Le grand voyage…

17 octobre 2018

 

 C’est à la suite d’un voyage de 4 années en compagnie de mon vieux bateau en bois le bien nommé Cabochard, que l’association Bout de vie est née en 2003. Depuis que j’ai dû me séparer de lui à grand regret, en 2017, une idée a germé !

La mer est un lien entre les peuples, les cultures et les rêves. Cette « odyssée » m’a porté vers le désir de partager ma vie si atypique. Depuis la création de mon association, de jeunes amputés sillonnent le globe à mes côtés en rêvant d’une vie debout. Bout de vie doit avoir son propre voilier pour un long voyage de partage. C’est d’une logique implacable.

Sa première longue escale sera le Groenland. L’hiver, la mer se fige, la nuit est permanente, la vie devient survie et les tracas prennent un autre sens. A quelques encablures de ce mouillage polaire, se trouve le hameau d’Oqaatsut de 21 âmes, où j’y possède une maison. Ce sera le premier périple de ce tour du monde de partage. Un été boréal verra des équipages de « boiteux » se croiser. Puis le bateau reprendra la route vers le sud pour poursuivre son grand voyage vers l’Océan Pacifique et boucler un tour du monde en plusieurs années. Plus qu’une aventure cela se veut un hommage à la vie, un pied-de-nez aux malheurs qui ne sont pas des punitions mais des défis à relever. Là-bas au large, la nature ne juge pas, elle vit.

Un leitmotiv me poursuit donc depuis ce jour funeste où je fus amputé.  A chaque projet dans lequel je me suis lancé, je me suis entendu dire : « Tu ne peux pas le faire ». Puis en me voyant insister, cette phrase retentissait : « Tu vas te faire mal, c’est trop risqué ». Et finalement quand j’y suis arrivé, les mêmes m’ont confié en boucle : « oui mais toi c’est normal que tu y arrives ». Ce projet commence à voir le jour, il est entreprenant, intrépide, osé, aventureux et hardi. N’est-ce pas le grand Sénèque qui disait : « le monde appartient aux audacieux »… Alors le voyage est déjà en route. Mon enthousiasme ne m’a jamais lâché, même au lendemain de toutes les catastrophes que la vie m’a affligées, je suis debout et je ne boite pas dans ma tête. Etre un Homme libre n’est pas donné à tout le monde, alors dans le sillage de ce beau bateau, des Femmes et des Hommes « abîmés » trouveront aussi leur chemin et appliqueront à leur tour le leitmotiv de ma vie : « tu ne peux pas le faire, tu vas te faire mal si tu continues, puis en réussissant ils diront oui mais avec toi c’est normal… »

En vous joignant à ce projet, vous offrirez un élan d’espoir à des « cassés » de la vie. Vous apporterez ce rayon de soleil qui fait du bien après la tempête. Vous et votre entreprise serez les témoins privilégiés de ces renaissances.  Plus qu’un mécénat, c’est un échange et un partage. Le journal de bord qui sera mis en ligne au quotidien sur mon blog fera naître un livre, puis un film dont vous en serez également les acteurs … Les liens sociaux seront le relais entre tous ceux qui ont osé le premier pas à bord et ceux qui n’osent pas encore. Le rêve de voyage est déjà un voyage disait le sage Marek Halter.

Le bateau est un monocoque en aluminium dériveur intégral capable d’être pris dans les glaces quand la mer gèlera et qu’il sera immobilisé pour un long hiver, sa taille de 15mts est un compromis pour pouvoir être manœuvrable seul et avoir la capacité d’accueil d’équipiers. L’équipage sera là pour épauler les manœuvres mais la réussite de ce voyage sera la facilité de vie à bord sans qu’il soit adapté pour autant. Les invités se relayeront à tour de rôle. Pour certains ce sera la première fois qu’ils mettront le pied à bord d’un bateau. Le perpétuel roulis d’un voilier est une épreuve de chaque instant pour une personne fraîchement appareillée.

Nous l’appellerons Niviarsiaq qui a une double signification en groenlandais. En premier lieu cela veut dire « jeune fille » mais c’est aussi le nom de l’épilobe à feuilles larges qui est l’emblème du Groenland. Niviarsiaq est surtout le symbole de la renaissance. Cette fleur boréale semble fragile, pourtant chaque année après un hiver des plus rudes, elle ressurgit pour offrir sa parure pourpre au pays de Nanoq (ours polaire en groenlandais). Ce bateau sera un acte de renaissance pour celui qui aura la chance d’y devenir équipier A chaque escale l’équipage changera, à leur tour en rentrant chez eux ils seront les messagers de l’espoir, à leur tour ils soutiendront les nouveaux arrivants dans le monde du handicap. Plus qu’une croisière ce sera un long voyage de l’intérieur où les questions sombres et irrationnelles trouveront leurs réponses.

Avant j’étais un voyageur solitaire, depuis je suis devenu un aventurier solidaire…

 

 

L’une de mes protégées à bord du voilier polaire Vagabond en escale à Ilulissat sur la côte nord-ouest du Groenland été 2015…

A la rencontre de France et Eric les armateurs du beau voilier polaire Vagabond...

Rencontre de France et Eric à bord du voilier Vagabond…

Le livre est fermé…

8 mai 2017

L’épilogue est conclu, le livre est fermé, je n’ai plus qu’à le ranger. Les dernières pages furent riches en émotions, en réactions, le cap fût maintenu, mais mon âme tremble de ce trop de vide. Grâce à lui, sans doute, une médaille rouge pour briller en société m’a été attribuée, suivit d’une balade boréale pour partager et notre dernier voyage pour transférer « Mon » petit bateau dans sa nouvelle vie sans « Moi ». Un soulagement et une envie d’hurler, une sage décision et une terrible amputation. Des amis, j’en ai eu des vrais, beaucoup ont rejoint les étoiles, mais j’en garde encore quelques-uns solides ; ma famille, je me la suis reconstruite avec Bout de vie. Mes femmes, elles m’ont toutes apporté sagesses, tendresse, mais la Liberté n’est pas prêteuse alors elles sont devenues tendres souvenirs. Mais mon p’tit bateau en bois lui il est unique, fidèle, toujours là dans mes coups durs, têtu comme une mule, il réclame que l’on s’occupe de lui comme un nourrisson. Dans les coups de vent on s’est révélé croyant, non pas en la religion mais aux Dieux des vents et des courants, on fuyait le Diable en forme d’écueils ou de déferlantes. La religion c’est pour ceux qui sont à Terre, dans des cubes en béton en se croyant en sécurité car ils sont blottis derrière des murs de principes, d’assurances, de crédits qui rêvent de croissance et de votes. Nous au large on baroudait, loin de tous ce brouhaha, quand deux Cabochards s’unissent gare aux épaves oubliées, aux baies abandonnées, nous devenions flibustiers des temps modernes.  Pirates des Caraïbes peut bien aller se démaquiller, nous Corsaires des causes perdues, pas une seule fois nous n’avons refait la scène, la première était la bonne. Il m’a connu sur deux pattes, des tonnes d’eau salée ont coulés dans ses entrailles mais dés, que je déployais une carte marine, nos yeux pétillaient, le compas pointait, la gomme effaçait et voguent les enfants terribles, à nous l’horizon de l’inconnu. On ne nous donnait pas cher en cette vie de baroude, on nous avait prédit de finir clochard, de revenir au premier coup de vent, mais deux caboches ensemble peuvent renverser Hercule et Samson, Libeccio et Meltem ! Quand on veut on peut. Ce matin le port m’a accueilli comme à son habitude quand le Grécale le transforme en soufflerie, mais pas de petit mat en bois, pas de café dans ses entrailles, j’ai récupéré quelques bouts de « ficelles » qui marquaient encore le quai de sa présence et m’en suis allé au camp des Solitudes… Ouf il pleut, la route est quasiment inaccessible, aucune âme perdue ne pourra m’interpeller. Les souvenirs sont le terreau de notre présent, attention aux émotions qui embellissent et enjolivent nos vieilles histoires. Mes mains tremblent, aucun amis disparus, aucune séparation ne m’a mis dans cet état, mais la tristesse est un droit d’Homme, alors j’apprends à danser sous l’orage plutôt que de gémir de cette tourmente affective. Son nouveau port est au bout de la mer à Cassis, il entendra le bruit des cigales, des galéjades du Sud, des marins qui parlent beaucoup et fort mais son nouvel armateur est un chic type, il sera choyé, j’en suis sur. Ici au camp des Solitudes, la tempête secoue le tipi, attise le feu qui essaie de me réchauffer mais en vain, ici dans la vallée perdue ce soir je ne suis pas seul, la solitude grande amie de la Liberté est à mon chevet… Prend soins de toi Cabochard tu n’es pas un bateau, tu es bien plus que tout ça, tu m’as sauvé la vie, prend soin de toi p’tit bateau je t’aimerai, même après ma mort…

Le Cabochard vous écrit…

17 juin 2016


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Rencontre très riche et émouvante du constructeur du Cabochard à Port St Louis du Rhône

Rencontre très riche et émouvante du constructeur du Cabochard à Port St Louis du Rhône

C'est dans ce hangar qu'est né le Cabochard

C’est dans ce hangar qu’est né le Cabochard

On ne savait pas encore ce que l'on allé vivre...

On ne savait pas encore ce que l'on allé vivre...

On ne savait pas encore ce que l’on allait vivre…

Cela fait trop longtemps que je voulais prendre la parole, mais ma pudeur ne m’a jamais autorisé au premier pas. Je me nomme Cabochard, j’ai bientôt 46 ans, mon ethnie est celle des « Pointus », issu de la grande famille noble « Des prestigieux bateaux en bois », je vais vous raconter ma naissance, mon histoire, ma vie, mes peurs, mes rêves, mes folies, mes caprices, mes armateurs…

Il y a très longtemps, dans les années 1900, une graine emportée par le vent, germât sur une terre de la côte ouest d’Amérique du nord. Une pousse surgit, elle s’envola vers le ciel, puis son pied se renforcit, grossit. Les tempêtes l’assaillirent, de froid rustique en canicule estivale, l’arbre a su s’implanter, s’affirmer, les humains l’appelèrent Pin d’Oregon d’autres Pin Douglas. Les années passèrent, entre-temps il avait entendu parler des hommes qui s’entretuaient. Un jour, un bucheron qui l’avait repéré depuis longtemps, l’a abattu, élaguer et mis à sécher dans une immense bâtisse. Le temps continuait à filer, son séchage était parfait, alors sa folle aventure pouvait encore s’écrire. Printemps 1969, il fût chargé sur un cargo à destination du vieux continent, c’était la première fois qu’il sentait le roulis, je vous rassure, il n’était pas seul, les cales grouillaient de ses congénères. Après plusieurs semaines de mer et deux dépressions tropicales, les billots arrivèrent enfin dans le sud de la France. Stockés sur les quais de Port St Louis du Rhône, un brave charpentier, recherchait la perle rare, l’essence la plus adaptée à la construction d’une commande. Enfin sélectionnés, ils allèrent être entreposés dans un hangar de tôle ondulée, à l’abord d’un petit port en berge du fleuve Rhône. Paul, venait de recevoir une commande d’une unité de 10mts destinée à la pêche au thon. Son premier travail était la réalisation d’une maquette au 1/10éme, les côtes devaient être précises, puis grâce à ce modèle réduit, les gabarits étaient confectionnés. C’est là où je prenais naissance ! Mon « papa » était un pied-noir d’Algérie, d’origine italienne, sa vie, c’était la ville de Ténés, sur les bords de la Méditerranée d’Afrique du nord. Depuis plusieurs générations ils étaient charpentiers, de père en fils ils donnaient naissance à de magnifiques barques de pêche. La guerre d’Algérie devait leur faire fuir leur contrée natale et fruit du hasard, ils débarquaient en Camargue. Le pays de St Louis du Rhône était composé d’exilés grecs et pied-noir, chacun devait s’adapter à cette nouvelle existence et la famille de charpentiers, Cacciutolo, commençait une nouvelle vie. La maquette acceptée par le futur heureux armateur, Paul assemblait, découpait, rabotait, clouait au plus précis. Chaque pièce était essentielle, aucunes n’avaient droit à la faute d’inattention. C’était un solitaire au grand cœur, mais tous les enfants du village ne le lâchaient pas, c’était le spectacle de ce petit coin de paix. A l’époque la Camargue était sauvage, sans ceinture de raffineries. Le soir pour se débarrasser de trop de copeau, il calait quelques lignes à loup et dorade, un air de liberté lui faisait oublier sa terre si soudainement abandonnée. Au petit matin, machinalement il ouvrait la porte du hangar, j’étais là, en pleine construction. Mes côtes n’étaient pas flottantes, je devenais solide, je savais que bientôt j’allais chercher le large. En deux mois je pris naissance, en 60 jours, des bouts de bois me donnèrent le nom de Cabochard…

17 juin 2016, 13h34, le téléphone de mon armateur sonne, cela ne dure que quelques minutes, le grand raccroche et se jette dans mes entrailles, je connais le gaillard, je sais qu’il est triste comme jamais, ça y est il me sale mes coussins. Depuis 33 ans je partage ma vie avec un baroudeur au grand cœur, un bagarreur qui pleure pour un oiseau qui meure. Depuis trois décennies, je console ce grand gosse qui ne fait que réaliser ces rêves, mais aujourd’hui je crois avoir compris que ma vie avec lui devait se finir. Je ne suis pas triste car sans lui je n’en serais pas là aujourd’hui, mais je tiens à vous confier que sans moi il ne serait pas ce qu’il est aussi, sans moi il aurait craqué plus d’une fois. Ensemble on a baroudé, on a fait plein de « trucs » de fou ! Ok, il a écrit dans des bouquins des « petites » histoires mais il n’a pas tout raconté .Aujourd’hui il va falloir que je m’habitue à vivre sans lui. Il en a passé des heures à me poncer, me mastiquer, me cajoler. Combien de fois je l’ai vue partir en boitant de trop de boulot dans mes entrailles. Combien de fois je l’ai découragé, pour qu’il m’apprécie encore plus en mer. Pas un pays, un port une baie où j’ai eu un compliment, je suis un beau bateau, on me l’a souvent dit. Ne croyait pas que j’ai la quille qui enfle mais à force de me le dire je me suis habitué au compliment… J’ai passé ma première partie de vie pépère en bordure de la frontière italienne, au pays des citrons, là-bas j’y ai connu de bref armateur, mais un jour j’y ai vu un gosse blessé qui s’entêtait à monter à mon bord. Ce gamin m’a ému, je savais que j’avais une mission, le sauver ! Alors ensemble on est devenu une famille, une bande à nous deux, seul au monde on est parti à l’aventure, car le monde semblait nous appartenir et il nous a appartenu. La roue tourne, mon confident a trouvé un matelot qui va me ramener à Menton, je vais devoir m’habituer à vivre sans mon « boiteux », je vais conserver son odeur, comme on garde le foulard d’une fiancée quand on part à la guerre. Je crois qu’il est temps que j’écrive toute mon histoire, c’est qu’il va me manquer terriblement le grand costaud…

Comme une bouteille à la mer…

9 mai 2016
Entouré des écris de notre vie d'aventure. A gauche celles publiées, à droites celles qui ne seront jamais publiées!

Entouré des écris de notre vie d’aventure. A gauche celles publiées, à droites celles qui ne seront jamais publiées!

Comme une bouteille à la mer je lance un message. Je ne sais pas si je dois dire incroyable, insensé, ou bien sage. Le Cabochard est en vente ! Le mois d’avril est passé et le poisson ranger dans la glacière, cela faisait quelques années que j’avais cette solution en tête, j’ai fait une fois de plus un pas vers l’inconnu, je dois me séparer de mon « petit » bateau. Je n’aurais jamais imaginé qu’un jour je puisse écrire ça. Depuis plus de 30 ans nous avons été complice, mes livres lui ont rendu toujours hommage, sur « mes » 4 Thalassa, il fût à l’écran, ma vie a été construite par ce « bout » de bois si sémillant. Mais un bateau est fait pour naviguer, c’est un bon moyen pour approcher une terre inconnue. D’abord sur la table à cartes on définit le nombre de milles restant, puis dans la nuit un éclat de phare apparaît, si le vent vient de terre on s’enivre d’une fragrance de la nature qui s’éveille, puis la côte sort de la brume. On ne parle pas leur langue, on ne connaît pas l’entrée de la baie, la carte n’est pas assez précise pour annoncer les écueils. Alors il faut affaler la voile semi-aurique et la lourde trinquette et réduire l’allure. Le soleil doit être dans le dos pour que les taches claires annonçant des hauts fonds puissent être aperçues, puis quelques maisons pointent le bout de leur toit, l’ancre est mouillée, le pavillon jaune demandant la douane, hissé. Le moteur est enfin stoppé, un vieux reflexe me fait ouvrir la cale-moteur pour voir si tout est en règle, tout l’est, à son habitude. L’envie de descendre à terre, n’est pas systématique, le pays, vu du cockpit me laisse encore un peu de rêve. Comme le dit si bien mon ami Sylvain Tesson : arriver sans être sur de rester, partir en sachant que l’on va revenir. Pendant ma vie de nomade des mers cela a été notre quotidien, un thé trop sucré en Turquie, une cité engloutie en mer Egée, quelques épaves à renflouer à Gibraltar, une Afrique du Nord bien nerveuse devant un invalide de guerre en mode croisière, et des rencontres à n’en plus finir. Le livre d’or du bord est un voyage à lui tous seuls ! Alors pourquoi s’en séparer, pourquoi lui tourner le dos, pourquoi ne plus vouloir humer son parfum de bois vernis ? Parce que ! J’y ai vécu à son bord pendant 22 ans, même ma fille, que j’ai perdue de vue, y a été conçue, mais je n’arrive plus à avoir la fibre pour repartir avec, j’ai d’autres rêves et l’entretenir me prend un temps de folie et une énergie de plus en plus difficile à trouver. Comme je suis maniaque, je le veux impeccable, parfait et pour ça il faut poncer, mastiquer, lustrer, mais les heures filent et de nomade libre, je me sens de plus en plus armateur prisonnier. La décision ne fût pas simple, mais je sais que la vie lui mettra sur sa route un fou rêveur qui songe de découvrir le mare nostrum autrement qu’avec un « truc » en plastique de série. Le Cabochard est unique, en 30 ans je n’ai jamais vu son sister ship, incroyable non ? Tu m’étonnes, c’est avec mes petites mains et beaucoup d’énergie que je l’ai rendu comme il est aujourd’hui. Depuis que j’ai mis des annonces je reçois des demandes de dossier, je ne suis pas un vendeur qui cherche sa marge. Pour moi le Cabochard n’a pas de prix, et ce n’est pas une transaction que je veux réaliser mais une transmission. Ne montera à son bord que le rêveur, celui qui saura être humble, le Cabochard n’aime pas les fanfarons, le marin sera systématiquement refusé, seul l’habitant de la mer sera toléré. Le nouvel acquéreur est un gars qui va devoir supporter mes explications sans « peut-être », mes trucs et astuces qui font de ce bateau presque cinquantenaire comme sorti de chantier. J’ai tout mon temps mais l’heure est arrivée. Ce soir j’écris ces mots tout seul dans la cabane, là-bas au fond du golfe le Cabochard est bien amarré, devant mes yeux sur l’étagère sa maquette et les trois tomes du grand voyage que nous avons fait ensemble, bientôt de lui, il ne me restera que ça. Je suis ému mais pas triste, je suis touché mais pas frustré, je suis « tout chose » mais certain d’un happy end. Voilà mes amis, faîtes tourner cette infos, faîtes que ce petit bateau puisse encore permettre de découvrir de nouveaux horizons, celui qui osera la démarche sera lui aussi un Freeman, c’est si rare à notre époque…

Cap sur une autre vie…

16 juin 2015
Moment solennel d'écriture...

Moment solennel d'écriture...

Je ne pouvais pas imaginer le changement complet de ce demi-siècle passé. Les anniversaires sont des moments que je n’apprécie pas du tout, les dates n’ont aucune importance à mes yeux et les fêtes prévues longtemps à l’avance ne sont pas à mes goûts. Donc sans y prêter aucune attention, j’ai passé sur la pointe de la prothèse, le cap des 50 ans sans obligation affligeante au Cabochard que je suis ! Mais une succession d’événements m’ont amené non plus sur une autre page ou un autre chapitre mais bel et bien sur l’écriture d’un nouveau livre. Au moment où je rédige ces mots une pergola me cache du soleil devant une modeste cabane, le petit Cabochard repose pas trop loin d’ici mais il n’est plus ma demeure. En perdant la jambe il y a 32 ans, en revenant de longs mois d’hospitalisation, j’avais remarqué que tout mon entourage avait changé. Mais en vérité, eux n’avaient pas bougé d’un cheveu, c’était moi qui avait pris un autre cap ! Depuis janvier je me suis mis en mode machine pour bâtir cette petite maison et rien n’a pu m’arrêter ; depuis quelques jours le rêve est devenu réalité, j’y ai posé mon sac. Mais l’émotion a décidé de s’inviter, le Cabochard est vidé de mes affaires, il me semble plus grand mais aussi plus froid, moins confident. 22 ans que je m’y suis endormis, 22 ans que je m’y suis réveillé ! Il m’a permis de devenir le Freeman. De Gibraltar à la Turquie nous y avons laissé des amis, nous y avons trouvé des trésors enfouis, des victoires comme des défaites nous ont apposés quelques tatouages. Dans ma cabane je me sens par moment perdu, l’émotion me scie le ventre, deviendrais-je un oiseau sédentaire, la vue depuis ce nid d’aigle est à l’infini, alors mes yeux scrute l’horizon. J’y vois des voiles blanches, peut-être aussi quelques moutons, je me demande si un jour je n’y reconnaitrais pas un beau vieux bateau de bois reprendre le large pour d’autres aventures mais sans le capitaine boiteux ! Difficile de visualiser un avenir sans moi pour ce petit pointu si cher à mon cœur. Mon vieil ami de la Galiote lui aussi va changer de vie, il stoppe son activité pour une retraite bien méritée, les Lavezzi tourne une page, les fossoyeurs des Bouches de Bonifacio pourront y déverser des tonnes de touristes, nous ne serons plus là pour constater le désastre de l’appel au gain ! Personne n’a changé, c’est moi qui prends une autre route, en donnant quelques degrés à la barre du navire de ma vie j’ai certainement évité des hauts fonds qui m’auraient été fatales. J’ai trouvé l’endroit où va pousser un potager, Karin réussi à m’apaiser, l’oiseau du large n’est pas toujours facile à cerner. Plein de choses ont changé, plein de nouveaux projets tentent de pointer le bout de leur nez, et mes nuits sont agitées, comment oublier, comment tourner la page. L’écriture va reprendre sa place, depuis 6 mois mes pages n’étaient remplis que de côtes précises ou de matériaux à acheminer à pied d’œuvre. Les cigales chantent, le vent d’ouest fait claquer mon vieux drapeau de pirate, une nouvelle vie s’ouvre à moi, jamais je n’aurais pu imaginer cela. Je repose mon crayon, je referme ma page, je vais tenter de retrouver un sens à ce calepin de vie. De plus en plus je reçois des témoignages extraordinaires, des mots que je garde précieusement, je n’arrive pas à comprendre pourquoi vous êtes si élogieux à mon égard ! De l’extérieur peut-être vous me prenez pour ce que je ne suis pas vraiment, mais en tous les cas sachez que vous êtes tous bien calés dans mon cœur… Depuis la cabane du Freeman je vous envoie tout le meilleur du monde.

PS : Les mascottes Norra et Jo Zef ont trouvé leur place dans la kota et ils ne semblent pas trop souffrir du mal de terre !

Festival des Abyss

22 mai 2014

Abyss

Le deuxième Festival des Abyss d’Ajaccio vient de débuter, un événement récent mais qui ne lésine pas sur les moyens, le parrain cette année sera Jean-Michel Cousteau. Le monde sous-marin a toujours fasciné un large public et l’odyssée du Commandant au bonnet rouge a stimulé une palanqué de garnement à pratiquer l’école buissonnière afin de mouiller leurs palmes dans le grand bleu ; je faisais parti de cela. A ma grande surprise les organisateurs n’ont pas trouvé mieux que de me nommer président du jury environnement !

Un sujet à la mode verte que je tenterai d’animer manière « cabochard ». Les logos bio abondent dans les paniers de la ménagère, les bobos-écolos refont le monde cachés derrière une étiquette recyclable. Dans les soirées climatisées, il est proposé un buffet campagnard venu directement de Lozère à dos de mule ; « ma chère madame, ici tout est bioooooooooooo »! La bande à Bardot accuse les barbares Inuits de massacrer les bébés phoques, elles en pleurent de rage faisant couler leur rimmel à base de graisse de baleine « commerce équitable » ! De mon tipi je me laisse emporter dans mes moqueries enfantines. Les slogans sauvons la planète sont de bon ton en ce monde de consommation, mais notre chère Terre va très bien elle n’a pas besoin de fourmi pour être sauvée. Quand certain la « titille» elle se démange en créant des tremblements de terre, quand l’allergie des usines lui irrite les narines, elle éternue provocant des ouragans !!! Les râleurs demandent des lois, les rêveurs que l’homme devienne meilleur, mais la Terre tourne, pas un jour elle n’a loupé sa rotation, pas un matin le soleil n’a zappé son levé. Laissons les lois aux politiques, mais changeons nos quotidiens dés maintenant. Ce n’est pas le pétrole qui va manquer un jour mais l’eau potable, les engrais et pesticides pourrissent nos rivières, Alzheimer, sclérose en plaque, cancer sont de plus en plus fréquents. Les pauvres Groenlandais qu’on accuse de tous les maux sont en zone de mort imminente. Un flux naturel de sud leur déverse sans vergogne tout les déchets toxiques possibles et inimaginables de l’Europe du sud, les planctons l’ingèrent et jusqu’au bout de la chaîne alimentaire les animaux sont contaminés. En fin de maillon nos eskimos, qui depuis la nuit des temps survivent par leur pêche et chasse, en sont les premiers touchés. Le lait maternel des femmes qui allaitent est considéré, après multiples recherches scientifiques internationales, toxique et impropre à la consommation ; le taux de cancer en quelques décennies a bondi au pays de Nanoq. Mais que faire alors ? Changeons sans concession nos quotidiens, j’ai viré depuis un bon moment tout les détergents, quatre noix d’indes pour la lessive sont suffisantes. Un mélange de savon noir, bicarbonate de soude, cristaux de soude avec une touche d’huile essentielle de lavande pour ma vaisselle… Cela peut paraître une goutte d’eau mais en changeant dés maintenant nos habitudes peut-être l’échéance de l’autodestruction reculera de quelques années. Les fruits et légumes de saisons sont bien meilleurs que ceux qui nous viennent de l’autre bout du monde, mais oui je prends très souvent l’avion, mais oui mon bateau fonctionne au gas-oil comme ma voiture, vous voyez ce n’est pas simple. « Je pisse sur les arbres, moi monsieur; avec les 6 litres d’eau potable made in Jacob-Delafont, un gamin somalien vit une semaine de plus »… La logique et seulement elle, nous fera ouvrir les yeux,  mais comme notre schéma sociétal est construit dans un bunker basé sur le « toujours plus », nous sommes voués à disparaitre. Si un génie pouvait désensorceler les Hommes exorcisé par la « croissance », les choses pourrait prendre un autre cap. Une pièce pouvant contenir quatre personnes peut en recevoir deux de plus mais ce sera serré, puis deux autres de plus, ce sera encore plus serré, deux de plus et on serra entassé, trente de plus ce sera intenable, cent et ce sera une mort programmée !

La vie nous a donné des yeux et un cerveau alors pourquoi ne pas s’en servir. La croissance nous dézinguera, à quelques parts cela est rassurant, la planète est trop gentille avec nous, mais il n’y a aucun soucis à se faire, elle a l’habitude de tourner en rond ! Réalisons dans quel paradis nous vivons, hélas certain de nos  comportements sont affligeants. Nous avons tout pour être heureux, absolument tout, mais certains semblent prendre un malin plaisir à créer les ghettos, à creuser les abysses pour diviser les moutons, une doctrine est devenue internationale hélas : « si je ne le prends pas moi ce sera lui, alors je pille »…  Je vous laisse à vos réflexions qui je l’espère vous mèneront à une action ou peut-être plus, des maintenant.

Sur ces paroles « cabocharde »,  je vous donne rendez-vous au Festival des Abyss d’Ajaccio, à mes côtés seront, Francis Le Guen, Christian Petron et bien d’autres personnalités du monde du silence.

Reveries polaires

11 mai 2014

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Tout est à sa place, rien n’a bougé, le potager  a survécu à mon absence et le torrent suit son cours…de philosophie. Le tipi caché au bout de la vallée perdue est mon repaire de corsaire des bois. En bas, comme disent certains, la saison a commencé, camping-car et bateau de location se battent le droit de son bout de corse. Là-haut j’y ai tout le confort possible, silence, paix et sérénité sans aucune chance de croiser un bruyant ! Le pays d’Apoutiaq n’est déjà qu’un souvenir, il sera une image de référence de plus. Mais comme à chaque retour la machine à cogiter s’emballe, des projets ont débarqué au pied de ma prothèse, alors il faut gérer, éviter le trop plein d’envie, je deviens un boxeur  esquivant les uppercuts. Mais tout est possible, presque tous mes rêves se sont réalisés, alors pourquoi pas ceux-là ! Les mascottes sont attentives dans leur balançoire de fortune, pour elles, l’aventure c’est leur quotidien, alors au fond d’un sac étanche ou d’un duvet dans un bivouac du bout du monde, c’est toujours Ok. Vous voyez mon esprit d’enfant me colle à la peau, je rêve les yeux ouverts car demain il sera peut-être trop tard. Véro qui est venue me rejoindre, sait, sent, l’oiseau de mer qui sommeille en cette âme écorchée vive.  Je lui déploie une carte du Groenland, je lui explique ces mois de solitude, lui argumentant cet autre projet de partage, sans effort elle embarque dans mes délires polaires, pas une seule fois elle ne veut quitter le bord.  Ce n’est plus un dessin monochrome, mais une aquarelle issue d’une palette complète. Faites-gaffes, avec un peu de malchance, vous mes chers lecteurs, serez capables d’embarquer dans mes délires. Niko en ce moment traque avec une équipe télé l’ours blanc au Svalbard pour une future émission, être guide polaire a ses exigences. Un soir entre la tranche de jambon et les gosses qui jouent avec leur gadget électronique, certains verront la vraie vie de l’ours mangeur d’homme ! Mais les rêveurs vont se recroiser, les frères de glace vont peut-être bâtir des projets, des trucs que personne n’avait pensé, des balades improbables au pays du silence. La solitude se dispute avec la partage je ne sais pas qui aura le dessus. Pour la méditation, imaginez : des semaines à pagayer sans causer qu’avec vous-même. Puis une immense plage  de galets noires surgit à votre étrave où une mère Ours s’inquiète de ses rejetons nageant non loin d’une bande d’orque, là-bas au fond un glacier et vous qui allez monter votre bivouac. Puis au bout du long voyage un « vrai village » groenlandais avec ma Vrai et un groupe de jeunes différents. Le partage a sa besace de rêves aussi : Une baleinière groenlandaise retapée, équipée plongée-croisière pour chasser les trésors du clan d’Erik le rouge. Des sites vikings pas encore fouillés et deux glaçons aux bonnets rouges qui se transforment en chercheur. De temps à autre des gamins un peu malmenés par la vie pourraient y poser leur sac, pour vivre l’instant présent. Je vous laisse votre douche chaude, le frigo plein, le chauffage dans la chambre mais donnez moi un horizon d’icebergs, une côte sans les hommes, une plage abandonnée polaire. Oui je sais, je suis incorrigible, pourquoi devrais-je changer, c’est tellement bon d’être un homme libre.

Pendant mon absence le Festival Curieux Voyageur de St Étienne a décerné le Prix littéraire 2014. Le lauréat est mon dernier livre Ayeltgnu le défi d’une vie debout. De la région parisienne et du Rhône Alpes, environs 200 lecteurs ont voté pour mes écrits. Par ce billet je tenais à les remercier du fond du cœur.

A pluche.

Journal de bord salé

16 décembre 2013

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4h59 : Ca y est la « gigoterie » me tient en éveil, j’ai du le sortir de ses rêves, il semble m’appeler depuis le ponton à côté du Cabochard. Qui ? Mais Immaqa mon beau kayak.

5h42 : Les mascottes ont eu les derniers mots elles ne viendront pas aujourd’hui, tant-pis pour elles je n’aurai pas à partager ma boite de biscuit aux noisettes !

6h23 : Le brouillard m’étreint, la différence de température entre la mer à 15° et l’atmosphère à 3° rend la navigation mystérieuse. Le silence est profond comme l’est la nuit quasi hivernale, je ne sais pas où m’amènera cette journée mais je suis prêt à me goinfrer du temps présent.

6h31 : Les îlots des Bruzzi, sont déjà atteints, le ciel s’éclairci, le brouillard pose genou à terre, bientôt le soleil lui tordra le cou. Immaqa file droit comme un rostre de narval, Dieu que c’est bon d’être ici.

6h45 : je sors de la zone intégrale où la pêche est interdite, je peux enfin dérouler ma traine, et si un poisson tête en l’air venez s’y prendre !

7h08 : Je ne le vois pas mais je sens sa présence, le soleil a encore l’accent italien, bientôt il sera corsée : quandu ghjunghje u sole u marinaru e sempre felice…(Quand arrive le soleil le marin est toujours heureux)

7h42 : Pose café, non je ne pense pas à Véronique Jannot, mais à une autre Véro là-bas à terre ! Le vieux thermos hydrate mon café, une première rangée de gâteaux  est savoureusement dégustée. Le silence c’est le bruit du temps qui passe.

8h 33 : Le lion de Roccapina scrute vers le sud, s’il pouvait me confier où a été caché le trésor du feu paquebot Tasmania… Je sais ; il est là ; où ? Mais au fond de mon cœur !

9h07 : L’embouchure du fleuve Ortolo se dévoile, là bas, tout là haut il serpente devant mon camp des solitudes. Dommage qu’il soit si gringalet, nous ne tenons pas dans son lit.

10h46 : Je me demande si mon corps et mon esprit sont en connexion, ma tête papillonne mes bras moulinent.

11h18 : La pointe de Murtoli est dépassée, la brise de terre vit ses derniers soupirs, le Maestrale nous offre un apéritif, avec modération bien-sur !

11h24 : Immaqa est hissé sur une plage abandonnée, les traces dévoilent des pas d’ongulés et d’un certain maître renard, ne me croyez pas affable !

11h52 : Que le pique-nique soit sacrifié sur l’autel du bonheur et de la simplicité du moment, à perte de vue une mer et un maquis vides de tout hommes, j’ai compris je suis seul au monde : Wilsoooooooooooon ! Zut ; Jo Zeeeeeeeeeeef !!!

12h45 : la brise du Nord me sort de la léthargie, j’ai rêvé que je faisais du kayak sur une côte sublime, que l’aventure était mon quotidien, que j’étais un Free Man. De bleu mais ce n’était pas un rêve.

13h10 : Je décide de rentrer vers ma maison flottante, deux mascottes veillent au grain mais je ne suis pas sur de leur sérieux pendant mon absence, un braquage de cambuse est si vite arrivée !

13h12 : Je tente mon coup de poker, j’envoi mon cerf volant, il part rejoindre les cieux, je ne demande pas de carte, j’ai un carré d’As.

15h09 : Tiens mais je les ai déjà vu ses îlots ! Mais c’est bien sur, les Bruzzi. Vous avez dit une bonne moyenne ? Mais ce n’est plus un kayak mais une Formule I des mers !

16h12 : j’ai rejoint le bord du Cabochard, il me semble entendre les mascottes faire à la hâte du rangement. En attendant qu’ils cachent leur journée,  je fini les derniers gâteaux aux noisettes, à chacun ses délits, j’ai dit délit et pas délire !!!

16h14 : 36,78km au compteur ! Je compte maintenant ? Damned mais je ne suis pas en expédition !

17h03 : Je nettoie mes poissons, oui je sais, je ne suis qu’un pauvre pêcheur.

17h32 : Immaqa est ficelé sur le ponton à coté de mon petit bateau, je le couvre, il ne faudrait pas qu’il prenne froid, un ami sa se soigne.

18h45 : je reviens de la capitainerie, j’y ai pris une douche façon homard à la Thermidor, si je vois un pot de mayonnaise dans le carré de mon bateau, je reprends la mer, la « mascotterie » peut-être fatale.

19h34 : Ma vieille marmite de fonte réchauffe ma soupe aux potirons, la nuit enveloppe le « kayakiste » rêveur, je ne crois pas que je vais faire de vieux os.

20h03 : Allo 1 : C’est qui ? T’es où !!! (Soupir) ! Ma journée ? Bof la routine… Ciao

20h05 : Allo 2 : Véro, tu sais quoi ? I am a Free Man ; Kiss

20h57 : Je déplace les mascottes sur la bannette tribord et m’active à faire mon lit, trois grosses couvertures vont me tenir chaud. Les loupiottes éclairent les pages de mon dernier livre, Le Prince des nuages, que je dois finir à la hâte, bientôt je l’enverrai par la poste à une jeune fille de 14 ans, qui j’en suis sur, rêve en douce de savoir qui est son père là-bas au bout de l’horizon.

21h21 : Le marchand de sable fait sa livraison, peut importe les nuits avenirs, les jours sont l’énergie de mes vies, oui je vous assure, j’en ai plusieurs de vie !

Bonne nuit les petits…

Team Jolokia…

24 octobre 2012

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A l’occasion d’une émission de Sandrine Mercier sur France Inter je partageais le micro avec Laurent Marzec. Nous avions une tribune de 60’ pour dévoiler nos bouts de vie, de mecs un peu esquintés. Nos livres en promotion nous tentions de convaincre les auditeurs que nos parcours étaient formidables, malgré un classement radical en personnes dites « handicapées ». Ce garçon tétraplégique relevait le défi de former une équipe pour être le premier voilier mixte à s’aligner sur des records établis par des valides …  Les Écrans de l’aventure 2010 ont commis l’erreur de me projeter membre du jury, la Guilde Européenne du Raid est le summum du microcosme de l’aventure, en faire partie me donnera le droit de m’exprimer. Nous visionnions des films variés mais tous fascinants, l’un d’eux me toucha ; Jolokia. Laurent avait réussi son pari, un équipage mixte battait le record entre Lorient et l’Ile Maurice. Eric Bellion en était le skipper mais surtout le boss. Jolokia est un piment fort de l’océan Indien et le nom de ce bateau du Défi Intégration, il venait de rentrer dans la cour des grands en battant le record de la route des piments. Mes compagnons de jury ciblaient d’autres films, mon intransigeance payait, je remettais le prix Alain Bombard à Eric et son équipage…

Val d’Isère, les festivals d’aventures m’ont dans le nez, je suis encore promu jury ! Nous ne sommes que quatre, nous visionnons, nous échangeons mais comme les mousquetaires seul un trio existe, la quatrième me fatigue, m’irrite, sa « blonditude » me met en mode avalanche ! Cette semaine est animée par le fantastique Sylvain Tesson, je suis comme un enfant devant le Père Noël, chaque fois que je le croise, je le prends comme une offrande ! Il me connaît et essaie d’arrondir les angles. Non un cabochard ne change pas. Les réflexions de miss Barbie m’ont remonté à bloc. Il est minuit nous sommes dans une salle d’un restaurant étoilé de la station, il faut débattre, attribuer les prix.  Sylvain nous écoute, il prend des notes, ses aphorismes en poche, il attend ma bombe à retardement. Jolokia n’aura pas de prix ! Je me lève sans finesse, quitte la salle, blondinette reçoit un tacle, le carton rouge ? M’en fous, je me casse ! L’organisatrice me rattrape, elle sait y faire, Sylvain un verre à la main, accepte mes proses sans verre, le film recevra un prix spécial… Eric Bellion est sur scène, mes tripes lui ont préparé un discours, le public est silencieux, le skipper a les yeux couleurs salés, standing ovation, vive la différence. Contre toute attente, je suis sollicité pour soutenir le projet : « Eric tu te fous de moi, Isabelle Autissier, Nonce Paolini, le chef d’état major de la Marine Nationale et bien d’autres sont de vrais parrains ? » Ok j’accepte en ronchonnant. Depuis Défi Intégration avance à grands pas même si certains tirent la patte. Au mois de juin 130 candidats ont postulé à cette annonce, je râle, j’aurais voulu l’écrire moi :

« Recherche hommes et femmes pour voyage hasardeux. Pas de salaire. Vie spartiate, tâches d’équipage rudes ou impitoyables, implication et courtoisie exigées. Recrutement sévère non-ouvert à tous et à toutes, priorité aux borgne-fesse sociaux ou physiques. Pas de cour des miracles mais trop normal s’abstenir. Honneur et reconnaissance garantis en cas de succès. Premières informations sur www.teamjolokia.com »

43 ont été retenus, ce week-end sur la base nautique de l’île Monsieur en région parisienne, il y aura un test grandeur nature. Seule une petite vingtaine de candidats décrocheront le sésame pour la troisième et dernière phase du recrutement, à savoir 4 jours de navigation sur le VOR 60 Team Jolokia à Lorient en novembre. Les conditions météorologiques automnales probablement musclées sont un test ultime et implacable pour éprouver l’envie et les capacités du futur équipage.

TEAM JOLOKIA est un projet sportif. C’est aussi un laboratoire dédié à l’humain. La diversité est une véritable valeur ajoutée pour une équipe performante. Les équipiers sont recrutés en fonction de leurs compétences mais aussi en tenant compte de leurs facultés originales qui enrichissent l’équipe. Le TEAM JOLOKIA est composé de marins jeunes et séniors, hommes et femmes, handicapés et valides, et de personnes de cultures différentes. La mer possède le pouvoir sans appel de renforcer ou désagréger la cohésion d’un groupe. Cette aventure humaine, sera une découverte, avec des professionnels, des psychologues et des chercheurs, de nouvelles clés pour une meilleure intégration de la différence. Pendant quatre ans, ils prendront le départ des courses les plus prestigieuses en France et dans le monde entier à bord d’un VOR 60 (Bateau de la Volvo Ocean Race 2001-2002). Fastnet, Sydney-Hobart, Transpac et Québec-Saint Malo sont notamment sur la liste.
TEAM JOLOKIA revisite le mythe de la tour de Babel. La diversité n’est plus vue comme une malédiction mais une opportunité pour l’Homme de se dépasser.

tj

Un Bout de vie au Rotary Valence Drôme-Porte du Soleil…

7 décembre 2011

Lavezzi été 2002, mon école de plongée tourne plein pot, une micro structure puisque je suis seul !

Par habitude je ne posais jamais la moindre question à mes clients sur leurs activités. Ils étaient là pour plonger et ma devise était de les faire rêver en les déconnectant de leur quotidien.

Nicanor et son épouse faisaient partis des habitués, comme à l’accoutumé on cause, poisson, épave, tempête mais pas le moindre mot sur leurs fonctions. Le temps passe et bulle après bulle je change de cap et ferme définitivement mon école au public. Seul quelques amis et membres de Bout de vie ont droit de buller maintenant en ma compagnie ! Eté 2009, un yacht au pavillon des USA mouille où il ne faut pas, avec mon tact habituel, je vais « virer » ses cow-boys ! Incroyable à son bord je me trouve nez à nez avec Nicanor !!! Je suis comme d’habitude prêt à prendre l’avion et ne peux m’éterniser mais nous renouons le contact, entre temps il avait suivi par les médias l’ascension de Bout de vie. Septembre 2010, le retour de mon expédition du Yukon m’est difficile. Ces semaines de solitude ne me donnent pas trop l’envie d’être au milieu des « autres » !!! La pile de courriers et de mails me laisse indifférent, au milieu de tout ça un fax urgent. Pas le temps, pas envie et puis zut, si les ours m’avaient bouffé, je n’aurai pas pu répondre ! Logique, non ? Finalement, je décortique les plis, j’ouvre les courriels et lis les fax… Nicanor reprend contact avec moi, il veut m’entendre pour une soirée caritative Bout de vie…

5 Décembre de cette année me voilà invité par le Rotary de Valence Drôme-Porte du Soleil. Nicanor, encore lui, en est le créateur et ce soir une grande salle de 120 personnes sont réunies pour une vente aux enchères de grands vins Côtes du Rhône. Le restaurant de Michel Chabran, étoilé Michelin, nous régale les papilles et les grands crus sont mis aux enchères. Le charmant président du Rotary, Marc Duc, prend la parole et me demande de le rejoindre. Brièvement je me présente et en quelques mots dévoile mon Bout de vie. Une soirée très conviviale où la culture du vin a rimé avec solidarité.

Une fois de plus les « cailloux des Lavezzi » m’ont permis de continuer ma croisade Bout de vie.

Merci de tout mon cœur et de la part de tous les futurs stagiaires de Bout de vie à toute l’équipe du Rotary Valence Drôme-Porte du Soleil. Grâce à votre générosité des « raccourcis » de la vie vont pouvoir découvrir un lieu magique où des miracles s’y déroulent chaque année.