Amputé d’une jambe à l’âge de 18 ans Frank BRUNO ne cesse de relever les défis.
Ces derniers se sont déroulés en régions polaires qui le fascinent. Rejoindre la Corse, l’île de son cœur, en partant du Grand Nord va être cette incroyable aventure.
Soit 5300 km uniquement parcourus par des moyens naturels, (kayak et vélo).
Emmitouflé au fond de mon duvet, le seul autorisé à ronfler sous mon tipi est le poêle à bois, dehors c’est l’hiver, quelques part, là-bas ce sont les fêtes de fin d’année, ici c’est le bonheur du temps présent. Au milieu d’une pile de livre « mon » mensuelle Philosophie magazine, vous m’auriez apporté cette lecture il y a quelques années en arrière je vous aurais ri au nez ! Un article m’interpelle : Peut-on vivre plusieurs vies en une ? Considérez les « fondamentaux », qu’il s’agisse de vos amis ou de vous-même ; à savoir : votre lieu d’habitation, votre situation familiale et affective, vos activités professionnelles et vos hobbies. Et posez-vous cette question : dans un an, êtes-vous sûr que rien n’aura changé ?
Ils se nomment entre autre Nicolas, Christophe, Robert, Gilles, des copains qui ont osé le premier pas. Nicolas a laissé son métier de maitre de conférence en informatique pour devenir guide polaire, Christophe a vendu sa voilerie pour l’appel du large et en famille il sillonne depuis les océans, Robert ne supportait plus son divorce et tourna le dos à sa Suisse natale pour devenir trente ans après, canadien vivant en famille au milieu d’une forêt du Yukon, Gilles était ingénieur en nucléaire mais les atomes n’eurent pas raison de ses rêves boréales et il partit pour un voyage extraordinaire de plusieurs années au-delà du cercle polaire. Mais quelle fût l’étincelle pour larguer les amarres ? Pourquoi envoyer balader le passé pour fuir vers le futur, sans savoir, sans connaître ce qu’il adviendra. Souvent un drame, une déception est le fusible qui fait le court-jus, certains n’ont pas eu besoin de cela mais ils sont rares. Des hommes tous différents mais avec un point commun extraordinaire : l’envie de vivre une nouvelle vie. A la fin d’Ulysse de Joyce une phrase revient sans cesse : « certains préfèrent aller jusqu’au bout du monde plutôt que de se traverser eux-mêmes. » Est-ce la rencontre avec soi-même qu’on élude en partant au bout du monde, ou son contraire ? Ma réponse est arrivée depuis plusieurs années, mais vous ? J’ai changé de parka à plusieurs reprises non sans mal, la sécurité est une fausse excuse ; les autres vous engluent, mais l’ « autre » vie vous appelle. Le renouveau est envoutant, prendre son pain tous les jours de sa vie au même endroit doit avoir sa part de beauté mais n’est ce pas grisant de ne pas savoir en quelle langue vous allez devoir acheter votre galette. Le vide de l’inconnu, la découverte du nouveau visage, du nouvel hiver, du nouveau job. Changer de vie ce n’est pas changer forcement de pays mais surement de monde, mettre ses années passées au service de la reconstruction en oubliant les lourdes bottes de la routine. Sans oublier qui on était, devenir ce que l’on est, une richesse, une chance, une aube orangée. Mais les stoïciens et les religieux ne trouveront aucune dignité et respect à cette démarche, ils prêchent la conservation de son intégrité malgré les tempêtes de l’existence et non de se disperser à tous les vents. Ils, je, vous, peut-être, avez changé de monde, pourquoi ? Comment ? A vous… A pluche.
Il y a deux tragédies dans la vie: l’une est de ne pas satisfaire son désir et l’autre de le satisfaire.
De belles tenues pour un beau projet, la mascotte photographe officiel!
Des Cols et des Ecoles est dans les starting blocks. Je crois que je peux endosser le maillot à pois rouge du meilleur grimpeur du col des contres temps classé hors catégorie ! Qu’il est difficile de trouver de la réactivité dans ce monde de faux-cul, un vrai chemin de croix, mais comme je suis positif cette première partie est déjà inscrite au rayon (de vélo, bien entendu) du passé !
L’équipe cycliste est formée, Franck Festor, Hervé Keiff, Jérôme Tant, Dumé Benassi et moi-même. Steve Beck qui devait rejoindre le peloton jette l’éponge son genou valide lui cause de gros problème, mais comme il est de parole il a intégré l’équipe logistique, elle-même composée de Patrick Chiappalone et des incontournables Françoise et Gilbert Lippini à la tête de l’association Adrien Lippini. Laurent Benezech sera le maillot jaune du Team Bout de vie… ( Oui Jo Zef sera là il surveillera ceux qui sont au régime, il a la liste !!!)
En deux mots le départ sera donné lundi 24 juin à 8h de Lucciana au sud de Bastia pour Corte, une belle cote de 55km. A 14h dans l’amphithéâtre de l’université les scolaires locaux participeront à un débat sur la prévention routière, l’échange pourra aussi s’engager sur le sport de haut niveau et le handicap, le président de l’université nous honorera de sa présence, Ludovic Martel sera le lien de cette intervention.
Mardi 25 juin nous serons en pleine action dans la belle montagne insulaire, le col de Vizzavona sera notre supplicié pour rejoindre après 74km Ajaccio. A 18h nous serons reçu au CSJC chemin de la sposata. Film Arcticorsica de 26’ et débat sur la prévention routière animé par l’association Adrien Lippini entrée libre et gratuite selon les places disponibles. Un grand merci à Eric Pasero qui a tout mis en œuvre pour que cette action soit réalisable.
Mercredi 26 juin, encore deux gros cols pour arriver vers 12h escorté par le vélo club du Valinco à Propriano, soit 70km d’effort, l’association Valincap avec entre autre l’infatigable Cathy Terrazonni à sa tête a mobilisé les jeunes de la région pour cette rencontre. ( film, débat.)
Jeudi 27 juin départ à 8H15 de Propriano avec le passage de Sartène, puis le col de Suara via la vallée de l’Ortolo, le col de Roccapina avec une arrivée sur le port de Pianottoli-Caldarello. Une balade de 70km environ. A 14h rencontre des scolaires de Bonifacio pour le débat.
Si vous désirez pédaler avec nous vous serez les bienvenus, sur le Face Book de Bout de Vie il y aura un suivi pas à pas pour nous localiser, inscrivez-vous à ce groupe et vous nous retrouverez sans soucis…
Un grand merci à toutes les personnes qui ont donné de leur énergie pour que des Cols et des Ecoles puissent exister. On ne le saura jamais mais j’espère de tout cœur que cette semaine puisse sauver des vies et quelques bras et jambes !
Les accidents ça n’arrive pas qu’aux autres !
Plan média :
France Bleu Frequenza Mora
Lundi 24 juin entre 7h et 8h deux fois trois minutes.
Vendredi 28 juin en direct du bar le Glacier à Porto Vecchio entre 10het 11h avec mon ami Jean-Pierre Acquaviva qui fût le premier journaliste il y a plus de dix ans à croire en Bout de Vie.
France Inter :
Jeudi 27 juin entre 12h30 et 12h45 dans l’émission Carnet de campagne de Philippe Bertrand
France 3 Corse Via Stella :
Lundi 24 juin reportage assuré par Laurent Vincensini dans le journal des sports du soir.
Tous les jours de la randonnée, un article sur Corse-Matin.
Avec la participation de La Fondation Française des Jeux et AXA atout Cœur.
Le peloton de Bout de vie a plus que jamais besoin de vos encouragements, certain sont un peu stressés devant les montagnes que nous allons devoir franchir, ils comptent sur vous!
A chaque signature on me demande à quand le prochain!!! Je vais rester le pied sur terre et aurais envie de vous répondre: pour l’instant ce ne sont que des écrits, rien de concret avec le protocole d’édition. Donc entre vous et moi un petit extrait de ce que pourrait être le prochain livre… Bien sur vos critiques sont les bienvenues…
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Invité sur terre :
Au fond, c’est ça la solitude s’envelopper dans le cocon de son âme, se faire chrysalide et attendre la métamorphose, car elle arrive toujours.
August Strindberg
Le baromètre qui chute et rien qui ne se passe, ce n’est pas normal ! Je marmonnais ça dans ma parka depuis quelques jours mais cela me semblait louche. Ouf, me voilà rassuré, le coup de vent est bien arrivé. De grosses rafales et une forte pluie m’ont fait prendre la sage décision de ne pas m’engager en mer ce matin. Découvrir ses limites, d’accord, les dépasser jamais. Emmitouflé dans mon duvet, j’apprécie la pluie qui tapote la toile, je mets la radio Mix Megapol, une sorte de Nostalgie Suède avec une touche d’Energie, mais Frankie goes to hollywood ou les Queens ne valent pas la mélodie de la tourmente qui m’enveloppe, alors je coupe. La différence entre la musique et le bruit, l’émotion qu’elle nous offre… Seul sur un îlot de 100X400 mts je suis devenu Robinson. Mais où est mon vendredi se demande Jo Zef ? Le temps prend une autre forme, une alchimie interne. Aucune information du monde qui s’agite ne peut m’ébranler, couper des hommes virtuels et non vertueux, je suis simplement, un petit « moi ». Ces moments sont des privilèges immenses, ce n’est pas l’arrivée qui compte mais le chemin qui y mène et sur ma route ces arrêts tempête me ressourcent, me font cogiter. Il y a eu le minéral, le végétal, l’animal et enfin l’homme. Ce dernier et j’en fais parti, s’est parasité de millions d’indispensables, nous en sommes les esclaves. Le monde qui ne sait plus que conjuguer au futur a avalé, englouti le présent, le vide fait peur. Pourtant une bouteille pleine ne pourra jamais ramener l’eau de la source qui jaillit là haut sur la montagne. Le vent fait plier mon bivouac, mais je suis serein, heureux de pouvoir être cet habitant improbable du caillou si isolé. Ce voyage comme les autres est une initiation, un apprentissage infini, nous naissons pour mourir, mais ce laps de temps passé comme un éclair sur terre, pourquoi ??? J’aime ces colloques, j’en suis l’orateur avec comme seul public un moi attentif. Je décortique mes acquis (éducation, religion, niveau social, expérience…) La remise en question rend souvent furieux les hommes ; pourtant sans ce travail, l’âme s’éteint, le matériel ne prend plus le dessus, le pouvoir se retrouve amputé, on a jamais vu un naufragé se nourrir d’une une malle de dollars. Le conflit mène à la ruine, le dialogue à l’épanouissement. Alors je converse, je m’étale, je me scanne. Les zones d’ombres j’y rentre de plain-pied, je deviens l’explorateur des zones « inexplored » de mon intime vie. Comme tout en chacun j’ai mes fardeaux, la jambe en moins peut-être mais des amputations plus sévères, plus pervers, celles qui ne sont pas appareillables. Ces moments d’isolements me font apprécier à leur juste valeur les pourquoi et comment. Philosophe du caillou perdu, les plus grands penseurs n’étaient ils pas des écorchés vifs au passé si rude. Je me suis lancé dans des lectures redoutables, bonhomme aux réflexions qui bouleversent et qui rasent le bon savoir. Mon analyse, moi qui ne suis ni philosophe et encore moins intellectuel : nous vivons dans un miroir, l’éviter est malsain au possible mais à l’improviste le reflet nous arrivera en pleine gueule, on ne peut fuir tout une vie, on ne peut se mentir sans se flétrir. La pluie continue de chantonner, les sternes de pêcher, le vent de virevolter, demain je reprendrai mon voyage, si et seulement si les Dieux du vent, des mers et des nomades le voudront bien… Je ne suis qu’un invité sur terre ..//..
Etre nomade c'est avoir la planète comme chez soi...
Quiétude de la solitude...
Et si c'était un de mes anges gardiens qui me rendait visite?
Bien sur un chapitre leur sera consacré... Il était une fois...
La pression monte d’un cran, le deuxième stage de survie est sur le point de démarrer, l’équipe est composée aussi de copains amputés, va falloir que je sois à la hauteur.
Véro et Claude nous déposent dans un hameau au pied du massif de Cagna qui porte son beau chapeau de vent du sud, pluie, vent violent et orage sont au programme. Je pèse les sacs qui sont à ma grande surprise plus légers que la normale, l’aventure peut enfin commencer. Le sentier muletier qui mène sur un cul de sac est très glissant, la bruine a bien bossé ! Le brouillard nous emmitoufle, je ferme la marche pour mieux observer mes compagnons, je constate qu’ils n’utilisent que très peu leurs bâtons, pourtant avec un bon usage, 30% d’effort peut être économisé. Au sommet du petit col nous attaquons vraiment, un adieu au beau chemin pour nous retrouver dans un maquis dense et non balisé. La dénivelé négatif est imposant, les arbousiers et bruyères nous barrent le pas, il faut enjamber sans chuter, exercice de style qui demande une grande concentration. La terre noire est gorgée d’eau ; les pluies incessantes depuis plusieurs semaines ont rendu la progression extrêmement « casse-gueule » ! Les chutes se succèdent, j’ai la boule au ventre, il faut que personne ne se blesse ! Aucun « bobo » à déclarer ! Nous tentons une traversée pour rejoindre une forêt de ronces qui a repris du terrain depuis mon dernier passage, le chemin est devenu un torrent. Les mures sauvages accrochent les prothèses, le ruisseau éphémère rend le cheminement encore plus astreignant mais personne ne se plaint. Un petit miracle au milieu des broussailles je retrouve l’embout de la pipette de mon camel back, perdu lors du dernier stage, ma chance légendaire ! Finalement au bout de trois heures d’effort nous rejoignons une piste en terre abandonnée, les corps sont éprouvés et les moignons semblent déjà protester. Une trêve nous est accordée par la pluie, il nous reste encore une petite heure de marche pour rejoindre une ruine en pierre qui nous servira de premier refuge…
Cela fait deux jours que nous marchons, l’équipe est bien soudée, nous avons un bon guide ; la pluie ! Dans un maquis très dense nous trouvons une ancienne aire de charbonnage, la nature a repris ses droits, le premier boulot est d’élaguer ce terrain plat qui va nous servir de refuge pour la nuit. Soudain un vent fort et chaud secoue la canopée, je sens un coup d’esbroufe du ciel, le vent se déchaine, les éclairs nous encerclent, le déluge nous tombe sur la tête. Des tonnes d’eau s’abattent sur nous comme j’en ai rarement vu, le torrent en contre bas, en quelques minutes monte de plus d’un mètre. Je sens qu’une partie de l’équipe perd pied, sans jeu de mots, mais l’autre moitié reste attentive. Je dois me montrer ferme et directif, tout le monde doit s’activer pour monter le camp quelque soit les conditions. Abatage d’un arbuste droit et assez long pour la charpente, nettoyage des cailloux qui envahissent le replat et mise en place des bâches qui nous abriteront. Le montage du foyer est aussi très important, il doit posséder un muret en forme de chevron qui servira de réflecteur pour envoyer un soupçon de chaleur au « survivant ». La bruyère sèche s’enflamme une première fois, la pluie perd un peu de son intensité, mais ce n’est pas connaître le coin, un second éclair nous annonce le prochain round, les flammes ne résistent pas. La rivière augment encore, je ne l’ai jamais vu à cette hauteur, les arbres sont couchés, brisés nous nous sentons tout petits dans ce décor de cataclysme. Trempés comme des castors, le camp est finalement monté, des grands silences en disent long sur l’état mental de certains mais une bonne nuit semi-humide reposera partiellement les corps épuisés. Sébastien le plus jeune de la bande aura droit à une blague de sa bâche qui en pleine nuit se régalera de lui larguer une poche d’eau. Sans ciller il passera le reste de sa nuit à tenter de sécher ses affaires près du feu…
Quatrième jour, sales, boueux, boiteux nous sommes récupérés, la victoire est au bout du chemin. Le stage a été à la hauteur de ses participants, les images de références sont accumulées, certains conformistes nous plaindront par le manque de soleil, mais de la survie ce n’est pas de la randonnée, ni du trekking, la survie, c’est sauver sa peau coûte que coûte, c’est rendre le futile indispensable, c’est trouver le bol d’eau chaude savoureux au même titre qu’un millésime. La même « balade » sous le soleil aurait enlevé l’intensité de se deuxième stage de survie douce Bout de vie.
Pour conclure cette bafouille je tenais à remercier les cinq participants qui ont su trouver de nouvelles limites. Bravo à Christophe, Sébastien, Pierre-Alain, Gaby et Jean- Luc. Un grand merci à David Manise grand « gourou » des stages de survie qui m’a encouragé dans cette démarche de mixité, valide, moins-valide…
J’attends de pied ferme vos inscriptions pour le prochain stage, date à définir…
Marche silencieuse dans la brume et la pluie fine... Marche et rêve...
Que les ronces restent tranquilles, les jambes en carbones arrivent!!!
Jean-Luc et Gaby sourire aux lèvres malgré les difficultés du stage...
Une ruine sans toit pour la première nuit...
Quand la rivière se déchaine, traversée interdite...
Bivouac en forêt, la pluie veut nous tenir compagnie.
Confection d'une pâte à pain qui sera cuite sur une pierre de granit.
Sébastien se révélera très doué pour ce style de vie... Une vocation est née, j'en suis certain...
Christophe affine le montage de son bivouac "bio"!
Les torrents en cru vont rendre leur franchissement encore plus délicat...
Samedi sera le départ d’une nouvelle aventure, le deuxième stage de survie-douce Bout de Vie.
Jean-Luc, Gaby, Pierre-Alain, Sébastien et Christophe seront les braves et valeureux volontaires. Si je devais donner un titre à ces quatre jours d’initiation celui-ci conviendrai à merveille : Douze bras mais neuf jambes !
Les conditions de vie seront basiques, il va falloir s’adapter. En plus des contraintes habituelles à ce style d’expérience certains devront gérer un « truc » supplémentaire, les « guiboles électroniques ». Pendant quatre jours nous n’auront accès à aucun contact avec le « dit » confort, donc pas d’électricité. Gaby et Jean-Luc amputés fémoraux ont des genoux qui demandent une recharge régulière. Ils ont trouvé la parade, ils s’en passeront ! Je trouve ça géniale, le stage part déjà du bon pied !
Les bâches sont déjà roulées, les sachets, de nourriture basique, prêts ! La météo ? Quelle météo !
Je suis sur que de petits messages de soutien juste avant le départ leur donneront du baume au cœur.
Pour la prochain sortie, date à définir, les inscriptions sont ouvertes, pas encore de filles en vu !!! Juste bonne à faire la vaisselle ??? Allez, ont s’inscrit !
Mon deuxième livre semble vous plaire, je reçois régulièrement des félicitations à son sujet et beaucoup m’encouragent à continuer… Je l’ai relu et je lui ai trouvé beaucoup de défaut. Ne nous emballons pas, je vais tenter de mettre sur papier ma dernière aventure mais la route sera longue avant qu’il voit le jour. Pour que je puisse écrire il me faut un esprit tranquille, mais en ce moment je suis en ébullition, j’ai planté beaucoup de graines et elles commencent à germer alors il faut jardiner ! Je vais prendre du temps pour me poser et écrire. Il pourrait commencer comme ça !
Yes, i’m a free Man
Prologue :
Le martèlement de la pluie sur ma tente a bercé cette nuit qui n’est jamais venue. Ici c’est le Grand Nord, ici c’est la terre des excès, deux mois de jour l’été, deux mois de nuit l’hiver. Quelle est loin ma douce méditerranée printanière, mon petit bateau au mouillage me semble un simple souvenir, ma belle doit y être, elle doit songer au rêveur à cloche pied qui va rentrer dans son conte de gosse. Que les trolls se tiennent à carreau, les elfes je saurais les charmer, Erik le rouge ne sera pas assez fort pour m’empêcher de poursuivre ma croisade. Ne plus penser à hier, ne pas songer à demain, ma maitresse se nomme l’instant présent. Que de nuits à déplier des cartes sur mon Cabochard, que de notes sur la route probable pour traverser ces régions septentrionales et ce projet qui voit le jour. Relier le phare le plus Nord de l’Europe continentale au plus sud de la France chez moi en Corse aux iles Lavezzi en utilisant que mes petits muscles et ma jambe de bois ! Les aventures précédentes ne m’ont jamais permis d’arriver à la maison, tel le cheval qui sent l’écurie je sais que malgré l’épuisement l’émotion me guidera jusqu’ aux portes du bonheur. Vivre plutôt que survivre, aimer sans concession, le jour ne m’appartient pas il m’est juste prêté. Mon accident ? Quel accident ? Ah oui je vois ! Une pacotille, une broutille, c’est trop vieux pour que je m’en souvienne, dix ans, vingt ans trente peut-être. Mon bout en moins c’est de la vie en plus, mon corps est en viager, j’ai égaré une pièce mais ce n’était qu’un vieux placard, l’important est de ne pas boiter dans sa tête. Je fonce, je vibre, mes zones d’ombres me servent en cas de lumière aveuglante, rien ne sert de briller si tu n’éclaires personne. Dormir, il faut dormir, mon corps doit, mais ma tête refuse, 5000km droit devant et un estropié qui joue l’aventurier, un bousillé de vie qui veut encore et toujours. Pourquoi, pour qui ? Je ne sais pas, je ne sais plus, en vérité cela doit cacher quelques choses. Pas de revanche, pas d’exhibition, je n’attends rien de tous cela, l’identification des autres ? Surement pas, une reconnaissance par mon âme ; je le crois.
La météo annonce enfin du vrai bon temps : pluie, vent violent, froid et orage de grêle un merveilleux jour de balade en montagne. Il n’y a pas de mauvais temps, il n’y a que de mauvais habits. Mon sac étanche est déjà prêt depuis hier soir, je ne voudrais pas louper cette connexion, une rose rouge y est soigneusement rangée ! Romantique jusqu’au bout de la prothèse l’aventurier à cloche pied. Véro absente depuis plusieurs semaines pour des raisons professionnelles m’a fait parvenir cette fleur, c’est sur que je ne peux la faire dessécher sur mon bateau, sa place sera dans le maquis dans notre camp. Une heure de piste à moitié noyée en 4X4 et enfin je suis à une encablure de mon chemin improvisé. Ce n’est pas de la pluie, c’est un déluge, c’est bien connu en Corse tout est excessif. Je me faufile dans la forêt, le vent devra se contenter de la canopée, le randonneur lui comptabilise les gouttes qui lui bisent le nez. Des tapis de champignons multicolores, je redouble de prudence, une erreur est vite arrivée, il y a quinze jours j’ai en consommé des nouveaux, j’ai vu Jo Zef en forme de libellule et quelques oiseaux comme des éléphants roses tachetés de vert ! Donc méfiance !!! Mon jeux de piste est brouillon la moindre faute d’inattention et c’est parti pour un tour gratuit à se retrouver. Les odeurs m’enivrent mais une idée me revient en boucle. Depuis un petit moment on me demande d’organiser des stages de survie, jusqu’à présent je n’y prêtais pas cas mais l’idée chemine. Donc cette journée est une mise en forme de ce projet. L’idée serait d’amener quatre personnes pendant une semaine en milieu naturel en Corse. Un stage où l’on partagera une vie simple que certains appellent survie ! Une carte, pas de sentier et un apprentissage de progression en moyenne montagne, montage d’un camp, règle basique de vie en forêt avec cueillette et compréhension du monde environnant et découverte du silence. Connaissant le succès qu’ont les émissions douteuses de pseudo aventure, je comprends pourquoi on me le demande de plus en plus. Vous allez me dire mais qui y a-t-il de nouveau ? L’équipe de quatre personne sera composée de deux binômes, jusque là normal, mais ces binômes à leur tour seront composés d’un valide et d’un différent, voilà le « truc » en plus ou en moins, sans jeux de mots ! Attention ceci n’est qu’un projet. Ce stage serait un retour dans le basique, dans un système de vie en milieu naturel, téléphone, Iphone, Ipad, caméra, radio et autres gadgets formellement interdits. Une totale immersion dans un voyage de l’intérieur en laissant pour quelques jours le monde du virtuel et des hommes urbains. Je ne sais pas encore s’il doit y avoir de longues marches ou une vie sédentaire en forêt avec des randos en étoile, j’attends de voir vos réactions, j’en connais qui vont vite réagir, les autres seront un peu effrayés par cette expérience mais je sais qu’elle est à la portée de tous. Pour exemple depuis 11 ans Véro me suit dans ce style de progression, elle n’est pas une grande sportive et encore moins une miss muscle mais elle a réussi à s’adapter en y trouvant beaucoup de plaisir… Les participants devront signer un formulaire stipulant qu’ils se prennent en charge en cas d’accident, je n’ai pas de diplôme de guide de survie. Ce stage sera payant bien sur mais la facture devra être réglée au nom de Bout de Vie, une manière de récupérer des fonds sans cette sensation de faire la mendicité. Pour vous donner envie de venir : tout à l’heure sous une jolie bâche bleue noisette, (couleur inventée par la mascotte) j’ai cuisiné une belle poêlée d’amanites des César avec une galette à base de farine de gland de chêne. Un tapis blanc de grêlon rendait à la forêt un air enchanté, la rose rouge est posée sur un tapis de mousse, bientôt ma binôme sera de retour.
L’aventure ce n’est pas un magazine ou une télé réalité, l’aventure c’est vivre en osmose avec les éléments en se déconnectant de l’indispensable qui deviendra futile. L’aventure c’est le confort de se laver dans un torrent glacial, de découvrir une racine qui sera soupe ce soir, de cacher au fond de sa poche une brindille sèche pour démarrer le feu qui nous réchauffera d’une journée de pluie, l’aventure en vérité c’est ce que les virtuels appellent survie alors que ce n’est que vie.
J’attends avec impatience vos commentaires, s’en suivront les conditions, dates et tarifs.
Quand deux baroudeurs se croisent... Ils papotent baroude...
Je n’avais embarqué qu’un seul livre pendant ma « ramerie » océanique, Arktika de Gilles Elkaim. La houle semblait jalouse de la passion que je prenais à décortiquer le récit des quatre ans à pied, en kayak, en attelage de rennes et de chiens, que ce grand explorateur avait vécus en rejoignant le Cap Nord en Norvège au détroit de Béring en Russie, elle me le faisait durement payer. Quelques mois après, certainement grâce un peu à ce récit je jouais à mon tour le nomade du Grand Nord, je bricolais avec quelques russes pour effectuer le dernier degré du Pôle Nord. Aie je mords à l’hameçon, le reste vous le connaissez. Dans mes rêveries je projetais une rencontre avec Gilles, mais est ce que deux coups de vent peuvent se croiser ? Difficile ! Eté 2011 je suis en repérage en Laponie avec Véro, j’étudie la faisabilité d’Arcticorsica. Dans la région du lac finnois d’Inari, je me souviens que Gilles y avait construit une cabane où ses amis à quatre pattes d’aventure Arktika séjournaient. Nous trouvons la kotta, mais il n’est pas là. Nous lions d’amitié avec Gladys son assistante, et restons quelques jours. Je prends en charge les taches physiques, Véro apprend beaucoup de la vie en milieu polaire. Je me promets de repasser un jour… Juin 2012, je suis en route pour ma longue croisade Arcticorsica, j’ai formé une équipe logistique mais je me suis trompé de candidat. Je devrais dire que se sont plutôt eux qui se sont trompé d’histoire, ici ce n’est pas du virtuel, pas de clique quand tu te trompe, mais plutôt une claque ! Gros coup de colère de ma part le matin, si je suis intransigeant avec moi-même pour arriver à bout de mes aventures je demande à ceux qui s’approchent d’être juste un peu à la hauteur. J’avale ma salive et sur ma journée de repos j’amène mes apprentis au camp. Gladys n’est pas là, zut, décidément ce n’est pas un bon jour. Prêt à repartir, une gamine me demande d’attendre car elle va appeler Gilles. Quelle chance le blizzard va croiser le libecciu ! Des points communs nous devons en avoir et je sais que ce sera une grande rencontre. Gilles est au milieu de son « monde », ses chiens et la nature des grands espaces. Les présentations étant faites je sens que les jeunes filles au pair ont une demande dans leur besace. Mon nouvel ami ne cache rien, et leur propose de soumettre leur requête en public. Elles ont répondu sur le net à un formulaire pour être « apprenti polaire ». Nourries, logées, elles sont là pour être initiées aux rudiments d’une vie avec des chiens de traineaux. Elles sont comme sur des œufs, l’une d’elle se lance, mais Gilles en connait déjà les tenants et les aboutissants. Elles bossent dur c’est ce qu’elles disent et respectent les tâches qui leur sont demandées mais elles attendent de la reconnaissance de leur boss ! La vie à Arktika est rustique, mais cela est précisé dans leur contrat, vie de camp rude pour apprentissage de l’existence de « nomade polaire », elles ronchonnent, elles veulent être valorisées, puis une connexion internet leur faciliterait la relation avec leur amis « facebookien » si loin! Gilles les laisse finir, il sourit et en deux phrases les remet gentiment en place. Pendant quatre ans il a appris seul la vie extrême de ses contrées qui ne pardonnent aucune erreur, il a eu peur, il a eu froid, il a eu faim et pas une seule fois la glace, le vent, les ours, les peuples croisés lui ont offert compliment. Il savait qu’il était apprenti et que seul lui devait savoir si ce qu’il avait fait été bien ou pas. Les deux jeunes filles ainsi que mes deux jeunes hommes partiront ensembles soigner les cinquante chiens du camp, un grand silence qui en dit long. Je suis invité dans sa cabane, il prépare un thé accompagné de quelques biscuits. Petit refuge, mais très bien organisé, je retrouve la rigueur que je m’efforce d’avoir sur mon bateau et ses 6m² habitable. Nous ne sommes pas des intermittents de la vie d’aventures c’est notre quotidien qui est ainsi fait. Pendant que l’infusion réchauffe nos mains je découvre le nouveau rêve de Gilles, un voilier en aluminium pour explorer les mers polaires. Ses yeux brillent, un enfant va voir le jour, il en est le géniteur, il ne connait pas trop sa « mer », mais peu importe une vie lui suffira pour en caresser ses formes. Le nom des étendues salées sont aussi prestigieuses que destructrices. Nous échangeons, nous sommes en connexion. Il cherche un truc en plus pour apporter de l’étoffe à cette future exploration, je lui soumet quelques « différence » comme passager clandestin … En attendant le grand départ 2014, le voilier polaire est prêt à recevoir été 2013 des passagers pour endosser avec un peu plus de modernité les rôles des anciens conquérants de la route du Nord-Ouest. Si l’envie vous frôle l’esprit embarquez le prochain été à bord du voilier Arktika et bonne mer… Ici le programme…
« La guerre, c’est la guerre des hommes ; la paix, c’est la guerre des idées. » Victor Hugo
Mais non le free man n’était pas au fond de sa grotte, il était en train de digérer ces quatre mois de « balade ». Depuis mon retour une question revient en boucle : Qu’est ce qui fût le plus difficile, la partie vélo ou kayak ? Les deux et aucune mon général !
Oui le kayak fût rude car les éléments n’ont pas été des plus faciles, mais le vélo non plus, car je devais affronter les « autres ». Dans les deux cas je relativisais cette adversité, en me disant que ma souffrance endurée était choisie. Au même moment dans le monde, des gamins subissaient la guerre des hommes en uniformes sans pouvoir y échapper. Ce qui ne tue pas rend plus fort, ils deviendront des durs à cuir mais le risque de revanche risque d’être périlleux.
Le voyage comme je le pratique depuis bien longtemps ne me fait qu’effleurer les gens, je suis en contact juste le temps d’un diner, d’une route partagée, d’une plage bivouaquée. Je n’en prends que l’huile essentielle, le côté obscure n’a pas le temps de pénétrer le pèlerin qui s’est invité. Mais le retour me sédentarise de nouveau, il me fige et les avalanches se succèdent. Quand je suis parti sous les drapeaux je rentrais avec un bout en moins, plusieurs mois d’absence. Je trouvais que tout le monde avait changé. Mais ce n’était qu’un mirage la seule personne qui s’était transformée c’était moi. Puis j’ai voyagé de plus en plus loin et longtemps, en revenant de deux ans d’absence je n’arrivais plus à être en connexion avec qui que se soit, je devenais un déraciné marginal. Depuis une semaine je suis de retour sur mon île, les habitudes sont vite revenues, la radio du matin m’apporte les nouvelles « indispensables ». La violence des hommes doit être toujours la même, mais pendant quatre mois j’ai vécu dans une bulle, aucune info de l’extérieur ne m’avait atteint. Les dépêches me sont insupportables, le fric, le pouvoir gangrène notre monde, « Mon » île, « ma » plage, « ma » montagne. Les hommes s’entretuent ! Cela ne me touche plus : «Tuez vous- les gars, de toute façon c’est notre destin de mourir », mais une vie est trop courte pour se trucider pour quoi que se soit. Depuis quelques jours les médias insulaires insistent sur le futur derby Ajaccio-Bastia en football. Il faut que le peuple corse démontre un fairplay pour que les continentaux voient en nous des insulaires unis. Je dois être un vrai mouton noir, ce n’est pas aux autres qu’il faut le démontrer mais à soi même. S’aimer pour pouvoir être aimé. Encore ce matin la Corse a offert au monde entier sa violence, alors si dimanche les bleus siffleront les rouges je ne vois pas ce que les chinois penseront de plus ou de moins de nous…
Je me recrais ma bulle, je bosse sur mon bateau, reprend doucement mes entrainements vélo-kayak, me remets de ce beau périple et allume une bougie parce que cela me fait plaisir. Je n’ai pas trop envie de causer, d’expliquer pourquoi je suis parti, pourquoi je suis revenu, quel sera mon prochain défi… Je profite d’un bel automne qui finalement se rafraîchit et me donne les moyens de repartir dans la nature sans avoir à affronter les « autres ». N’y voyez pas de l’amertume, mon petit bateau est bien planqué et rare est celui qui y passe. Le seul visa délivré est pour ma « Vrai » et quelques élus. Je suis heureux d’être un « free man », je dors en paix, mes rêves se réalisent. Le mot aventure y reçoit quelques superlatifs : solitude, partage, engagement, échange, réflexion … Donc pour revenir à la question initiale qui a ouvert ce billet. Quelle fût la partie la plus rude, vélo où kayak ? Le retour mon général, mon prochain défi !!!