Camp du brouillard
10 juillet 2017You are a free man…
13 juillet 2012Même décor, même heure, même météo, mais il y a un petit plus, le brouillard est d’une intensité que je n’avais jamais connu. J’avance dans le coton, le silence m’enveloppe, à 5km de là un trio d’îles que je dois pénétrer, toujours cap au sud. Compas, carte, je me retrouve nez à nez avec la passe. Large de 30 mètres il n’y a pratiquement pas de fond et les trois minuscules terre se réunissent quasiment. Je passe de l’autre côté et croise un patron pêcheur. Il est surpris de me voir là avec une si petite embarcation et de si bonne heure. Nielsen me pose plein de questions, il me fait voir ses prises du jour, de beaux saumons d’au moins dix livres pièce. Il veut m’en donner un mais je ne peux accepter pour plein de raisons. En un clin d’œil j’ai vu que cet homme ne roulait pas sur l’or et qu’un si beau poisson pour moi tout seul c’est trop. Ses silences me touchent, je revis le même moment qu’à Kallviken, on ne se connaît pas mais le golfe de Botnie nous rend frères de mer. Il me demande où je vais dormir ce soir, combien de kilomètres je fais par jour. Il sait que ma journée est loin d’être finie et me lâche l’amarre en me disant « take care, you are a free man ! » (Prend soin de toi, tu es un homme libre !) Je repars gonflé à bloc, je n’arrête pas de repasser en boucle cette phrase : « You are a free man » yes I’m.
Les kilomètres sont avalés différemment aujourd’hui, je descends vers le sud, je descends vers le soleil. A propos, il tombe des cordes, des murs d’eau s’abattent sur moi mais je chante, je ris, je suis libre, comme les sternes arctiques que je croise. Libre de continuer, de m’arrêter.
Au détour d’un promontoire de granit, une centaine, d’oies bernaches me regardent un peu inquiètes, passer. Je stoppe mon pagayage et leur hurle : « you know I’m a free man ! » Elles se jettent toutes à l’eau pour aller se planquer derrière de gros cailloux. Je suis euphorique, la vie est si belle. 14h j’ai la dalle et j’ai pas encore mis les pieds sous la table, allez Jo Zef au prochain restau on s’arrête !!! Je pénètre un archipel sous un rideau de pluie et implore les Dieux des mers et des océans de me trouver un petit endroit bien sympa pour monter mon bivouac. A bâbord je détecte une échancrure, une sorte d’alcôve marine, allez la mascotte on va voir comment est le lieu ! Le paradis sur terre… je beach Immaqa et pars à la recherche du bon coin plat pour y monter la tente. Le tarp (toile qui sert d’abri) est aussi monté et en dessous je monte mon chalet de toile. Ce soir le soleil pointe son nez mais le vent du sud va envoyer certainement ces watts le baro qui est déjà bas vient de faire une rechute. I’m a free man !
Pour les comptables, 30km de fait quand même.
A pluche !
Départ de Mehamn reporté…
13 juin 2012Pluie, brouillard, 4 °, coup de vent annoncé, Tina et Ruan insistent : Demain c’est pire, reste ..! Ok ..!
J’avais prévu de rester jusqu’au 20 juin si le temps ne me permettait pas de traverser en kayak, pourquoi affronter les éléments, le soleil est bientôt de retour, Jo zef connait des chants athapascans pour ça !
La fenêtre de ma chambre domine le port naturel de Mehamn, un comptoir de pêche du bout du monde. J’imagine l’enfant né ici, pas d’arbre, des hivers de glace sans jour, et pourtant ceux que j’ai croisé ont les yeux qui pétillent. S’adapter, ils n’ont pas eu le choix ils se sont adaptés. Le nez collé au carreau je me laisse aller, je vous vois sourire. Oui ça m’arrive ! Je laisse faire mes émotions, je laisse vaquer mes sentiments, la brume m’embrume les idées. Pourquoi, comment, qui sommes nous… Les régions polaires ont la faculté de rendre l’homme petit, humble, quand les éléments se déchainent, le vantard se fera tordre, l’écervelé sera crucifié sur place… Ce matin j’ai eu de la visite, un journaliste norvégien. Ce brave homme ne parlait que très peu l’anglais mais avait une folle envie de connaître un bout de ma vie. Je l’ai déstabilisé en inversant les rôles et c’est moi qui lui ai posé les questions. Etait-il né ici ? Si ses enfants avaient quitté la région ? Que faisait-il de son temps de libre… Finalement il a griffonné son bout de papier et d’ici quelques jours dans le canard local on parlera d’un certain cabochard…
Recherche la vérité dans la méditation et non dans les vieux livres poussiéreux. Recherche la lune dans le ciel et non dans l’étang.
Proverbe persan que j’avais envie de partager…
Je vous ai joint une petite vidéo assez simple que j’ai tournée au moment de mon départ de Slettnes en kayak …