Le mental, toujours le mental…

21 juillet 2012
Un repos bien mérité !!!

Un repos bien mérité !!!

Il est 19h30, toutes mes taches sont faîtes. Je suis épuisé mais heureux d’être là, heureux d’avoir su une fois de plus surmonter la montagne qui se dressait devant moi. Je n’ai plus rien à faire je suis allongé avec la brise qui me caresse et le soleil qui me réchauffe. La mer de Botnie commence à me connaître, on discute, on se confie, elle est redoutable mais si courtoise. Je peux enfin me laisser aller, me relâcher, je commence à m’assoupir je me remémore cette longue, longue journée.
Bien abrité par la forêt, le bruit sourd du vent rasant les cimes des arbres m’a bercé. Ce matin c’est le retour au boulot, mais le vent de Nord-ouest est encore violent par rafale soudaine. Je vais faire l’indien et pagayer en rase cailloux. Effectivement là-bas au large vers la Finlande ça moutonne, plus je descends plus une longue houle de nord me pousse, mais bien sur il y les baies à traverser. Pas des golfes énormes mais des échancrures assez profondes pour lever une mer sportive ! Je n’avance pas comme je voudrais, je suis en bas de la vague si j’osai cette expression, la cote est longue à n’en plus finir et son côté monotone me mine l’esprit. Je n’arrive pas à décrocher, je reste figé sur cette ligne droite. Je travaille le mental, m’invente des belles histoires mais rien à y faire je suis en bas ! 5h de route pour enfin trouver un changement, je passe un cap et bifurque vers une petite île, je me cache au milieu des cailloux sans pouvoir descendre du kayak et me fais un café. La stabilité du Nautiraid me permet de me retourner et de me mettre à genou dans son trou d’homme. Je m’étire, je mange quelques canistrellis et essaie de faire de la respiration. Je reprends la mer mais je suis lourdingue, j’ai l’impression que je n’avance pas. Encore un golfe un peu plus important, allez c’est pour la deuxième couche, vent de travers, vagues qui déferlent etc etc ! Enfin un chapelet d’îles me barre la route, je vais y faire ma pause déjeuné. Et si je m’arrêtais là ? Je mange tranquillement, une fois de plus le lieu est somptueux mais aucun replat pour mes 4m2 de tente, rien à y faire ! Je reprends mon chemin, magnifique, extraordinaire, le coin est une fois de plus une carte postale. Puis le cap Hornlandet apparait. C’est là que je dois passer demain, la force me revient, l’énergie aussi. Je me laisse glisser entre deux cailloux et réalise qu’entre ce cap et nous il y a un arrêt possible. Le vent sur ce coup là est dans la bonne direction, alors je tente. 7 km et c’est sur je m’arrête. Le vent est un peu plus régulier et se cale autour des 10, 15 nœuds, je tente mon joker, le cerf-volant ! Il part au premier coup et surtout il est orienté juste au bon cap. J’avance comme un matelas de plage qui s’est envolé d’une anse ventilée ! Je navigue à 7km/h, la mer n’est pas trop formée, une petite heure pour rejoindre cet abri. Je beach Immaqa y trouve un coin presque convenable et retrouve enfin la paix et la sérénité. Une journée qui me permet d’énormément progresser mentalement. L’effort est le même mais c’est l’environnement, les données psychiques qui changent, alors c’est à moi à dépasser ce cap et à trouver du réconfort pour pouvoir établir une belle journée de kayak. 42 km de réaliser !!!
A pluche !

Il pleut sur Nantes…

19 juillet 2012

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La météo m’autorise à tenter encore une grande et longue traversée, depuis mon bivouac au cap Björkön, il y a 20 km tout droit plein Sud-SudEst. Je me cale dans Immaqa, une dernière vérification visuelle que tout soit bien fermé et étanche et nous prenons la mer. La forte brise de Nord-ouest est déjà là, nous sommes deux à être matinaux. Je pagaie au milieu de quatre îlots qui créée une sorte de dépression dans la ventilation du golfe ce qui me donne de violentes rafales assez inédites. Au passage de chaque caillou les vagues la contournent et viennent lécher le tribord de mon kayak. J’essaie par trois fois d’envoyer mon cerf-volant mais le vent est trop irrégulier et il ne peut s’envoler, je rage, je peste contre ces maudites perturbations. Au dernier îlot je peux un peu me protéger et lire le dernier bulletin de prévision météo, ça me rassure dans ma décision de couper tout droit.
Les sms de prévision marine de Véro comporte toujours un petit mot d’encouragement, ce matin j’en ai encore plus besoin que d’habitude ! Je sors de sous le vent de l’île et m’installe sur mon cap à suivre ; le ciel est bleu azur mais le vent du nord me glace les os. Pour l’instant c’est un ouest et non un nord-ouest annoncé qui me décoiffe et je suis ballotté par ce vent tribord arrière, le clapot devient déferlant ! Je tente de scruter l’horizon et suis convaincu qu’il prendra quelques degrés pour être à ma convenance. J’essaie avec calme et tact d’envoyer le cerf-volant, sans les turbulences créées par les îles, il s’envole dès le premier coup. Je ralenti un peu ma cadence mais ma vigilance s’accrue, les séries de déferlantes augmentent. Malgré le vent je retire ma capuche pour mieux entendre et sentir arriver les murs d’eau dans mon dos. Je n’ai pas peur, je n’en ai pas le temps et ce n’est surtout pas le moment de cogiter, j’y suis, je dois gérer. Je sens que je dois augmenter la vitesse du kayak, il faut qu’il reste dans l’axe des rouleaux qui nous doublent, si l’on se met en travers, c’est échec et mat. Je compte mes coups de pagaies, 60 à la minute, je ne sais pas si je vais tenir longtemps, mais ce qui est sur c’est que l’on va très vite. Une heure et je devine le passage du cap, j’arrive dans une zone
où il y a des hauts fonds, la carte mentionne 0,6 mts ! Je force l’observation tout en gardant le cap et la cadence, soudain à mon bâbord, je vois les roches affleurer, elles sont loin de moi, le courant est plus fort que je ne pensais. Deux heures de lutte fratricide, je ne suis toujours pas fatigué, le stress stimule mes glandes qui sécrètent de l’endomorphine, je serai fatigué une autre fois ! Le cap n’est plus très loin, trois heures que je mouline, je m’habitue, je suis plus à l’aise, Immaqa est un sacré kayak, je n’en connais qui ne tiendraient pas dans une mer aussi hostile, je m’y sens bien, un vrai ami sur qui je peux compter. 10h je double le cap Björkön, je suis enfin passé, je rentre doucement mon cerf-volant et savoure la paix d’une eau calme, malgré quelques rafales rebelles j’entends le vacarme de la houle qui s’écrase sur les hauts fonds du cap. Je me retourne pour mieux voir, je ne vois même plus d’où je viens, je ne m’en rappelle plus, je ne sais plus c’est déjà loin tout ça. Je ne sais pourquoi mais le refrain de la chanson de Barbara me vient en tête, et sans trop me rappeler les paroles je fredonne l’air de : « Il pleut sur Nantes ». Fatigue, fin de stress, passé qui ressurgit, en même temps que les mots sortent, je me mets à pleurer. I’am a free man.
Je longe à l’abri du vent et de la houle une côte sublime, des petits îlots couverts de forêt, à chaque fois je me promets d’y amener ma belle, je cabote, je suis heureux. Finalement  je trouve un petit caillou plat que je vais aborder et y monter mon camp. Malgré les 14° de
l’eau je me baigne dans les entrailles de la mer de Botnie, nu sur un bloc de roche je fais corps avec ce  granit, je récupère toute l’énergie de la terre, le soleil m’irradie de lumière. Je m’endors, un fort vent de Sud-Est me réveille. Je range ce qui traîne et savoure ce moment de solitude intense. Si demain c’est du sud je ferais le fainéant, j’ai pris un paquet d’avance encore aujourd’hui, donc je peux me calmer si j’y arrive!!! 38km de plus au compteur.
A pluche !

Soleil et oeufs au plat !

18 juillet 2012
Un arrêt : de l'eau, des œufs et de vrais sourires, toute la gentillesse des suédois...

Un arrêt : de l'eau, des œufs et de vrais sourires, toute la gentillesse des suédois...

4H45 le soleil chauffe déjà la tente, pourvu que ça dure ! 5h30 ça y est je reprends ma route, c’est gris et froid ! Le canal m’offre un départ ventilé, l’effet de venturi accélère la brise de Nord-ouest et me donne un bon coup de main pour une autre belle journée de mer. Le soleil revient, il ne nous lâchera plus de la journée. Il me faudra une heure pour retrouver la beauté et la sauvagerie du golfe de Botnie. Je ne garderai pas un super souvenir d’Härnösand, ville triste, au citoyen peu accueillant. Pendant trois heures je longe une belle côte inhabitée et somptueuse. Au détour du cap Skarpudden je devine la route que je dois prendre. 6km à traverser avec un vent de travers, cela devient une mode, je m’applique à bien me calfeutrer dans mon hiloire et pagaie gentiment. Mes bras font l’effort, ma tête s’envole ailleurs. Je me demande pourquoi tout le monde s’obstine à l’appeler golfe alors que c’est une mer magnifique ! Je converse avec elle, comme à chaque fois, je lui pose des questions, elle me répond. Soudain devant moi le calme plat, plus un nœud de vent, je souris, je ris, elle m’offre une traversée pépère. Je suis déjà de l’autre côté. Je me tourne et vois la mer se couvrir de moutons, quelle délicatesse de sa part, elle a laissé filer son hôte. Je bifurque plein Nord-ouest entre le continent et l’île d’Ästön, l’effet venturi de nouveau lui, vient me faire faire une séance de muscu. A l’abri du large, j’avance tranquillement. De jolies maisons, ornent ce chenal, rien à voir avec les châteaux hideux de ce matin. Au milieu le passage ne doit faire que 10 mts de large et c’est là que je décide de faire ma pose « lunch ». Alors que j’hydrate ma semoule, un vieil homme vient me voir, sa maison est juste derrière où je me suis posé. Je suis encore sous l’effet d’hier où je me suis fait virer comme un pauvre voleur de chaussettes trouées. Il me souhaite la bienvenue et remarque mon « unijambité » puisque à la pause casse croute je l’enlève tout le temps. Il ne parle pas l’anglais mais nous arrivons à dialoguer, il me propose de l’eau de son puits. Je récupère quelques bouteilles vides au fond du kayak et pars avec lui. Je découvre un poulailler ; je lui demande comment survivent ces pauvres bêtes en hiver par des -40° ? Elles ont leur cabane chauffée ! Je reprends mon déjeuner quand toute la famille arrive pour me prendre en photo et surtout m’offrir quatre œufs. Heureux de ce retour à la gentillesse des suédois, je reprends la mer. Encore une traversée m’attend, 4km seulement mais avec un fond de fjord situé à 22km au nord. Autant dire que si ça souffle, je suis raide ! 10 nœuds de vent et une mer à peine agitée, je procède à ma « ramerie » quand pour la deuxième fois de la journée le vent tombe complètement. Décidément la mer de Botnie est vraiment très attentionnée avec l’équipage d’Immaqa.
Ce soir œufs au plat de poulette du coin.  Pour la comptabilité, 36km de plus.
A pluche !

Une kayakerie urbaine !!!

17 juillet 2012
photo prise par le 1er kayakiste que je rencontre et qui s'appelle ????? Frank, incroyable !!!

photo prise par le 1er kayakiste que je rencontre et qui s'appelle, devinez comment ????? Frank, incroyable, n'est ce pas !!!

Comme d’hab de très bonne heure je lève le camp, le plaisir est le moment où je quitte mon abri et que j’ai passé le cap du non retour, alors la journée d’aventure peut enfin commencer. Le vent est plus faible qu’hier mais il ne veut pas me laisser seul alors il me suit. Je ne vais pas encore vous en faire une tartine mais que ces golfes avec le vent de travers ont été durs à passer. Mes avant-bras semblent avoir doublé de volume depuis mon départ de Lulea ! J’atteins enfin le goulet qui mène à la petite ville de Härnösand. Je sors de mon pèlerinage en solitaire, j’ai l’impression de me retrouver sur la côte d’azur, des bateaux dans tous les sens ! Déjà que le clapot de travers ça remue mais alors les « domingeros » en croisière avec leur moulin à café ça donne l’envie de hurler !!! Je me referme et évite de leur lancer mes yeux noirs. Je pagaie encore plus fort et puis voilà. Au loin je vois enfin mon premier kayakiste et savez vous comment il s’appelle le monsieur ? Frank !!! On y est donc deux dans cette mer de Botnie à faire du kayak et c’est deux Frank ! Il est du coin et est impressionné par la stabilité d’Immaqa. Il m’indique un coin tranquille pour aller faire deux courses, il me prend une photo et nous nous serrons la main.
Finalement après 10 h d’effort je suis dans le canal de Härnösand, je passe un premier pont et au deuxième je trouve un petit ponton en bois avec un rivage accostable et bien à l’abri des regards. Je remarque un bâtiment sans trop le détailler jusqu’au moment où je suis scotché de voir que je viens de beacher devant un Mc Donald !!! J’amarre solidement mon kayak et planque le matos visible sur le tableau de bord, (GPS, caméra). Je grimpe le talus et me retrouve en ville. A l’abri du vent on se croirait en été ! Je me rends au supermarché pour me prendre un peu de victuailles fraîches. Je ne veux pas trainer, j’ai la nausée de tout ce monde, de ce bruit. Je fais la queue pour régler mes courses quand un groupe de jeunes gazelles locales qui font la queue derrière moi, semblent s’intéresser à mon accoutrement. En baissant les yeux je vois que mes bottes qui ont des protections en néoprène viennent de lâcher leur eau et que je patauge dans une immense flaque d’eau !!!
En pas moins de 20 minutes j’ai récupéré mes bricoles et poursuis ma route, il est hors de question que je reste plus longtemps ici. Je passe encore deux ponts et me retrouve dans une mini réplique du canal du midi sans les écluses. Finalement je sors de la ville pour me glisser dans le quartier résidentiel du bled. Une pelouse immense semble me tendre les bras, je trouve une petite plage caché et par acquis de conscience pars à la recherche des proprios ! Je tombe sur le major d’homme qui me détaille de la tête au pied. Je peux camper en bas ce soir, je me ferais discret même pas de feu ! Il en bégaie et n’arrive plus à prendre sa respiration, sans attendre sa maudite réponse je lui tourne les talons et avant qu’il me trouve une mauvaise excuse je suis déjà reparti. Je tente sur l’autre rive, même réponse : Im-po-ssi-ble !!! Cela fait 11h que je pagaie et je commence à sentir une petite fatigue quand finalement je trouve un coin minuscule pour planquer Immaqa et monter mon camp. Eh ben ça c’est une sacrée journée, 42km avec du zef dans la gueule, depuis Lulea j’ai parcouru déjà 512km….
PS : Norra supporte très bien le voyage en kayak et commence à apprendre les premiers mots de français indispensable pour Jo Zef : Crêpes, confitures, gaufres. Comment on dit gâteau en suédois la mascotte ?!?
A pluche !

Bout au vent…

16 juillet 2012
Il la protége, lui sussure le Sud, la Méditerranée, une île où les hommes sont rebelles mais ont un coeur gros comme le monde...

Il la protège, lui susurre le Sud, la Méditerranée, une île où les hommes sont rebelles mais ont un cœur gros comme le monde...

Encore et toujours une pluie fine, le soleil est certainement trop occupé à cramer la Méditerranée ! Un bon coup de Nord-ouest se prépare et à 5h25, heure de mon départ, il est déjà en forme. Le grand golfe d’Omnefjärden prend une allure moutonneuse, mais je passe sans problème.
Bien à l’abri je louvoie très prés de la côte pour m’éviter, les pires rafales. Hier j’étais  protégé du Sud-est ce matin planqué du Nord-ouest, ici le vent ne connait pas de répit. J’arrive à la deuxième baie du programme, je passe mais cela devient plus engagé, un poil sportif ! Je retrouve une côte sous le vent mais quelques grosses risées me plaquent au kayak, j’en ai failli perdre la pagaie. Au détour d’un cap je dois bifurquer cap au Nord-ouest sur 400 mètres, je ne dois surtout pas baisser la garde. Je mouline pour gagner du terrain, finalement je m’en sors pas trop mal. Le crachin ne cesse de jouer les supporters mais je crains la prochaine traversée, le Gaviksfjärden est profond de 6km et il aura assez d’espace pour lever un sacré clapot, cela va être dur à gérer. Je me cache derrière un gros caillou pour prendre un peu de répit et manger quelques bricoles qui vont m’aider à affronter cette épreuve. Je m’élance, branche la caméra et envoi les watts, je suis à fond, je ne peux pas donner plus. Je ne suis même pas sur que j’avance, une demi heure pour gagner 500mts et je sens que j’y passe une incroyable énergie. Sur mon tribord un fjord protégé apparait, je vais essayer de tirer un bord sur lui sans trop me mettre en travers des lames pour ne pas finir sans dessus dessous. Finalement je touche la plage, je crois que seule la pluie est mon témoin du jour, pourtant depuis un moment j’étais observé par un homme qui possède le cottage où j’ai beaché Immaqa. Je m’étire quelque peu, je m’extirpe avec peine du kayak et touche enfin la terre ferme. Je vois déjà où je pourrai monter ma tente, mais avant, ma conscience « professionnel » m’exige de comptabiliser la journée. 24km, il manque 6 pour faire mes 30 que je me suis imposé ! Mais hier j’en ai fait 42, ok, je reste !!! Oui je sais cela peut vous faire sourire, mais la rigueur et la discipline sont nécessaires dans des raids aussi long, si l’on passe sur certaines choses à la fin le projet avorte. Pendant que je me bois une tasse de café brulant, un homme apparait, il m’a surveillé à la jumelle et vient à ma rencontre. « Belle bataille, monsieur ! » Je souris et lui répond qu’avec la Botnie, il n’y a ni combat, ni lutte, juste une volonté d’avancer au mieux, aujourd’hui’hui je n’ai plus de jus pour continuer. Il m’invite dans sa maison et debout devant un feu de cheminée je me sèche de cette dure matinée pluvieuse et venteuse. Il m’offre un café et me propose une cabane voisine de la sienne. Je refuse gentiment, j’ai pris l’habitude d’être sous ma tente mais accepte d’aller prendre ma deuxième douche brulante en deux jours !!! En préparant ce projet, j’avais lu pas mal de bouquins sur les pays que j’allais traverser et souvent je remarquais que les suédois étaient froids sans accueil pour l’étranger !!! Je ne sais pas si c’est ma chance légendaire mais depuis que je suis dans ce beau pays je n’arrête pas d’être reçu comme un frère.
PS : La petite rescapée d’hier commence un peu à sécher et Jo Zef l’a prise en affection, je crois qu’elle va venir avec nous jusqu’au bout du voyage. Le Cabochard sera sa prochaine demeure, la mascotte partagera son coussin de bannette.
A pluche !

You are a free man…

13 juillet 2012
Le passage d'un grand cap est toujours un soulagement. Cap Skaghallan

Le passage d'un grand cap est toujours un soulagement. Cap Skaghallan

Même décor, même heure, même météo, mais il y a un petit plus, le brouillard est d’une intensité que je n’avais jamais connu. J’avance dans le coton, le silence m’enveloppe, à 5km de là un trio d’îles que je dois pénétrer, toujours cap au sud. Compas, carte, je me retrouve nez à nez avec la passe. Large de 30 mètres il n’y a pratiquement pas de fond et les trois minuscules terre se réunissent quasiment. Je passe de l’autre côté et croise un patron pêcheur. Il est surpris de me voir là avec une si petite embarcation et de si bonne heure. Nielsen me pose plein de questions, il me fait voir ses prises du jour, de beaux saumons d’au moins dix livres pièce. Il veut m’en donner un mais je ne peux accepter pour plein de raisons. En un clin d’œil j’ai vu que cet homme ne roulait pas sur l’or et qu’un si beau poisson pour moi tout seul c’est trop. Ses silences me touchent, je revis le même moment qu’à Kallviken, on ne se connaît pas mais le golfe de Botnie nous rend frères de mer. Il me demande où je vais dormir ce soir, combien de kilomètres je fais par jour. Il sait que ma journée est loin d’être finie et me lâche l’amarre en me disant « take care, you are a free man ! » (Prend soin de toi, tu es un homme libre !) Je repars gonflé à bloc, je n’arrête pas de repasser en boucle cette phrase : « You are a free man »  yes I’m.
Les kilomètres sont avalés différemment aujourd’hui, je descends vers le sud, je descends vers le soleil. A propos, il tombe des cordes, des murs d’eau s’abattent sur moi mais je chante, je ris, je suis libre, comme les sternes arctiques que je croise. Libre de continuer, de m’arrêter.

Au détour d’un promontoire de granit, une centaine, d’oies bernaches me regardent un peu inquiètes, passer. Je stoppe mon pagayage et leur hurle : «  you know I’m a free man ! » Elles se jettent toutes à l’eau pour aller se planquer derrière de gros cailloux. Je suis euphorique, la vie est si belle. 14h j’ai la dalle et j’ai pas encore mis les pieds sous la table, allez Jo Zef au prochain restau on s’arrête !!! Je pénètre un archipel sous un rideau de pluie et  implore les Dieux des mers et des océans de me trouver un petit endroit bien sympa pour monter mon bivouac. A bâbord je détecte une échancrure, une sorte d’alcôve marine, allez la mascotte on va voir comment est le lieu ! Le paradis sur terre… je beach Immaqa et pars à la recherche du bon coin plat pour y monter la tente. Le tarp (toile qui sert d’abri) est aussi monté et en dessous je monte mon chalet de toile. Ce soir le soleil pointe son nez mais le vent du sud va envoyer certainement ces watts le baro qui est déjà bas vient de faire une rechute. I’m a free man !
Pour les comptables, 30km de fait quand même.
A pluche !

Invite sur terre…

10 juillet 2012
Jo Zef et moi au chaud et à l'abri dans notre petit refuge...

Jo Zef et moi au chaud et à l'abri dans notre petit refuge...

Le baromètre qui chute et rien qui ne se passe, ce n’est pas normal ! Je marmonnais ça dans ma parka depuis quelques jours mais cela me semblait louche. Ouf, me voilà rassuré, le coup de vent est bien arrivé. De grosses rafales et une forte pluie m’ont fait prendre la sage décision de ne pas m’engager en mer ce matin. Découvrir ses limites, d’accord, les dépasser jamais. Emmitouflé dans mon duvet, j’apprécie la pluie tapoter la toile, je mets la radio Mix Mega Full, une sorte de Nostalgie Suède avec une touche d’Energie, mais Frankie goes to hollywood ou les Queens ne valent pas la mélodie de la tourmente qui m’enveloppe, alors je coupe. La différence entre la musique et le bruit, l’émotion qu’elle nous offre. Seul sur un îlot de 100X400 mts je suis devenu robinson. Mais où est mon vendredi se demande Jo Zef ?  Le temps prend une autre forme, une alchimie interne. Aucune information du monde qui s’agite ne peut m’ébranler, couper des hommes virtuels et non vertueux, je suis simplement, un petit « moi ». Ces moments sont des  privilèges immenses, ce n’est pas l’arrivée qui compte mais le chemin qui y mène et sur ma route ces arrêts tempête me ressourcent, me font cogiter. Il y a eu le minéral, le végétal, l’animal et enfin l’homme. Ce dernier et j’en fais parti, s‘est parasité de millions d’indispensables. Nous en sommes les esclaves. Le monde qui ne sait plus que conjuguer au futur, a avalé, englouti le présent ; le vide fait peur. Pourtant une bouteille pleine ne pourra jamais ramener l’eau de la source qui jaillit là haut sur la montagne. Le vent fait plier mon bivouac, mais je suis serein, heureux de pouvoir être cet habitant improbable du caillou si isolé. Ce voyage comme les autres est une initiation, un apprentissage infini, nous naissons pour mourir, mais ce laps de temps passé comme un éclair sur terre, pourquoi ???  J’aime ces colloques, j’en suis l’orateur avec comme seul public un moi attentif. Je décortique mes acquis (éducation, religion, niveau social, expérience) La remise en question rend souvent furieux les hommes ; pourtant sans ce travail, l’âme s’éteint, le matériel ne prend plus le dessus, le pouvoir se retrouve amputé, on a
jamais vu un naufragé se nourrir d’une une malle de dollars. Le conflit mène à la ruine, le dialogue à l’épanouissement. Alors je converse, je m’étale, je me scanne. Les zones d’ombres j’y rentre de plain-pied, je deviens l’explorateur des zones « inexplored » de mon intime vie. Commetout en chacun j’ai mes fardeaux, la jambe en moins peut-être mais des amputations plus sévères, plus perverses, celles qui ne sont pas appareillables. Ces moments d’isolement me font apprécier à leur juste valeur les pourquoi et comment. Philosophe du caillou perdu, les plus grands penseurs n’étaient ils pas des écorchés vifs au passé si rude. Je me suis lancé dans des lectures redoutables,  bonhomme aux réflexions qui bouleversent et qui rasent le bon savoir. Ma réflexion, moi qui ne suis ni
philosophe et encore moins intellectuel : nous vivons dans un miroir, l’éviter est malsain au possible mais à l’improviste le reflet nous arrivera en pleine gueule, on ne peut fuir tout une vie, on ne peut se mentir sans se flétrir. La pluie continue de chantonner, les sternes de pêcher, le vent de virevolter, demain je reprendrai mon voyage, si et seulement si, les Dieux du vent, des mers et des nomades le voudront bien. Je ne suis qu’un invité sur terre.

La plage d’Erik le rouge…

30 juin 2012
Ca y'est, Jo Zef se prend pour Erik le rouge !!!!

Ca y'est, Jo Zef se prend pour Erik le rouge !!!!

Une nuit tranquille, ici la peur du prédateur n’existe plus depuis belle lurette, les derniers ours ont été tués juste après guerre. La flore est a peu de chose prêt, identique à celle du Yukon et de vieux reflexe me reste. Hache toujours à portée de main et une nourriture toujours bien
emballée. Le protocole est moins strict qu’au Canada mais je reste prudent tout de même. 6h20 je déclenche la balise spot de ma géo localisation et prend la mer. Pas une ride, pas un souffle d’air, je file tout doux vers le sud, je profite de cette opportunité pour forcer
la cadence le vent va venir du sud et ma journée est plus qu’incertaine, alors j’avance en ne pensant qu’à maintenant. 8h20 déjà quand c’est calme c’est plus facile, 4,5km/h de moyenne, une super cadence pour le «semi-remorque » que je pousse. 9h20 un feu loin devant moi à terre m’indique que le suroît vient d’arriver, ce sera à mon tour d’ici peu. Je sens de l’air sur mon visage, je scrute l’horizon et j’y détecte une barre plus foncée, j’ai compris ce n’est plus de la brise mais du vent qui arrive. 10h20 le vent s’installe et je deviens un esclave qui
pagaie. J’arrive en fin de péninsule de Pitea, après le cap, la mer ouverte sans protection sur 5 nautiques au moins. Il faut que je prenne une décision, stopper ou prendre le risque de me trouver seul en plein milieu de la tourmente. Tout en pagayant, je détaille la carte qui est
devant moi dans sa housse étanche, je devine une échancrure. Oui, là bas à tribord une tache blanche, une plage ! Je bifurque de quelques degrés et avale les deux kilomètres comme un sprinter. Une anse de sable blanc très abritée du sud, je fais une halte café et après je prendrai ma décision. Ici tout semble calme, pas une brise, les moustiques se lèchent les babines : A table ! Je mets ma moustiquaire de tête et inspecte les lieux, du bois et du calme. Je me délecte de mes deux canistrellis avec un café et cogite. Je vais voir à pied comment est la mer au large. Je reviens rassuré de ma décision, là-bas c’est blanc et pile poil dans ma direction. Je fouille les lieux pour trouver une belle plaque de contre-plaqué qui nous servira de table et à mon retour, je surprends Jo Zef orné de cette magnifique ramure. Seulement 18 kilomètres pour aujourd’hui mais la route est longue alors prudence, prudence.
La mascotte ne serait-elle pas le descendant d’Erik le rouge, par Thor !
A pluche !

Pedalage en image…

26 juin 2012

Juste une petite séquence sans prétention qui vous mettra in-situ… Passage en péninsule de Nordkinn, deuxième jour…

Un unijambiste et une mascotte à Luleå…

25 juin 2012
La solitude, confidente du voyageur...

La solitude, confidente du voyageur...

La routine du matin, déjeuner, plier bagage préparer la nourriture du jour et reprendre le vélo. Yan mon hôte me surveillait, il est venu me saluer. Peut-être à l’année prochaine ! La route est en travaux donc je retrouve le bon vieux gravier. J’essaie de me dissuader de ne pas arriver à Lulea ce soir, trop loin, trop usant, puis le bout de voie rapide à gérer, non c’est sur, pas ce soir, je ne vais pas faire 140km avec 45 kilo de charge en une journée !!!. Je pédale en ne pensant qu’à l’heure en cours, dans 60’ pose café, puis une autre pose biscuits salés … Je me fixe des lieux dits, des ponts de rivière, j’ai 70km avant d’arriver en bordure du golfe de Botnie. Le vent de face ne m’a pas oublié, ouf, j’avais peur qu’il me laisse seul ! 5heures de pédalage pour voir de très loin la mer, allez, je pousse encore un peu plus loin. Je m’arrête je suis cuit et surtout je n’ai pas encore englouti mes nouilles chinoises. Sur la voie rapide difficile de trouver un coin calme, alors je me contente d’un trou qui doit servir de dépotoir ! Entre deux canettes de bières écrasées et des reste d’emballage je mange et me fait manger par des moustiques. Remarquez, c’est l’heure du casse croute pour tout le monde ! J’essaie de m’imaginer : un clochard !!! Elle est déjà bien loin derrière la terre saame… Je reprends mon vélo, 6h effectives de routes plus ou moins 7h30 que je suis parti. Je dépasse le taux syndical et pousse un peu plus loin. De toute façon ce n’est pas sur les bords de cette nationale que je vais trouver mon coin du soir… Alors je continue, 100km, mes fesses me font de plus en plus souffrir, mais je m’évade, je pars dans le pays des rêves et la souffrance se fait oublier, mes jambes elles sont au top. 110km au compteur, un panneau indique : Lulea 30km ! Allez, je tiens ferme je continue. Je ris, je me concentre, je pars en sanglot, dis donc c’est que le passé pédale avec moi !!! Encore 10, je pédale pour les jeunes de bout de vie, leurs visages me brouillent la vue… Allez Frank ne t’arrête pas là, t’es un lâche ou quoi ! Je sais que je vais y arriver ! Lulea!!!  J’y suis, 141km pour conclure l’étape 2. Que de beaux paysages, de personnages attachant croisés. 950 km pour traverser en totalité la terre saame version nord-sud. Je ne suis pas trop fatigué mais le manque de confort de ma selle m’a un poil gâché mes derniers kilomètres. Plan B je vais en changer ou lui mettre une housse en gel ! Eh na !!!

Un peu courbaturé la mascotte s’est extirpée du sac étanche pour se demander dans quoi nous allons nous lancer ces jours suivants ! Chut et rendors-toi…

Je tiens à vous remercier pour vos soutiens, ça fait chaud au cœur. Merci beaucoupsssssssssssssss.  Pour les pôtes de Tseusier ne soyez pas à Crans j’arrive. A Crans-Montana bien sûr… Je sais c’est plus fort que moi… Taïko banzaï, Jo Zef arrive!!! Heu c’est pas pour de suite quand même…                                                                                                                                                              Une petite dépression est en train de glisser sur l’Est de la Scandinavie ce qui va me laisser un peu de répit jusqu’à mercredi pour prendre la mer…Yakakayaker !!!

A pluche.

De vieilles nasses à saumon

De vieilles nasses à saumon

Des paysages qui ne me lasseront jamais... Assis toi et aime...

Des paysages qui ne me lasseront jamais... Assis toi et aime...