir la fatigue, j’espère un coin paisible pour monter mon bivouac, mais les vaches et les chevaux foisonnent et ne me laissent pas trop le choix pour m’installer. 80km et je suis au bled de Dalby, je demande s’il y a un camping. A 60 km au bord de mer !!! Ce sera au petit bonheur la chance, je rattrape une vieille dame en vélo, on papote, plus jeune elle a traversé la Suède en vélo. Elle ne connait pas de coin spécifique, puis se rappelle une ancienne mine qui est devenue un petit lac, il y a des tables avec des bancs, elle me dit que si je suis discret personne ne dira rien. Et me voilà dans un coin paumé, je monte ma tente et pars à la salle de bain. Il parait que l’eau froide c’est bon pour récupérer, je vais être en forme demain, alors. Malgré tout cette baignade me fait un bien fou, je m’organise pour le repas de ce soir et celui de demain midi et vais vite sous la tente, un gros orage est en train de s’acharner sur nous. Encore 83km d’effectué, demain il ne restera plus que 50 km pour rejoindre le port de Trelleborg dernière étape suédoise.
A pluche !

Dans la boule de cristal je vois…

22 août 2012
Quel charmeur ce Jozef ! Il n'a pas hésité à quitter sa "Norra" pour poser avec une belle suédoise !

Quel charmeur ce Jo zef ! Il n'a pas hésité à quitter sa "Norra" pour poser avec une belle suédoise !

Ce matin je suis d’attaque, une journée complète sans pédaler ça requinque le rebelle à cloche pied. Le ciel est déjà très chargé, la météo nationale est en vigilance orange pour des raisons de forte pluie, ça tombe bien on est rodé ! Pour corser le départ, je tente l’autoroute qui me fera traverser la ville directement sans passer par le labyrinthe urbain où je vais certainement m’égarer. Il est 5H45 et je ne pense pas trouver grand monde. Pendant 8km je serre les fesses, si la police passe, va falloir ruser. Finalement, l’épreuve est réussie mais quelques faux plats montants me donnent du fil à retordre. Deux heures pour retrouver enfin une route plate, je mouline.  Là bas au Sud-ouest le peintre badigeonne le ciel de noir, comme dirait la mascotte : « Chu sur que c’est de la peinture à l’eau ! Bien vu, y z’ouvre le robinet et ce n’est plus un vélo mais un pédalo. » Les camions qui nous frôlent nous estiment surement trop sec et nous envoient quelques belles giclées. Je suis motivé pour avancer alors, yakapedaler ! La moyenne est bonne, le sud se rapproche. Au bout de 75km, ce n’est plus de la pluie mais une cascade, les automobilistes nous encouragent, mais là je crois qu’il faut arrêter. Je trouve un camping désert, l’accueil n’ouvrira qu’en début d’après-midi, il n’est que 11h. En face de moi je vois une pauvre femme en train de batailler avec sa remorque toute neuve, son mari à l’abri sous un immense parapluie est tétraplégique. Cela ne pouvait arriver qu’à moi, trempé pour trempé je lui débrouille la situation. Elle a le passe qui donne accès au service salle à manger, coin repas et m’ouvre les portes du paradis. Je m’installe bien à l’abri et regarde la pluie inonder le pays. Je suis seul, style un peu yacht club britannique il y a un vieux sofa en cuir, je lui promets une sacrée sieste. Mais voilà, des femmes arrivent, je devrais dire des matrones. La communauté Rom est prise en charge par l’état et les campings leurs sont ouverts pour des prix dérisoires, plutôt qu’ils ne squattent des terrains vagues. Ici l’hiver peut-être fatal et le peuple suédois est très stricte, si bien que les allemands me paraissent un poil excentrique en comparaison. Donc ces dames débarquent, avec leurs toutous, deux pitt bulls ! Un poil tendu le cabochard. En deux seconde le coin calme et reposant se transforme en une hall aux poissons. Elles ne parlent pas, elles hurlent. L’un de ses mollos, me regarde du coin de l’œil, j’anticipe et me cale proprement avec la prothèse, ça ne loupe pas, l’enfoiré de clebs tente l’intimidation, je réagis avant qu’il ne comprenne. Un grand kaï kaï couvre le hurlement des gitanes. Sorry, i don’t now whats happen ! Elles ne causent pas anglais, moi je ne parle pas le rom ! Une grosse motte de beurre fond dans la poêle et des grosses tranches de lard enfument la pièce. C’est bon on s’arrache ! Elles auraient pu lire dans leurs boules de cristal que le corse solitaire n’aime pas le graillon et qu’il n’a pas trop confiance aux gamins qui viennent de rejoindre les cordons bleu grassouillets ! Dans la ligne de ma main je vois une belle et longue route qui va m’amener loin de ses fadas avant que je me retrouve en slip ! Le soleil semble jouer les troubles fête, je rigole en repensant aux « ladys » du camping, quelle différence avec le peuple suédois si calme, poli, soigné. Je fonce vers la ville de Hassleholm, mais pas de coin pour monter la tente, le ciel redevient noir, tient c’est pour la deuxième couche ! Je demande à un fermier où se trouve un camping mais il ne parle pas l’anglais, j’arrive à traduire qu’à deux kilomètres il faut que je tourne à gauche. Ok, mais rien du tout. Une grange vide, je mets le vélo sur béquille et pars en repérage, une herbe rase bien plate, un robinet d’eau douce, je suis au Novotel du coin ! Personne à l’horizon, je n’aime pas monter mon bivouac sans demander l’autorisation. Le vent devient violent, l’orage va exploser. Soudain, une jeune fille en vélo passe, elle ne m’a pas vu. Je l’interpelle en lui demandant l’autorisation, mais elle me dit que ce n’est pas un bon coin, les vaches vont revenir, elle me demande de la suivre. Devant chez elle un magnifique jardin avec pelouse, elle m’invite à y planter ma tente où je veux. Je suis gêné, je serai sous ses fenêtres. Elle sent ma réticence, et nous voilà partis sur une magnifique route en terre pour arriver sur une immense prairie. C’est une ancienne mine et les touristes, quand il y en a, peuvent la visiter. Il y a même un coin douche avec de l’eau courante. Nous discutons un moment, son projet va d’être  l’année prochaine de parcourir en vélo Vienne à Prague. Cela faisait un moment que le milieu urbain me chagrinait, j’avais connu dans le nord du pays de très belles rencontres et depuis mon départ de Stockholm je ne me sentais plus trop dans ce voyage découverte. Ce soir je suis fier d’afficher un petit 130km et le souvenir d’une très belle rencontre.
Tack sa mycket.
A pluche !
PS : Jo Zef enlève moi ce foulard de sur ta tête, je n’ai pas envie que tu me lises les lignes de la main, mon destin est juste devant moi.

Aux portes de Stockholm…

9 août 2012
Devant le kastelet de vaxholm.

Devant le kastelet de vaxholm.

Quelle belle soirée, Ana et  Christoffer m’ont invité pour un diner que je ne pourrai oublier mais ce matin je reprends ma route. Un dernier coup d’oeil à leur maison  et je file plein Sud. Arriver sans savoir si l’on reste, partir en sachant que l’on reviendra, la devise du nomade… Le vent est faible et je file sur une eau à peine ridée, je vais tenter de rejoindre le « grand » Stockholm. Je suis bien surpris du côté sauvage à quelques milles de la capitale. Je n’arrive pas à m’imaginer que derrière ces forêts se cache une mégapole. Je ne sais pas ou je planterai ma tente ce soir mais hier Christoffer m’a rassuré, ce n’est pas Paris et il me sera facile pour trouver un coin tranquille. Je dois traverser l’immense chenal où, ferry, porte container et taxi boat se croisent. Je me mets en poste d’étanchéité maximum. Le vent est toujours faible, heureusement d’ailleurs, le passage deviendrait vite dangereux avec de la brise. J’avance sans penser à tout à l’heure, j’essaie de me
remplir de toutes ces images qui défilent devant moi, je ne veux rien louper. Le passage du Saxar Fjärden est franchi, je dois trouver un petit chenal. Le vent se lève, le ciel s’obscurcit, ça sent l’orage. Je fais une halte déjeuné, déjà 7h de je pagaie : C’est que ça creuse l’exercice ! Un homme m’interpelle, vu mon accoutrement et comment est équipé Immaqa cela l’intrigue. Il me félicite et avec un charmant accent suédois me dit en français : bonne chance. Je reprends ma route, devant moi l’île de Vaxholm qui était l’un des premiers remparts de Stockholm, je crois que c’est là où je vais me poser. On m’a parlé d’un camping, mais entre vous et moi je ne vois pas monter ma tente au milieu d’aoutiens. Je passe par le port charmant de l’île, quelques touristes me prennent en photo, des dames parlent entre-elles, des françaises. On discute un moment et je poursuis, le coin dégage une bonne onde, je m’y sens bien. Je me fais doubler par un couple d’allemand en kayak, on partage un bout de nos vies, ils filent vers leur destin moi vers le mien. Je trouve le camping, je tente une approche. En plein mois d’aout je m’attends au pire, rien de tout cela, du calme, de la paix. Je me renseigne sur les commodités, je dois impérativement laver mon duvet, deux mois que j’y dors, il commence à sentir le renard mort. Jo Zef et Norra confirment. Je fais un tour du site, je ne suis pas encore prêt à ce cantonnement. Depuis Lulea, je bivouac dans des endroits sauvages, l’équipe logistique arrivera sur zone mardi matin au plus tard, j’ai encore le temps avant de me faire numéroter, parquer, enregistrer. Je reprends la mer, là-bas à un kilomètre je perçois comme une immense prairie sans maison au alentour, des chevaux, des champs et personne à l’horizon. Je m’approche en espérant y trouver mon refuge, je me faufile au milieu des joncs et découvre une pelouse naturelle qui donne envie de s’y rouler. Je me dis que ce n’est pas possible, il doit y avoir une maison de luxe dans les parages. Je pars en repérage. En haut d’une colline je vois au loin une ferme, je suis sur des terres agricoles, je suis sauvé, personne ne viendra m’embêter. Je cherche le bon coin  pour monter ma tente, en bordure d’arbre ce serait idéal pour rajouter ma bâche qui en plus de la tente me protégerait de la pluie qui dans un moment va mettre la douche en marche. Un bateau ce dirige sur moi ! Aie, je suis cuit !!! Non, c’est un pécheur, je lui demande si c’est possible
de bivouaquer. Il me répond que oui, je suis l’homme le plus heureux. Nous discutons pêche, c’est son métier et avec beaucoup de gentillesse il me donne quelques astuces pour essayer enfin de prendre un poisson. Sous un noisetier la tente est montée, juste derrière un chêne, qui doit au moins avoir trois cent ans, semble me sourire. Je m’approche doucement et me plaque à lui les bras écartés, il commence à pleuvoir, je capte son énergie. Je viens de parcourir 1100km en kayak dans des conditions des fois difficiles et aujourd’hui comme cadeau de la vie je suis dans un Eden de paix et de verdure. Sous mon abri de toile je vais enfin me reposer, j’ai du sommeil à rattraper, j’ai des peurs à digérer, j’ai des larmes à essuyer, j’ai des rires à partager. I’m a free man.
A pluche !

L’archipel de Stockholm en kayak.

7 août 2012
A l'abordage, mille sabords de mille sabords! Jo zef calme toi...

A l'abordage, mille sabords de mille sabords! Jo zef calme toi...

Cette fois elles sont devant moi, en vrai ! Les 24 000 iles de l’archipel de Stockholm. Le vent est inexistant ce matin, il y bien longtemps que ce n’était pas arrivé. Je me suis réveillé un peu plus tôt et en ai profité pour partir en avance, je me méfie toujours des entourloupes du Sud ! Calme plat, pas une ride, aucun air sur le bout des oreilles. En file indienne trois monstres de ferry embouquent le chenal, trois montagnes de ferraille. Il y a quelques années, l’un d’eux avait subi l’une des plus terribles tempête de la mer Baltique. L’Estonia restera pour toujours un funeste souvenir. Au bout de trois heures j’atteins enfin l’île de Blidö, alors que je m’arrête quelques secondes pour croquer une barre de céréale, un souffle me fait sursauter. A quelques centimètres du safran d’Immaqa une grosse bouille avec des moustaches, nous espionne. Je suis tellement surpris de cette visite que j’en reste bouche bé. Grosses narines dilatées, il nous regarde un dernier coup et sonde pour nous quitter. Le cinquième en 1000km, j’aurai pensé beaucoup plus. A peine arrivé à quelques encablures de la grande île, un vent de Sud-Est se réveille, ouf nous sommes passés. Je cabote et constate ce que je pressentais depuis longtemps, des maisons qui se touchent à l’infini. Sur 10 km de côtes, pas un endroit pour accéder. J’avais prévu le coup et si je suis passé par là, d’une, c’est pour le voir de mes propres yeux, deux, pour arriver sur un chapelet d’îlots où je trouverai bien par trouver un espace convenable pour bivouaquer. J’ai constaté que devant chaque maison des kayaks étaient entreposés, connaissant un peu plus le peuple suédois, je suis convaincu que des
coins pour bivouaquer seront accessibles. Je scrute, les îlots quand une anse se dévoile, j’espère qu’elle n’abrite pas de maison. Rien que du gré et des roseaux. Un caillou un peu plus plat que les autres va me servir de quai. En m’extirpant du kayak je dois remboiter ma prothèse puisque je navigue sans, un exercice de cirque car en plus de la gymnastique, les cailloux sont recouverts d’algues vertes bien glissantes. Je sens que c’est le bon coin, de l’herbe tassée me fait comprendre que quelques pèlerins sont déjà passés par là. Trente mètres pour trouver une petite prairie bien plate avec des restes d’un ancien foyer, c’est bon les enfants, terminus, tout le monde descend ! Le même train-train et me voilà sur l’une des milliers d’îles du fameux archipel de Stockholm. L’ambiance n’a plus rien à voir avec ce que j’ai connu jusqu’à présent. Entre hier et aujourd’hui j’ai croisé des centaines de bateaux, nous sommes à la fin des vacances, la reprise est prévue en fin de semaine pour tous les suédois, alors ils en profitent. Jusqu’à Oregrund j’ai du croisé une cinquantaine de bateaux, peu pour une distance de 850km en été. La population au nord est de 9 habitants au Km2, la plus faible d’Europe, ici elle est de 233 ! De mon nid d’aigle je peux écouter encore en paix les histoires que le vent veut bien me conter : Il était une fois, il y a bien longtemps, un corsaire qui naviguait sur un petit bateau rouge et noir. Il ne parlait pas la même langue que les vikings mais savait causer au vent et aux oiseaux. Son ami et second dont le nom a été caché par la légende a sauvé une princesse du Nord de la noyade, ils la prirent avec eux à bord et poursuivaient leur route vers le sud.
PS : Norra et Jo Zef sont tout émus de cette histoire, elle leur rappelle quelque chose.
A pluche !

Ce n’est qu’un au revoir à la mer de Botnie.

2 août 2012
Un coin planqué comme je les aime.

Un coin planqué comme je les aime.

Ce petit îlot m’a refait une bonne santé, pas un bruit et une onde positive régénérant. Le plancher de bois que je me suis improvisé m’a permis de dormir enfin sur une surface plane et de faire une longue série d’étirement, ce matin mes douleurs de dos ce sont comme par miracle envolées. Encore et toujours du Sud, ce n’est pas grave il suffit de pagayer un peu plus fort ! Je me méfie des petits passages et préfère passer par les grandes îles, certes plus ventilées, que de me retrouver dans un cul de sac par des joncs ayant fermé le chenal. Encore un golfe à passer vent de travers, le dernier pour le golfe de Botnie, les vagues nous secouent pas notre travers tribord mais avec Immaqa nous
sommes coutumiers de ce fait. Un petit dernier puis devant  nous le village d’Öregrund. Je me retourne pour donner un dernier coup d’œil à la mer de Botnie, il y a 35 jours nous partions de Lulea, 906km effectuée en 27 étapes. Pour le restant de mes jours ces jours de mer vont être gravés à tout jamais. Je suis heureux d’avoir réussi cette performance, une sacrée école de vie. Patience, endurance, humilité, remise en question quotidienne, gestion des peurs, froid, humidité et surtout de belles rencontres seront les mots clés de ce périple. Je suis tombé sous le charme de cette mer si peu peuplée, si sauvage, si puissante. Une mer qui a du caractère, qui ne donne pas envie au jeteur de serviette sur sable d’y aller. Des projets sont nés au fil de ses heures de pagaies, je verrais si je les réaliserai. Au bout du petit cap Öregrund, un immense bac permet au véhicule de rejoindre la grande île toute proche de Gräsö, en gros le nom du bateau : Véronica !!! J’explose de rire encore un sacré clin d’œil de la vie. Je poursuis ma route, la géologie a changé du tout au tout, fini les tumultes de granit inaccessibles, la berge est composée de dalle immense de granit et semble laisser le débarquement plus aisé. Je sens comme hier un gros orage, devant moi une plage de sable, je n’hésite pas une seconde, je vais m’y arrêter. Effectivement le nuage se crève sur ma tête, moins fort qu’hier mais juste assez pour me refroidir. Une fois fini, avec une vieille pagaie de secours j’aplanis le terrain et y dépose un épais tapis de joncs secs posés par le vent du Nord. Je m’applique et monte mon bivouac. Ouah quel confort du 5 étoiles grand luxe ! Le soleil revient, je vais en profiter pour faire sécher mes affaires. L’œil en coin je déguste mes nouilles chinoises en bordure de la mer Baltique. Il me reste 130km pour rejoindre Stockholm, je vais naviguer dans un dédale d’îlots qui me permettront d’avancer sans souci de la houle du large. L’arrivée des jeunes sur la capitale est prévue le 14 aout en matinée, faites le calcul, je n’ai plus de raison de cravacher. Je me permets une énorme sieste, je m’aperçois que j’y ai laissé un paquet d’énergie mais j’ai tellement reçu que cela en valait la peine. L’orage revient, je referme tout, mes affaires sont sèches, je suis reposé. I’m a free man !

PS : Au menu ce soir omelette de patates, avec salades de tomates et pissenlits, polar kaka tartiné de beurre salé, riz au lait à la confiture de myrtille. Vous voulez venir ? Attendez, je demande au chef de service. « Jo Zef on peut faire venir du monde pour partager notre diner ? » «  Com-plet !!! » «  Ok dommage !!! » A pluche !

Cliquez sur ce lien pour découvrir l’article paru dans un journal suédois : Arbetarbladet.se

Un bout de repit…

20 juillet 2012
La mer de Botnie m'apprend à conjuguer le verbe "vivre"...

La mer de Botnie m'apprend à conjuguer le verbe "vivre"...

J’ai eu beaucoup de mal à dormir, régulièrement des cygnes se sont pris pour des « Castafiore » en poussant des hurlements que je n’avais jamais eu l’honneur et l’horreur d’entendre… 5h30 je file au milieu d’îlots somptueux. Un premier « bébé » golfe de 900mts à passer avec un très fort vent de travers, quelle chance d’avoir réussi cette longue navigation hauturière hier. Le deuxième à peine plus long m’affirme qu’aujourd’hui cela aurait été du suicide, ma cavalcade vers le sud a payé mes efforts de gladiateur. Finalement je suis dans l’axe du vent qui prend de la force,  un sms de Véro qui m’annonce un bon coup de Nord-ouest pour ce soir. Il m’est impératif de trouver un bon abri, je pagaie quand la carte me fait deviner une succession d’anses, à la dernière, une me semble si belle que je fais l’effort de changer de cap.
Je suis sur le cul, pardonnez moi l’expression mais alors là c’est du rêve. Sur l’onglet « Mon parcours en direct » vous pouvez zoomer google earth sur ma dernière position et apercevoir ce paradis. Je beach Immaqa et commence un dialogue de fou : Si tu ne reste pas là aujourd’hui, tu loupes ton voyage, rien ne sert de courir comme tu le fais ! La voix maligne répond : Avance Frank, aujourd’hui on peu péter le record de 50km avec ce vent dans le dos !!! Je deviens dingue, j’envoie tout balader, je reste. Le temps de monter ma tente, je marmonne dans ma capuche ; puis quelques rafales rasent la canopée de la forêt qui m’abrite et je me sens mieux, 600km en 21 jours, jamais je n’aurai parié une crêpe sur cette distance, alors j’apprécie, je me pose écoute le vent, happe le silence et vibre avec la mer de Botnie. Au programme : coiffeur, pressing et restau !!! La forêt de pin qui m’encercle embaume mes sens, je me prends pour une lavandière, sur un caillou plat je frotte mon pantalon qui lâche son noir comme le ferait un calmar apeuré. Pour les cheveux c’est plus technique ! Je n’ai comme ciseau que celui de mon couteau multifonction et il me faudra beaucoup de patience pour un rasage parfait. Au restau du midi omelette de chanterelles, tartine à volonté de fromage  et en dessert une assiette de myrtilles en compote.
Pour m’endormir à la sieste la radio FM fredonne mon air préféré du moment : Melissa Horn (faire le lien ou avec une vidéo ou son site comme tu le veux). Des oies et canards ont du sentir le coup de vent et ils sont venus se mettre eux aussi à l’abri.
Puisque j’ai le temps, je vous partage ce que je lis en ce moment : ..//.. La pluie qui tombe sur la terre asséchée n’est elle pas une chose extraordinaire ? Elle nettoie les feuilles et rafraîchit la terre. Je crois que nous devrions tous nettoyer notre esprit complètement, comme la pluie nettoie les arbres, car il est lourdement chargé de poussière accumulée au fil des siècles, de la poussière de ce que nous appelons la connaissance ou  l’expérience. Si vous et moi réussissions à nettoyer notre esprit tous les jours de la veille, chacun de nous aurait alors un esprit frais, capable de faire face aux nombreux problèmes de l’existence..//.. J.Krishnamurti
A pluche ! Jo Zef et Norra ne se lâchent plus !!!