Enfin le bonheur…

31 août 2012
La piste cyclable R1, un vrai bonheur...

La piste cyclable R1, un vrai bonheur...

Je quitte avec un peu la boule au ventre la ville de Northeim, est ce que ma cheville va tenir ? Il a tellement plu cette nuit que la brume a envahi la plaine avec le soleil qui pointe le bout de son nez. Piste cyclable à l’infini je vais toujours au sud. Je sais que j’ai un massif à gravir ce sera le premier col depuis Stockholm, je dois me concentrer sur mon tendon d’Achille, molo, molo. Je bois encore plus, une bonne gorgée tous les quart d’heures. Il n’y a que comme ça que je peux récupérer. L’acide lactique et urique doivent s’évacuer, l’eau draine les tendons. De chaque côté de la route de petites montagnes, j’ai bien fait de passer par cette vallée, je n’ai pas envie de forcer aujourd’hui, mais il y aura un massif à gravir. Je m’applique, je ne dois pas forcer, tout en douceur, je suis super concentré. Le dénivelé est imposant mais la route est déserte, je fais mouliner les jambes, je surveille la moindre douleur, pour l’instant rien ! Je poursuis, une heure de montée, les 12° du matin tombent à point, je ne souffre pas  de la chaleur. Finalement à 7km/h j’arrive au sommet sans la moindre douleur, un grand plat et le dessert, une magnifique descente de 20km. Je suis heureux comme un gamin, j’enchaîne les épingles et retrouve le moral. Mais ce n’est pas gagné, je dois rester concentré sur ma cheville. Les kilomètres s’enchainent, cette journée me semble bien partir. Je rejoins une petite ville et m’engage sur une piste cyclable qui comporte une indication R1 ! Je m’aperçois qu’elle me mène vers la ville de Kassel. Quelle paix, la route suit la rivière Fulda, pas l’ombre du moindre véhicule. Je me dis qu’avec un peu de chance je pourrais même traverser la grande ville sans avoir à affronter les carrefours et méandres urbains. Yes men, je passe en douceur mais où va cette piste que je suis ? Un panneau ! Je vais prendre mon temps pour comprendre. Une série de voies cyclables traverse la région jusqu’à Heidelberg soit 200km plus au sud, il suffit de suivre les repaires. Ma joie est trop forte pour que je la contienne, je lâche un cri de sauvage, aie je suis en ville !!! Des cyclistes arrivent, ils m’expliquent plus en détail le système de cette « voie royale », cette nouvelle me donne une pêche d’enfer. Je roule sur la R1, je ne m’arrêterais plus de pédaler. Bon cela, fait 90 bornes que je roule, faudrait penser à trouver le coin du soir. Un Vététiste me double, mon barda intrigue, on papote tout en roulant, il me demande de le suivre, un camping au bord de la rivière n’est plus très loin. 103km au compteur, le tendon qui ne  s’est pas réveillé, première journée sans pansement sur le moignon et la coalition « Q-selle » qui trouve le bon compromis, elle est pas belle la vie ! Comme dans le sud de la Suède je suis la seule tente au camping ce soir et pas la moindre pluie dans les parages… Mon intervention hebdomadaire de 17H40 avec France Bleu Frequenza Mora, me trouvera avec une patate énorme. Normal c’est le pays !!!

A pluche !

Nous sommes tous différents…

30 août 2012
Le gout de l'effort retrouvé par Cathy... Bravo

Le gout de l'effort retrouvé par Cathy... Bravo

Vous en prenez l’habitude quand je fais un break je deviens « philosophe », à cloche pied cela va de soi. Bien que coupé, « jeu de mot d’amputé », des télés, infos, net je sais que les paralympiques ont commencé. Je suis un peu la bête noire des instances de la Fédération Française Handisport, malgré que je fasse parti moi aussi de la famille des différents. Mon refus d’adhérer est simple je trouve absolument scandaleux que les JO et les paralympiques soient séparés de plusieurs semaines. Il est inadmissible que les athlètes soient divisés de la sorte. Les JO font parti des événements sportifs les plus suivi au monde. En terme de retombé pour le handicap cela serait un pas de géant en avant. Ok, ceci n’est que la part public mais je crois que le plus important serait la richesse de la mixité des athlètes. Ne pensez vous pas que jusqu’à la fin de leurs jours ceux qui ont concouru avec Oscar Pistorius ne pourront l’oublier. Quand leur carrière sera finie et qu’ils auront dans les moments de leur vie des doutes, une pensée les ramènera au jour où un homme avec deux jambes en moins les avait défiés. Bien-sur la mixité pure n’est pas possible un gars en fauteuil va plus vite qu’un bipède mais mélanger les épreuves serait un bienfait pour tout le monde. Le jour des finales du 100mts je verrais bien les non-voyants puis les valides suivi des amputés ou autres. Sportifs, public découvriraient que ces gens sont plus qu’ordinaires, ils ont la passion du sport et s’en donnent les moyens pour arriver au haut niveau. J’aime cette définition qui résume notre existence : une batterie qui donne de l’énergie n’est que l’union d’un plus et d’un moins. Pour ceux qui me suivent en 2009 j’ai coaché les hockeyeurs du GSHC, encore à l’heure actuelle des joueurs m’appellent et notre relation les a boostés dans leur métier de sportif de haut niveau. Mais la croisade est compliquée ; un exemple parmi tant d’autres : Je connais beaucoup de monde dans le milieu du football, Lizarazu n’est pas le parrain de l’association par hasard, en discutant à bâton rompu avec les instances de la FFF, je sais qu’elles aimeraient faire intervenir des gars comme moi pendant les mises au vert des footballeurs, mais la peur du quand dira-t-on les empêche ce type d’expérience. Quel dommage ! Un gamin qui se retrouve milliardaire en faisant un sport ne peut être que chambouler par ce type de nouvelle vie et la remise en question par une personne « différente » serait bienfaitrice, pour son présent et futur. Donc les paralympique vont débuter, des titres, des déceptions, espoirs, désespoirs, une vie de sportif à part entière.

En créant bout de vie en marge de la FFH, il y a presque dix ans je ne pensais pas trop à la réussite de ces stages, mais pourtant à l’issue de chaque semaine effectuée, quelques individus en sortent changés, sur ce blog je vois régulièrement passer les commentaires. Hier j’ai pu enfin avoir accès à mes mails et découvert une super photo de Cathy qui après 22 ans de doute a pris le taureau par les cornes, amputée tibiale double elle est remontée sur un vélo pour repartir de plus belle. L’esprit de groupe peut efficacement remonter le morale des troupes. Je ne peux oublier ma détresse il y a trente ans quand je me suis retrouvé sur la touche pour un bout perdu, la première personne qui m’a remué les fesses était René mon prothésiste qui après plusieurs semaines à ses côtés m’a démontré que c’était possible puisque lui aussi était « différent ».

Oui, nous sommes tous différents…

Langsam, langsam…

29 août 2012
Un belle maison typique...Un beau vélo avec une roue neuve et costaud...

Un belle maison typique...Un beau vélo avec une roue neuve et costaud...

Grasdorf, encore un très bel accueil même si le coin est un peu tristounet. Le patron de la pension m’accompagne, il est très touché par mon périple, mon histoire et sa poignée de main en dit long sur ses sentiments envers ma croisade. Je dois me concentrer sur ma cheville, je dois être vigilant, pas d’à-coup et encore moins d’efforts inutiles. Ce matin elle est en voie de guérison je n’ai plus mal et l’hématome a franchement diminué. Je file tout doux vers le sud. La région devient vallonnée et les côtes se succèdent. Je prends mon temps, je me suis fait un choix de route calme et paisible. Loin des voies rapides qui sont de vraies labyrinthes à contourner. Je ne dois plus regarder mon compteur, la vitesse, la moyenne aux orties, je dois pédaler en douceur. Je dois rester concentré et souple. Je visualise mon tendon, je lui envoie du positif, je me masse en pensée. Au bout de deux heures de dénivelé pas la moindre douleur. Pourvu que ça dur. Pour ma pause café, je m’arrête dans une boulangerie d’un hameau sortie du temps. Maison à colombage avec une sérénité que je n’avais encore senti depuis mon arrivée en Allemagne. Je m’offre une sorte de crumble aux cerises avec un vrai jus de fruit. Je me sens bien, serein, la route m’offre une longue ligne droite en descente, je laisse filer. I’am a free man ou non ? J’arrive dans la petite ville de Bad Gandersheim, un claquement de ma roue arrière ! Oh non ! Je stoppe tout, encore un rayon de brisé !  Le bourg est imposant, je me doute qu’il doit bien y avoir un réparateur de vélo. Je tourne un peu en rond, ici personne ne parle anglais et quand j’ai le malheur de sortir le peu de germanique que je connaisse, ils se lancent dans de l’explication philosophique wagnérienne, en bref je suis paumé ! Finalement, il est là mon réparateur. Trois vélos au milieu de casseroles et épluches patates électriques, je ne suis pas sur du mécano en or. Il me reçoit mal et semble ne pas vouloir m’aider, je tente toutes mes cartes mais rien à y faire.  Auf wiedersehen et je reprends ma route avec un rayon en moins. Je suis à 22km d’une petite ville, je n’ai pas le choix c’est là ma solution. Je tente de ne pas me perdre dans mes pensées, le plus important est de ne pas réveiller ma blessure, alors, « langsam » ! Bien sur le seul village que je dois traverser est pavé à l’ancienne, je serre les fesses, pourvu que rien ne « pète » sur mon lambeau de roue. Finalement je me retrouve à Northeim sans problème et sans bobo au tendon d’Achille. Ce magasin me semble une usine à vélo, une chaîne de mécano et des bicyclettes de tous calibres. Le boss me répète ce que Mike m’avait déjà dit trois jours auparavant, mes roues ne sont pas assez costauds pour le poids que je transporte. J’abdique et met à la poubelle ma roue arrière pour une plus solide mais plus lourde, j’en profite aussi pour me faire changer le pneu avant. J’ai une petite pensée pour mes préparateurs bastiais qui m’avaient affirmé que ces roues étaient indestructibles, j’arrive les gars, j’arrive ! Encore une fois je tombe sur des gens très chaleureux et juste en face de moi je décrypte un panneau qui semble parler de clinique du sport !  Un peu plus loin une pension qui appartient un grand ami du marchand de vélo !!! Un plus un égal ? Je file à la « klinik », le médecin est dispo, elle m’ausculte la cheville, la gauche bien-sur… c’est plus fort que moi ! Pas de souci de déchirement, d’hémorragie et tout le tralala, juste un début de tendinite. Me voilà rassuré, vous aussi, ok on l’est tous. Je dois boire plus, c’est le cas typique d’une déshydratation. Mais je dois corriger une autre faute de ma part. Dans mes efforts quotidiens je dois prendre de la protéine mais mon erreur est que je me suis gavé de viandes rouges et charcuteries qui forment l’acide urique. Dans mon quotidien je suis quasiment végétarien et ce surplus de viande m’a irrité le tendon. On apprend tous les jours mon bon monsieur. Je vais tout stopper pour uniquement prendre des œufs, du poisson ou du jambon blanc. Donc je suis à Northeim dans une petite pension tranquille et vu que demain il annonce de fortes pluies je vais faire un break pour repartir de plus belle vers le sud après-demain… j’ai pris le temps de lire tous vos messages, merci du fond du cœur, vous êtes sacrément fidèles. Je vous embrasse bien fort, même ceux que je ne connais pas encore.

Le présent est cadeau !

La route des pommes de terre.

29 août 2012

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Une bonne nuit pour récupérer et un petit-déjeuner copieux et me voilà de nouveau parti. Hier soir j’ai méticuleusement pointé mon chemin d’aujourd’hui. Je n’ai pas volontairement un GPS de route mais un avec une cartographie précise qui me permet de connaître ma position. Se perdre dans les méandres d’une ville sont des situations que je veux absolument éviter. Le ciel est gris mais mon cœur est ensoleillé. Si chez nous nous avons la route des vins dans beaucoup de régions ici je pourrais l’appeler la route des pommes de terre ! Chaque ferme a son logo de patate stylisée, des remorques ont des monceaux de fécules. Le plat pays « teutonique » me permet d’avancer sans trop m’épuiser, je dois rouler à 90% sur des voies réservées aux vélos, un réel confort. La route est encore longue, elle vient souvent me noircir mes efforts, il faut que je ne vive que kilomètre par kilomètre. Le vélo tourne bien, hier Mike semble avoir fait un bon travail. La plaie de mon moignon commence à cicatriser mais le souci majeur est mon tendon d’Achille. Par moment il me fait souffrir, peut-être une sorte de tendinite. Je bois beaucoup et je surveille mes urines, elles doivent être blanches. Je positive, le vélo est réparé, le moignon est en voie de guérison, il n’y a qu’à surveiller ma cheville. Mon système de pointage par GPS me rassure, je pédale sans peur de me perdre. Les carrefours repérés, je sais de suite quelle est ma prochaine direction. J’avance sous une pluie fine intermittente, tant que cela reste comme ça, cela ne me gène pas. Les bornes s’égrainent, j’avance vers le sud. Je rentre dans la ville de Peine et loupe un carrefour car je suis trop en confiance et crois avoir assez visualisé la carte. Je suis devant l’entrée de la voie rapide, demi-tour. Je râle, je peste, je dois être encore plus concentré. Finalement, la ville est dépassée, c’est toujours bien d’avoir la ville de « Peine » derrière soi ! Je reprends ma « pédalerie », ma cheville par moment me rappelle à l’ordre, j’essaie tout en pédalant de lui pratiquer des étirements, ça à l’air de marcher. La première côte, le vent du sud s’est levé violement, je suis à la ramasse, je suis carbonisé. Le zef me mine l’esprit, je me doute qu’au sommet une belle descente va m’amener à mon point de chute pour ce soir. Effectivement je file, mais mon tendon me fait souffrir. J’arrive dans le village de Grasdorf, mais je veux avancer encore un peu, alors je suis mes points GPS. Je suis à la hauteur d’un camping, il est sordide ! Planter ma tente dans un terrain clôturé avec plein de monde autour de moi me désole mais au moins il me donne une sensation de liberté ! Je poursuis ; une pension sur ma droite mais elle est fermée alors j’avance. Il me tarde d’arrêter, mais le village de Holle en est un : (holle signifie trou en anglais !) Je contourne une colline, un gars sur un chantier me conseille de poursuivre juste après le pont ! J’ai compris j’ai fait une boucle pour retrouver mon zimmer de Grasdorf !!! 12km de perdu !!! Je me déshabille et constate que l’intérieur de ma cheville a un hématome. Je prends une longue douche et plutôt que de rester droit sur une jambe, puisque j’ôte ma prothèse pour me laver, je m’assois dans le bac et me masse longuement la jambe. Il me semble que cela lui fait un bien incroyable. Fatigue, blessure, j’ai subitement une baisse de moral incroyable. Le village est bien triste et ma chambrette a les couleurs du coin, gris cendré ! Je continue mon massage sur le lit, je vais chercher très profondément pour retrouver un peu d’espoir. Je me dis que si je suis drastique avec mon inflammation, cela devrait vite partir. Il faut que mon mental soit à la hauteur de ce que la guérison va me demander. Pour me donner un coup de pied aux fesses, j’allume mon GPS et constate que la France est à 370km à vol d’oiseau. Je suis congelé alors qu’il fait 21°, la fatigue tente de me saper le moral, je dois penser positif. Je vais me coucher très tôt et demain la route sera encore plus belle qu’aujourd’hui. Entre vous et moi quand c’est comme ça les mascottes ont droit au même oreiller que le mien. Ouais, je sais un sale gosse et rien d’autre le cabochard.
A pluche !

Lonely planet de juillet-août 2012

27 août 2012

Lonely planet de juillet-août 2012

Corse matin

27 août 2012

corse matin

Les dames de la forêt…

27 août 2012
Les mascottes ont rencontré un collègue éléphant...

Les mascottes ont rencontré un collègue éléphant...

Dormir dans un endroit calme sans avoir l’oeil sur des fadas ça repose le cycliste soupe au lait. Un vrai petit déjeuné de routard, ça me change un peu de mes poudres même si ce sera un peu plus difficile à digérer. Je reprends la route toujours sud, le dérailleur « déraille » et cela me chiffonne, j’ai encore quelques kilomètres à parcourir. La route est plate comme je n’avais jamais vu et je me surprends à rouler avec une moyenne au-delà des 22km/km du jamais vu avec mon poids-lourd. Des éoliennes en file indienne et chaque maison avec le toit recouvert de panneaux solaires voltaïques, comme quoi quand on veut on peut. Je retrouve le sourire mais je dois régler mon vélo. Je choisis de rentrer dans la ville d’Uelzen, il y a le mot zen, c’est bon signe ! Une charmante demoiselle en vélo m’amène au mécano-vélo du coin. Ici c’est impressionnant mais tout le monde roule en deux roues, vu ma dégaine pas besoin de leur dire que j’arrive de loin, ils laissent tout tomber et s’occupent  de ma bicyclette. Ils me demandent depuis quand la cassette saute, depuis Travemunde où je me suis fait changer les rayons cassés ! Mike au look de biker, en deux temps trois mouvements me trouve mon problème. En remontant ma cassette le mécano précédent a tout simplement oublié de remettre une entretoise entre deux pignons, la chaîne n’avait plus la place pour s’accrocher. Aussi simple que ça ! Il remonte tout méthodiquement et me voilà avec un vélo tout neuf. J’aime bien tailler la bavette avec ce type de personnage, on parle compétition, depuis qu’il a arrêté il a pris du poids et voudrait bien reprendre mais toutes les excuses, lui en empêchent. Un lien de leur boutique www.bikemaster-ue.de Il m’apprend pour Armstrong, je n’en démords pas, pour moi il sera toujours un grand champion. Je reprends le chemin sans ce souci de chaîne qui saute, ça change la vie. Une fois de plus j’ai demandé si je pouvais planter ma tente dans une forêt sur ma route. La réponse est catégorique, non car c’est trop dangereux !!! J’ai dormi au milieu de grizzli pendant des semaines, de loups, sous la neige et la glace par des températures négatives hallucinantes et on me dit qu’ici en Allemagne c’est trop risqué !!! Je sors de la ville et reprends ma « pédalerie ». Depuis 60km je suis sur une voie cyclable sans être tout le temps à l’affut du chauffard qui va me frôler, un vrai plaisir. J’attaque ma première côte, ce n’est pas les Alpes mais une belle montée. Toujours sur ma piste « privée » je taille ma route, la forêt est belle sombre, je me vois bien planqué au coin d’un feu. Tiens un camping-car sur un chemin de terre ! Il a l’air en piteux état le van. Encore un deuxième de même condition, c’est bizarre ce genre d’épave dans ces jolies forêts ! Un troisième, mais on m’avait dit que c’était dangereux le coin ! Encore un autre. Il y a quelqu’un, je m’arrête. Oh nom de Zeus !!! De peu je tombe du vélo, une « pépé » à moitié nue descend du fourgon ;  je ne sais plus où me mettre. Eureka j’ai compris pourquoi la forêt est dangereuse un repaire de prostituées et certainement tout ce qui va avec ! Va prendre froid la demoiselle, moi je lui tire ma référence et taïo ! C’est bon la mascotte, je t’expliquerai un jour le cursus scolaire de ce genre de minette. Rendors toi, ce n’est pas un coin fréquentable. Ces pauvres filles viennent du fin fond de l’Afrique pour un eldorado et les voilà à risquer leur peau pour quelques détraqués. J’appelle ça la solitude urbaine. Je me fais un break sur un parking pour me gaver de ce que ma boîte en plastique a pu engranger ce matin au buffet de l’auberge. Des routiers de l’Est sont là ; eux aussi me font peine, à voir leurs têtes ils doivent avoir quelques milliers de kilomètres au compteur. Je poursuis, je me sens de nouveau bien dans mon raid. La nuit de Travemunde oubliée, le vélo réparé et mes petits bobos physiques qui semblent régresser.  Au 100éme kilomètre je décide qu’au prochain coin je m’arrête. Mais non pas en forêt ! L’Allemagne a un réseau pour cyclistes et les nuits sont très bon marché, pour exemple hier soir une nuit en demi-pension avec un vrai diner cycliste et petit déjeuner de même acabit 48 euros. Je vais trouver le jumeau j’en suis sur. Mais le village n’en possède pas, un tailleur de pierre attire mon attention. Un métier en voie de disparition, Peter est robuste et son coup de main démontre des décennies de pratique. A l’entrée de son atelier, je vois une dalle gravée du mot « zimmer ». Je pense que c’est une commande. Nous discutons de son métier et moi de mon voyage. Sa femme arrive et je comprends avec un temps de retard qu’ils ont une chambre libre pour le voyageur que je suis, zimmer, voulant dire chambre. Dans un endroit charmant je me refais une santé. Petite cuisine à disposition je vais me préparer un super diner, non pas de crêpes la mascotte, trop lourd. Salade, riz et viande.
I’m again a free man !
A pluche !

Le croissant du Dimanche…

27 août 2012
Les gouttes de pluie tapotent au carreau, elles n’ont pas l’habitude de me voir en « vitrine ». Au fond le fleuve Elbe.

Les gouttes de pluie tapotent au carreau, elles n’ont pas l’habitude de me voir en « vitrine ». Au fond le fleuve Elbe.

La roue arrière réparée je peux enfin reprendre mon chemin mais ce brave mécano a dû bricoler mon dérailleur qui « déraille » plein pot ! Les molettes de guidon règlent les problèmes en partie mais je vais devoir passer chez un technicien pour qu’il fasse un  sérieux contrôle. Je ne vous parlerai pas de la nuit cauchemar que le camping a vécu. Des
voyous en devenir sont venus en bande y mettre la zizanie, décidément j’attire les rigolos. Des piles de bières entassées, ils décident que le terrain est en leur possession, nous sommes 4 tentes pas plus et je sens la moutarde me monter au nez. 22h je leur rends visite avec ma frontale, je me jure, me promets que je ne m’emporterai pas. Pas mal imbibés de bière, ils tentent la provocation, l’un d’eux essaie de me jeter une canette au visage, j’esquive. Désolé c’est de l’autodéfense, il s’en prend une ! Le calme revient, je me sens merdeux, sale, je ne dois pas agir comme ça, mais je l’ai fait quand même. Je leur ai promis une raclée s’ils osaient continuer. 23h cela devient insupportable, ils deviennent dingues, jettent tout par terre et font un raffut intolérable. J’interviens, ils me reçoivent en me jetant chaises et table. Un détail qui a son importance, quand je suis dans ce contexte, je deviens un bout de caoutchouc difficile à attraper. Un quart d’heure qu’ils n’oublieront jamais. Mais quelle désolation ! J’ai du mal à me rendormir, les questions affluent, aurai-je du laisser faire ? Est-ce que plus de dialogue de ma part aurait fait changer les choses ? Je ne sais pas, je ne suis pas un saint non plus, mais je refuse de plus en plus de perdre contrôle et mon énergie pour des gens en pleine déchéance. Mea culpa, j’ai encore donné des « gnons » ! 6h30 j’en croise sur la route, ils titubent. La ville de Travemunde et Lubeck se touchent et les quais de commerces brouillent ma carte. Je me retrouve dans une voie d’autoroute. Ca y est, ça commence. Je tourne en rond comme une mouche. Un bus comprend, le chauffeur me demande si je veux de l’aide ! Oh oui mon bon monsieur. Ici les transports en commun ont une remorque pour embarquer vélos et mobylettes, je charge mon barda et il m’amènera hors de Travemunde. Pour prendre la route sud, son explication est trop compliquée pour ma pauvre compréhension basique d’allemand et je me repaume une deuxième fois. Un homme en vélo est à ma portée, il comprend et sent mon désarroi, il me demande de le suivre. Nous empruntons un chemin de forêt pour retrouver la bonne direction. Au moment de partir je lui serre chaleureusement la main, il me demande d’attendre. Il sort d’un sac en papier un croissant et me le donne. Das ist ein franzüzich (à voir sa vraie écriture) « croissant ». Il s’éloigne, la grosse brute que je me sens ce matin a les yeux qui s’embuent. Je me remets en question, suis-je un mec bien ? Hier soir j’ai mis une correction à des merdeux en manque d’adrénaline, ce matin coup sur coup, sans jeux mots ringards, on m’aide spontanément. Mon périple ne me laisse pas trop le temps de réfléchir. Ca y est je roule plein sud, on m’avait promis de belles routes avec plein de voies cyclables et bien c’est vrai. Mais voilà, devant moi sans aucune indication au préalable, une déviation, la départementale n’existe plus ! Je suis méthodiquement le panneau qui m’amène doucement mais surement sur l’autoroute, encore !!! Mais je le réalise que quand je suis dessus, je n’ai plus le choix, la carte m’indique que j’ai 5km pour reprendre une sortie et contourner les travaux. Je me fais klaxonner comme jamais je ne l’ai été, je pédale sur la voie d’urgence comme un dératé pour sortir de ce cauchemar. Finalement je suis sain et sauf, je peux reprendre ma « pédalerie » en toute tranquillité sur de belles pistes cyclables. Je suis secoué par ces dernières heures, cela en est de trop pour le pauvre nomade errant. La route est plate, j’arrive à tenir une super moyenne de 19km/h avec mon « semi-remorque à deux roues ». Le vent devient violent de Sud-ouest, mais les pistes cyclables sont bordées de haies qui m’abritent et me permettent d’avancer sans trop en pâtir. Le ciel se charge de plus en plus, la pluie nous rejoint mais elle est encore timide. Sa sœur suédoise lui avait parlé de cet équipage atypique et elle voulait nous effleurer de ses propres gouttes ! Là-bas c’est un déluge, pour nous ça va. Au 93éme kilomètres une auberge « vélo » nous fait un petit clin d’oeil. J’en avais entendu parler et cela me tente. Juste à temps pour mettre mon deux roues au garage que l’orage se déchaine. D’une chambrette qui domine le fleuve Elbe, je peux enfin cogiter aux derniers événements que j’ai vécus. La pluie tape au carreau, ok on se verra une prochaine fois, laisse moi en paix, j’essaie de comprendre des trucs tordus d’humains. La violence et les mauvais gestes ne font pas grandir ; je vais devoir m’appliquer encore plus pour choisir mes arrêts et éviter ces situations intolérables de ma part. Puisque devant moi coule l’Elbe, je ne peux m’empêcher de saluer Thierry Corbalan et son équipe qui va tenter le 1 sept la traversée entre l’île d’Elbe et la Corse en mono palme. Technique de nage où l’utilisation des mains est interdite. Ouais Jo Zef on surveillera s’il ne s’en sert pas !!! Allez à son arrivée, vous n’aurez plus envie de prendre la voiture pour faire 500mts ou de vous plaindre pour un p’tit bobo. Allez Thierry, tu ne le fais pas pour une cause, nous sommes la cause !!!
A pluche !

Un bout de vie à Travemunde…

25 août 2012
Le convoi d'anges heureux a enfin retrouvé son carrosse...

Le convoi d'anges heureux a enfin retrouvé son carrosse et le soleil ...

Petite habitude de cyclo-nomade, un contrôle visuel de l’engin avant le couché. Aïe, trois rayons de la roue arrière sont cassés ! Depuis hier je sentais bien un « truc » bizarre, mais les camions et ma volonté de traverser la Baltique au plus vite m’ont fait occulter l’évidence d’un problème. Frontal en tête et sac de secours, vélo-bricolage, étalé sur la pelouse, je tente l’aventure. Je démonte la roue mais je m’aperçois qu’il y a plus de dégâts que prévu, le disque du frein et le dérailleur sont voilés et je m’apprête à parcourir 2000km. Le boss du camping, Yan est encore à l’accueil, ici c’est le pays du vélo, il doit bien connaître un réparateur sérieux. Encore un élan de générosité, j’ai rendez-vous demain à 10h pour être convoyer au « cyclologue » ! J’en profiterai pour récupérer ; je ne suis pas en retard donc je n’aurai pas à cravacher pour rattraper cette imprévu. Discipline allemande, à 10h je charge mon vélo sur son camion. Le mécano est comme je les aime, pas trop parlant mais très observateur. A 13h il sera prêt. Effectivement je récupère mon compagnon de route révisé et prêt à nous porter toujours plein sud. Je glane quelques infos sur le pays que je connais mal. Le camping sauvage n’est pas toléré et les amendes sont fortes pour qui tenterai l’interdiction. Je suis curieux pour les routes, je n’ai pas du tout apprécié celle du sud de la Suède. On me rassure aussi, le pays est très bien aménagé en piste cyclable et j’y trouverai du plaisir à le traverser. La communication est plus facile, mon allemand est bien meilleur que mon suédois, malgré qu’il ne soit que basique, mais je suis heureux de pouvoir échanger plus facilement. La pluie est toujours au rendez-vous mais je n’ai pas envie quelle me gâche quoi que ce soit, j’ai un boulot à faire et je pédalerai vers la méditerranée. Un petit coin de ciel bleu serait bien sur le bienvenu mais je ne vais pas faire le difficile et prendrai ce que l’on me présentera. Dans mon journal de bord cela faisait un moment que je voulais vous narrer cet échange. Au petit port de Grisslehamn en suède pendant la partie kayak, j’ai été autorisé par des gens à planter ma tente sur leur vaste terrain. Dans l’après-midi il était venu avec de la famille et des amis me rendre visite. Un gamin accompagné nous rejoignait, son tuteur m’informait de suite que cet enfant était atteint d’autisme lourd. Cette pathologie plonge l’individu dans un monde si profond et personnel que personne ne peut communiquer avec. Mais voilà ! Le petit homme s’approche les yeux rivés au sol, jusqu’à me toucher, il remarque que j’ai une jambe artificielle. Son visage se lève, il rayonne et explose de rire, ce qui me fait extrêmement plaisir. Il prend son pouce gauche avec sa main droite et l’encercle avec ses doigts, il me le pointe en me regardant droit dans les yeux. Je m’empresse de faire la même composition et tout doucement nos deux pouces enfermés de mystère se touchent… Une fraction de seconde nos deux mondes pourtant si différents se sont croisés…

Voilà mes amis encore un bout de vie partagé. Je vais reprendre la route et chaque coup de pédale va me rapprocher de mon but. Des fois je me pose la question de ce qu’est ce but. Arriver en Corse ou comprendre les troubles de nos vies matérialistes, les deux j’en suis sur…

A pluche !

Au revoir Nils Holgersson, dis aux oies que je reviendrai, promis !

24 août 2012

Une étrange ressemblance, vous ne trouvez-pas?

Une étrange ressemblance, vous ne trouvez-pas?

La légende de ce petit garçon, parti avec les oies découvrir son pays la Suède, est inconsciemment la genèse du raid que je réalise Arcticorsica. Déjà plus de deux mois que je suis dans cette grande contrée, deux mois que je rêve les yeux ouverts. On m’avait promis mauvais accueil j’ai été reçu comme un frère ou un fils, je me doutais de sa beauté et j’en suis encore sous le charme. Ce matin je démonte mon bivouac, je ne suis pas sûr, mais je pense que c’est la dernière fois que je le ferai sur la terre de Scanie. Je reprends la route, je dois retrouver la nationale 108 qui me mènera à Trelleborg. Les voies rapides ici sont des coupes gorges à cyclistes, je tente de bien rester sur ma droite mais je sens les poids lourds me frôler, le seul reproche que je peux faire à la Suède c’est leurs routes du sud, de vraies roulettes russes. 10 km de frayeur, je roule cap au sud. Le Danemark est rejoint par un pont immense et les îles qui s’en suivent ne sont que des morceaux d’autoroutes interdites aux vélos. La seule solution le ferry. Après 50 bornes me voilà en train de pédaler dans le port de commerce le plus sud de Scandinavie. Le comptoir de la compagnie est vide, une dame me voit débarquer avec tout mon barda et comprend que j’arrive de loin. Elle est chaleureuse avec moi, mon voyage l’intéresse son mari est journaliste, elle lui en touchera deux mots, elle me prend une photo. Il est à peine 9h, elle me demande à quelle heure je veux partir ? Le premier s’il y a de la place. Ok il part dans 40’ !!! Incroyable, quelle coïncidence, moi qui croyais encore devoir patienter je ne sais combien d’heures voir de jour, me voilà sur un beau ferry pour une courte croisière qui me mènera en Allemagne. Le port s’éloigne, la Suède va devenir un souvenir, j’y ai souffert, j’y ai douté, pleuré mais qu’est ce que ce pays m’a envouté et appris. Les gens sont comme j’aime, rudes, directs et sincères. Pas de blablas, de causeries inutiles. Quand j’étais plus jeune j’avais une phrase qui irritait les latins, je te regardais droit dans les yeux et balançais : Parle utile ! Ici c’est le cas, la rudesse de l’hiver a rendu les gens dégourdis, proche de la nature. En deux mois à leur coté j’ai compris combien ils savaient apprécier le moment présent sans les futilités que développent la facilité des régions du soleil. Encore un clin d’œil de la vie le ferry s’appelle Nils Holgersson, une manière de boucler la boucle. Le voyage est loin d’être fini, j’en ai fait 3000, il m’en reste 2000 !  J’aurais mis 64 jours pour rallier le point le plus nord au point le plus sud de la Scandinavie, je n’arrive pas à y croire le départ de Slettnes me semble tellement loin. Un gros morceau m’attend, l’Europe continentale, je vais tenter d’avancer au mieux et de mettre en application tout ce que j’ai déjà appris… Mais vivons le moment présent. Merci à toutes les personnes qui sans me connaître m’ont apportées confiance, chaleur, soutien et amitié, tack så mycket. I’m a free man.

A pluche !